samedi 30 novembre 2019

L’hirondelle des rivages


Faire son trou



Un éclair brun dans les airs avec un gazouillis roulé lancé à toute vitesse, c’est un petit oiseau au vol saccadé qui arrive en bord de Loire. Nous sommes au mois de mars, notre petite hirondelle avec sa bande pectorale d'un brun cendré qui contraste avec sa gorge et son dessous blancs, a élu domicile chez nous. Voilà l’éclaireuse de la bande, elle est la première des hirondelles, celle qui annonce, avant toutes les autres, le retour du printemps.

Son chant, constitué de gazouillis rapides et sonnants m’enchante tandis que son cri d’alarme, plus bref me rappelle le sifflet des arbitres. Quel acrobate quand elle vole au ras de la rivière, à la recherche des insectes dont elle se régale. Mais avant de songer à sa nourriture, elle doit faire son trou.



Toute petite, elle n’en est pas moins sacrément gaillarde. Avec ses douze centimètres de longueur, elle va se mettre à l’ouvrage comme un vrai terrassier. Ses ancêtres devaient être les amis des tailleurs de Tuffeau et de Faluns de nos régions, elle creuse au milieu d’une berge abrupte le long de la rivière. Elle a choisi un terrain sableux, mêlé d’argile pour se préparer un palais somptueux.

Sans se prendre de bec avec son compagnon, la demoiselle a besoin d’une petite chambre douillette pour ses amours secrets et pour y donner la vie. Craignant par-dessus tout les importuns, elle a choisi une berge qui ne peut s’atteindre par la rive. La Loire a creusé là une petite falaise de quelques mètres de hauteur. L’hirondelle en quinze jours va percer un tunnel de 50 à 70 cm de long qui débouchera sur la chambre nuptiale.

Un travail de romain pour elle qui vient des lointains rivages du Pakistan. Venue ici sans passeport, elle se doute que la clandestinité exige pareille cachette. Les humains sont impitoyables pour les plus faibles, ils ont bien tort pourtant, elle qui leur rend tellement de services. Le moustique qui les pique, elle en fera son affaire !



Hélas, dans le Val de Loire, nombreux sont encore les tenants de l’industrie « phytomortifère » qui lui préfèrent les redoutables insecticides qui risquent de la mettre au pain sec. Si ces furieux n’y prennent garde, elle et ses congénères vont bientôt disparaître de ce si beau pays, pourtant. En attendant, elle cesse de se poser des questions et aménage son nid afin qu’il soit le plus douillet possible.

Elle tapisse avec amour sa chambre de paille, de plumes, de tiges souples que son cher mari et elle vont quérir alentour. Il faut bien admettre qu’elle n’est pas prête à se retrouver sur la paille, elle a tendance à manquer cruellement dans un Val qui préfère les cultures maraîchères. Elle devrait faire du foin pour alerter les agriculteurs sur la nécessité de diversifier leurs productions. La timidité lui cloue le bec, elle n’ose aller revendiquer !


Elle a bien tort car voilà que devant son gîte, des hommes équipés de casques s’agitent, le plus souvent à bord de gros engins. Le vent porte jusqu’à son refuge, le bruit d’un chantier qui l’intrigue. Que veulent-il bâtir en ce lieu si paisible ? L’hirondelle reste dubitative, que se trame-t-il donc au bout de son tunnel ? Quelle déveine, venir de si loin pour se retrouver précisément là où la tranquillité n’est plus assurée…

Pourtant, mon dieu qu’elle l’aime sa petite falaise. La Loire est ici sauvage, loin des habitations et de la folie des villes. Juste derrière, à deux coups d’ailes, elle dispose d’un merveilleux garde-manger, une réserve d’insectes au cœur de la darse de Sandillon. Quel bonheur ineffable que de survoler cet endroit qui semble figé avec ses arbres fossilisés et son mystère envoûtant. Ils sont déraisonnables de vouloir jeter un pont ici.



