Passage de témoin
« Les Femmes de Loire » tel était le titre du dernier projet de notre ami Yves Fougerat, un travail qu'il ne put mener à son terme, fauché qu'il fut par ce qu'il est de coutume de nommer avec pudeur : une longue maladie. Ne sachant rien de l'état d'avancé de ce livre, n'en connaissant que le projet de couverture qui sera strictement respecté, je me proposai comme un hommage et une sorte d'obligation morale d'achever ce qui resta en suspens par la force du destin.
C'est plus dix-huit mois après son départ que je reçus trois chemises contenant des documents, des extraits, quelques notes et illustrations qui au final ressemblent bien plus à la constitution d'un fond documentaire que l'architecture d'un ouvrage au plan établi. Je ne doute pas que ce livre fut clairement dans l'esprit de son concepteur, il n'en demeure pas moins assez confus pour celui qui se trouve devant ce qui peut lui paraître être l'étape initiale et non l'amorce d'un écrit.
Il me faudra donc faire œuvre de divination, de supputation, d'imagination pour faire de ce corpus incertain un élément cohérent tout autant que le plus respectueux possible de ce qui ne peut être que l'idée que je me fais du projet de son initiateur.
Quoiqu'il en soit, je ne peut me contenter de puiser uniquement dans les dossiers qui m'ont été confiés, afin de mettre en forme tout en m'évertuant à donner une ligne directrice qui se fondera sur ce titre qui délimite parfaitement la volonté de son concepteur et impose nécessairement le retraits de documents présents dans les chemises qui m'ont été confié. Il me faudra compléter et orienter ce corpus au risque de sortir du projet initial de son concepteur. Qu'il me le pardonne de là où il se trouve.
J'assume le risque de me fourvoyer sans avoir à aucun moment la tentation de m'attribuer le moindre mérite ni la plus petite gloriole. Je ferai nécessairement des choix, je prendrai des directions qui seront déterminées par mon interprétation des notes de notre ami et plus encore de sa relation intime, presque charnelle avec la petite sirène de Loire qui trône à Neuvy-sur-Loire son village natal, stèle en hommage aux mariniers disparus en Loire.
L'histoire de ce monument porte l'histoire familiale de Yves Fougerat puisque son père en fut un des instigateurs tout comme elle place l'auteur post-mortem dans sa filiation affective et personnel avec Maurice Genevoix. Il a en effet été propriétaire de la maison du frère de son glorieux modèle donnant sur sa chère Loire à Saint Denis de l'hôtel.
Il fut encore un des piliers des amis du musée de la Marine de Loire de Châteauneuf-sur-Loire, village ligérien où grandit Maurice Genevoix ce qui ajoute à cette filiation de cœur.
Yves a du lui aussi se retrouver dans les bras d'Agnes, en compagnie d'autres garçons sur le rives de sa chère rivière, premier personnage féminin de ce livre. C'est d'elle que naturellement, découlera en toute logique la suite de ce cortège des dames qui ont à un titre ou bien un autre figuré dans la panthéon ligérien de notre regretté ami. Celles dont j'évoquerai le parcours, la trace ou bien l'histoire ont figuré dans les documents patiemment rangés par monsieur Fougerat.
Il me faudra faire quelques ajouts afin que ce livre ne soit pas un document incomplet par rapport à l'ambition portée par son titre. La camarde en a décidé ainsi, je me dois d'interpréter les partitions incomplètes qui sont à ma disposition, les complétant parfois pour rendre compte du projet tel que je l'ai compris. J'exhume ici, un livre qui n'était qu'à l'état d'ébauche pour ce qui m'est permis de voir. D'autres auraient agi différemment, je n'en disconviens pas et une fois encore, j'affirme ne pas m’ériger un gardien du temple.
à suivre ...
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