En attendant, elle a d’autres chats à fouetter. La loi du sang s’impose à elle. Une première couvée s’offre à elle. Elle a pondu 5 petits œufs tout blancs à la mi-mai. Elle était fière, elle fut la première de sa petite troupe de copines. L’hirondelle des rivages aime à vivre en colonies plus ou moins importantes. Ici, la crise du logement limite le nombre de galeries. Encore heureux que pour l’instant, le préfet ne leur réclame pas de permis de construire, il en est bien capable ce haut représentant de l’état qui a décidé de mettre sous sa coupe financière les bords de Loire.

Durant deux semaines, quatorze jours et pas un de plus, elle va couver d’une aile protectrice ses petits œufs qui mesurent 18 millimètres. Les enfants arrivent, ils vont attendre 19 jours avant que de prendre leur envol et découvrir à leur tour la magnificence du lieu. Notre hirondelle, débarrassée des soucis de la couvaison envisage avec son luron de remettre le couvert car moins de deux mois après leur premier vol, les petits, ingrats, seront totalement autonomes. Pas de gros soucis d’éducation dans la famille même s’il faut veiller à ses maudits moineaux, toujours prompts à venir croquer les gamins.

Il reste assez de temps pour envisager une seconde couvée. Le temps est propice et la région riche malgré les maudits épandages en insectes volants comme les tilupes (cousins), les syrphes, les libellules, les mouches, ou les fourmis volantes qui font ses délices. Après en avoir longuement discuté avec son mâle qui n’était pas franchement favorable, la nôtre hirondelle se remet à l’ouvrage. Les nouvelles naissances sont saluées par des feux d’artifice un peu partout dans le secteur. Quel spectacle, elle se dit que les humains pour une fois, lui montrent vraiment beaucoup de considération.



Il ne faut pourtant pas tarder. Avant la fin septembre, elle devra plier bagage et retrouver copains et copines pour un vol long-courrier vers ses quartiers d’hiver. Elle espère revenir dans son trou l’année prochaine pourvu que les ouvriers lui en laisse la possibilité. Ils ne se rendent pas compte, mais creuser un tunnel et aménager une chambre, c’est un travail titanesque et elle et son compagnon ne disposent pas d’engins comme ces cossards.

À l’année prochaine petite et charmante hirondelle des rivages si rien de fâcheux ne t’arrive durant ton long périple. En espérant, pour favoriser ton retour qu’ici, on préserve cet endroit où tu as installé ta résidence estivale. J’évoquerai ta légitime préoccupation aux responsables de cette agitation qui a quelque peu troublé ton séjour. J’espère de tout cœur qu’ils ne feront pas un trou dans la rivière. Il y a sûrement moyen de s’arranger, entre gens raisonnables…

Hirondellement sien.



vendredi 29 novembre 2019

Le Baptême d'un bateau




Fête de la saint Nicolas à Gien



Les grecs, excellents marins devant non pas l’éternel mais Neptune répandaient sur la proue de leurs bateaux le sang d’une victime sacrifiée afin de s’assurer la clémence des dieux en mer. Les anglais qui si souvent nous ont mis la pâtée à la bataille navale restent dans cette tradition avec ce dicton : « Un navire qui n’a pas goûté au vin goûtera au sang ».

Naturellement, à Gien, il n’est pas question de tordre le cou à un lapin, animal maléfique sur les navires pour sacrifier à la tradition. Pour nos joyeux lurons, le sang a été remplacé par du vin ou du champagne, pratique qui constitue à la fois une manière de conjurer le sort avant de prendre la Loire et s’assurer un bon voyage mais aussi s’il en était besoin une merveilleuse occasion de lever nos verres en bonne compagnie.

Habituellement, c’est à un prêtre que l’on fait appel pour mener à bien cette délicate opération. Les Fis d’Galarne, conscients tout à la fois de la crise des vocations dans la corporation et de leur fâcheuse propension à boire tout seul le vin, ont souhaité que je me charge de la cérémonie. Je peux les rassurer : avec un tel officient, point d’eau bénite, boisson prohibée dans la marine de Loire même si certains aiment à naviguer entre deux eaux avec du vent dans les voiles.

Cependant, faisant un crochet chez Nicolas, négociant en vin et spiritueux, je me permets de glisser en ce moment solennel, une petite prière de mon cru : 

 

Bon Nicolas, toi qui es notre saint patron
Accorde-nous le retour nous t'en conjurons
Même si nous ne sommes pas très respectables
Non, nous ne faisons pas commerce avec le diable

Au temps jadis où ils allaient sur la rivière
Les marins lui adressaient beaucoup de prières
Pour naviguer ils regardaient tous le grand ciel
Guettant le vent, un signe ou bien un pieux conseil
Et les femmes à la maison faisaient de même
Espérant ainsi retrouver ceux qu'elles aiment

Bon Nicolas, toi qui es leur très saint patron
Accorde le retour à nos joyeux lurons
Même s'ils ne paraissent pas très respectables
Ils ne font pas du tout commerce avec le diable


Tout en disant ce psaume peu orthodoxe, je m’aperçois avec effroi que je n’ai pas éclairé votre lanterne sur la nécessité absolue de pratiquer ce rituel. Pour votre gouverne, le Titanic entreprit son premier voyage sans sacrifier au baptême. Chacun sait ce qu’il advint de sa première expédition, un exemple qui jette un froid pour qui veut se lancer sur l’eau. Je sais cependant qu’avec nos amis Giennois, il n’est pas à redouter la présence d’un glaçon, surtout dans leurs verres. Le vin ici se boit chambré ou bien frais, sans adjonction d’un fragment de banquise.

Cependant, le vin ou le champagne n’est pas le seul élément incontournable du baptême. Pour que ce bateau soit bien né, il convient que ce fut sous le haut patronage d’une marraine aimante et bienveillante. Celle-ci sera tout à la fois l'effigie en tête de proue, la délicieuse briseuse de bouteille - ce qui la changera quelque peu - et surtout la gironde poupe du fûtreau.

Passons sous silence qu’elle soit née en bord de Seine, la faute n’est pas si grave que cela. Arrivée en 1989 à Briare, c’est par le truchement du regretté Jean Mauzac qu’elle fit la connaissance des Fis d’Galarne. Elle rejoint le groupe en 1994 et en devient rapidement l’égérie.

Sa fonction s’arrêtera là, nul besoin pour elle de donner le sein à son filleul quoiqu’elle a toujours adoré la chanson : »Petit garçon ». C’est donc en toute sérénité que Sophie peut s’avancer afin de libérer le cordon et lancer dans les fonds baptismaux ce merveilleux bateau. Nous n'évacuerons pas l’hypothèse que ces gredins lui réclament le biberon pour peu qu’il soit rempli d’eau de vie. La dame aime la Loire pour son côté sauvage et indomptable et les rencontres qu’elle provoque le long de ses rives.

Afin de couper le Macoui, l’hideux serpent de rivière, le monstre qui, tapi dans la Loire, peut parfois nous prendre le bras pour nous conduire par le fond, une dernière prière, toute aussi païenne s’impose avant que ne se brise le vin.



Comme le sort est conjuré
Nous allons pouvoir naviguer
Nous remontons sur notre pont
Ayant repoussé le démon
Au fil des canaux et rivières
Nous affrontons bien des galères
Avant de trouver réconfort
Lorsque nous accostons au port

St Nicolas
Protège-nous
St Nicolas
Apporte-nous,
La force de naviguer
À nous les bateliers


Dans les tavernes à matelots
Le vin chaud coulera à flot
Pour honorer Saint Nicolas
On mangera le cochon gras
Lui qui sauva d'un grand saloir
Trois petits gamins pour sa gloire
Nous célébrons à not'façon
Le miracle du saint patron



jeudi 28 novembre 2019

Hirondelle des rivages


Une hirondelle sans ambages




Une hirondelle, oiseau très volage
Ne voulant pas se trouver en cage
Pour continuer de vivre son destin
Se mit en demeure de fuir les humains


Adieu fermes, étables ou bien granges
Partout où la pauvrette les dérange
Interdisant ce fameux colmatage
Qui de la chaleur fait son otage

 

Pour sa survie, il fallait dans l’instant
Dénicher un refuge pour le printemps
C’est en survolant la rivière
Qu’elle trouva où pendre sa crémaillère

La berge offre ainsi un refuge
Voilà un excellent subterfuge !
De son bec, dans la falaise fit son trou
« Ici sera notre merveilleux chez nous »

 

La femelle invita son compagnon
« Viens me rejoindre dans notre maison »
Sans plus attendre et sans bagage
Elle devint hirondelle des rivages

 

De cette histoire il nous faut convenir
Que les humains ne prêtent pas à sourire
À se couper sans cesse de la faune
Ils préparent une planète atone

 

Si l’hirondelle ne fait pas le printemps
Elle lui accorde son charme pourtant
S’en priver ainsi pour toujours serait
Pire qu’une faute un affreux forfait

 

Sur la planète sans nulle hésitation
Les bipèdes sont cause de dévastations
« Cessez dans l’instant tous vos ravages ! »
L’hirondelle nous adresse ce message


mercredi 27 novembre 2019

Le darwinisme ligérien



Une leçon de choses




Il était une fois une petite espèce endémique à nos rives de Loire. Petit mammifère de la famille des Apodemus, il était appelé autrefois mulot des rives. Ce petit rongeur bien sympathique vivait alors tranquillement à proximité de ses grands cousins castors, qui en cette époque lointaine, pullulaient sur la rivière.

Contrairement aux castors, le mulot des rives vivait un peu à l'écart de l'eau. Il faut avouer qu'il n'aimait guère se retrouver les pattes dans l'eau et qu'il était incapable de nager. Les scientifiques ne se penchèrent jamais sur cette étrange particularité qui par la suite, expliquera la curieuse évolution constatée chez les rares survivants de l'espèce.

Le mulot des rives cherchait refuge dans les varennes, lande qui jouxte le lit moyen du fleuve, où il pouvait se réfugier en cas de montée des eaux. Il connut une vie paisible jusqu'au moment où les hommes, à partir des années 1600, se lancèrent dans l'aménagement des berges de la Loire car il était nécessaire de préserver les belles demeures installées dans le lit supérieur. C'est ainsi que furent dressées des barrières de terre d'abord, de pierre ensuite, qu'ici on nomma turcies puis levées.

Contraint de changer d'habitat, notre mulot des rives ne pouvait se rapprocher de la rivière à cause de sa phobie de l'eau, pas plus qu'il n'osait se risquer de l'autre côté des monticules, dans ce Val qui lui semblait hostile. C'est donc sur les nouvelles constructions qu'il établit domicile.

Obligé de s'adapter rapidement à son nouveau domaine, notre petit rongeur fut cependant mis en difficulté par ce territoire pentu où il devait affronter une déclivité de fort pourcentage. Certains jours de mauvais temps, avec la pluie, le gel ou la neige, le pauvre animal ne pouvait ni descendre ni remonter la pente sans risquer la culbute.

Les générations se succédèrent; la nature faisant toujours bien les choses, les familles qui survécurent à la nouvelle donne furent celles qui évoluèrent en perdant la symétrie de leur train de propulsion. Petit à petit, de portées en portées, un particularisme étonnant surgit de la formidable loterie génétique. Des animaux naissaient avec les pattes plus longues d'un côté que de l'autre, s'adaptant ainsi parfaitement à la vie sur les levées qui devenaient d'ailleurs de plus en plus hautes.

Ce petit miracle d'adaptation ne fut pourtant pas sans désagrément pour l'espèce et les individus eux-mêmes. Le mulot des rives qui naissait « gaucher » ( avec les pattes gauches plus longues que celles de droite) ne pouvait se déplacer qu'avec la Loire à gauche tandis que son homologue droitier devait aller dans l'autre sens. De là, la disparition progressive et presque totale de l'espèce représentée dans nos régions tout au plus par de rares spécimens .

Les pauvres bêtes, non seulement ne pouvaient revenir sur leurs pas, mais le plus grave étaient qu'elles éprouvaient de plus en plus de difficultés à se reproduire . En effet, un mâle gaucher et une femelle droitière étaient dans l'impossibilité technique de copuler sans se retrouver cul par dessus tête. Il leur eût fallu inventer des postures complexes mais malheureusement ces pauvres animaux ne pouvaient consulter le Kamasutra.

Ainsi donc, l'espèce se spécialisa entre gauchers et droitiers qui ne se croisaient qu'une fois dans leur existence. Se posa alors le terrible problème de leur migration à sens unique. Arrivés au terme de leur long chemin , les gauchers tout comme les droitiers ne pouvaient faire demi-tour …

Tant que la marine de Loire exista, les mulots des rives avaient trouvé une astuce. Il leur suffisait de se glisser comme passagers clandestins sur l'un des magnifiques bateaux qui allaient sur la rivière pour revenir à leur point de départ. Malheur pourtant à ceux qui débarquaient sur la mauvaise rive quand le chaland arrivait à Nantes ou bien à Roanne.

Certains individus découvrirent l'usage du pont pour retomber sur leurs bonnes pattes. Mais avez-vous songé à traverser un pont avec une jambe plus courte que l'autre? Rien n'est, la plupart du temps, plus plat qu'un pont. Bien des mulots des rives finirent leur vie devant ce problème insoluble. Heureusement, il y avait sur la rivière quelques ponts en pente, comme ceux de La Charité sur Loire, Gien et Blois qui sauvèrent assez de mulots des rives pour que l'espèce parvînt à survivre.

Le vingtième siècle fut, de toute évidence fatal à ces pauvres petits rongeurs. Plus de bateaux sur la rivière, des automobiles sur les ponts, même ceux qui sont en pente, le mulot des rives connut un tel déclin que l'espèce disparut. C'est du moins ce qui se dit sur les rives de Loire car personne, depuis bien longtemps n'en a vu un seul.

Le petit rongeur des rives trouva pourtant une manière de survivre de manière symbolique. Nos amis les solognots, toujours un peu jaloux des gens du fleuve, inventèrent une fable à dormir debout pour attraper les touristes et les Parisiens qui aimaient à venir chasser ou pêcher dans leur belle région.

C'est ainsi que le Dahut, animal mythologique, animal de farce et de pleine lune fit son apparition dans les histoires à ne pas croire. À bien des égards, ce sont les malheureux mulots des rives qui avaient inspiré les diseurs de menteries au ventre jaune. Nous ne pouvons leur en tenir rigueur car grâce à ce joli subterfuge, ils ont maintenu la mémoire de cet étrange petit animal qui avait su s'adapter à l'aménagement des rives de la Loire.

Charles Darwin n'aurait pas eu besoin d'aller si loin pour trouver sa théorie. Mais il faut avouer qu'on ne voit jamais d'un bon œil un Anglais déambuler sur nos rives. Souvenons-nous, qu'à la même époque, le pauvre Stevenson, l'homme du chemin éponyme, goûta de la prison à Chatillon-sur-Loire. C' est un fait avéré: au pays des mulots des rives, on n'aime guère ceux qui roulent de l'autre côté !
Quant à trouver une morale à cette histoire, on en serait fort embarrassé. Si ce n'est que pour se croiser, il est bien compliqué de le faire avec une ou un partenaire qui va dans l'autre sens. Je crois que la remarque vaut certainement plus pour les mulots des rives que pour les humains. Mais qui sait ?

Naturalistement vôtre.

Jean-Baptiste Pierre Antoine de Monet, chevalier de Lamarck fut celui qui étudia le mulot des rives et jeta les bases de la théorie de l'évolution. Dans son célèbre Mémoires d'histoire naturelle paru en 1797, il cite à plusieurs reprises cet étrange animal. Il n'a malheureusement pas pu en fournir un illustration acceptable. Nous pouvons le déplorer puisque le mulot des rives disparut bien peu d'années plus tard. 
 

mardi 26 novembre 2019

Georges, le pêcheur d'épaves.



Un pirate de plus sur la Loire !



Sur notre Loire, il n'est pas surprenant de croiser des personnages au caractère bien trempé. Il se peut même qu'ils aient une grande propension à déborder quelque peu, à sortir des chemins balisés. Ne soyez pas étonné que celui que j'ai croisé ne soit ni falot ni insipide. C'est même tout le contraire, l'homme peut, à bien des égards, désarçonner par ses excès et ses manières. C'est ce qui en fait son charme et sa douce folie …

Georges est un vrai gueux. Il en constitue même le paradigme des temps modernes tout en ressemblant fort à l'image que l'on se fait des trimards d'autrefois. Il en a la gouaille, le parcours chaotique et des plaies plein le cœur. Mais comme ses glorieux prédécesseurs, c'est un seigneur sur l'eau même s'il se donne avec jubilation une allure redoutable de pirate édenté.

J'écrivais justement ces quelques lignes sur mon calepin alors que je remontais la Loire à bord d'un fûtreau avec mon Capitaine. Nous allions vers le petit port de la Binette sur la commune de Bou quand nous vîmes Georges et son canoë rouge. Il nous attendait pour profiter de l'aubaine de notre moteur afin de nous emboîter le pas.

J'avais l'intention de brosser son portrait, de tenter de restituer le parcours incroyable et agité qu'il m'avait confié la veille. Il n'était plus temps de se concentrer sur mes notes, la quiétude à bord n'était plus qu'un lointain souvenir. Georges allait transformer cette remontée en une épopée, une farce à peine croyable, une aventure drolatique. Il est de ces êtres qui chassent les soucis de la vie en convoquant la farce et la bouffonnerie.

La routine pas plus que la mélancolie ne sont de rigueur quand ce drôle de paroissien se trouve dans les parages. Il a une gouaille sortie tout droit des dialogues d'Audiard et une gueule à tourner chez Jean-Pierre Mocky. La mélancolie n'est pas sa compagne et tout est prétexte à fantaisie. Il ne tarda pas à se mettre en action.

Il commença par transformer notre petit bateau en un espace de grande agitation. Il voulut d'abord mettre à couple son canoë, l'attacher en parallèle. Il bougeait en tous sens, allait de l'avant à l'arrière, cherchant sans doute à nous donner le roulis. Le résultat n'était pas satisfaisant, le corps inerte déviait notre trajectoire et occasionnait des turbulences. Qu'à cela ne tienne, Georges chargea son compagnon sur le nôtre ! Le confort en prit un sacré coup. Adieu les travaux d'écriture !

Je n'avais d'ailleurs plus l'opportunité de me concentrer. Nous disposions d'un discoureur incroyable qui nous racontait avec une langue colorée sa Loire. Elle est faite de pêche et de recherche d'épaves, d'objets abandonnés par le temps et les hommes. Il est toujours à l'affût, il scrute les rives et le fond.

Alors qu'il me faisait la liste des objets aussi hétéroclites qu'improbables qu'il avait ainsi sortis de la rivière, il hurla qu'il fallait nous arrêter. La manœuvre sur l'eau n'est pas immédiate, il fallut reculer pour satisfaire l'impérieuse exigence du bonhomme. Soudain, il avait retrouvé ce qui avait éveillé sa curiosité.

Georges sauta par dessus bord tout habillé. Le trésor devait en valoir la peine et à voir sa mine réjouie, il avait trouvé un objet fabuleux. Il avait fière allure notre pirate avec ses nu-pieds en plastique aux couleurs du camouflage de l'armée, son bermuda noir avec des franges découpées à la manières des motards, son bandana de corsaire sur un crâne dégarni, son unique dent illuminée par un sourire contagieux et ses yeux plein de malice !

Il remonta sur le bateau, mouillé mais porteur d'une bouteille de bière qui n'était pas décapsulée. Comment l'avait-il remarquée ? Que faisait-elle en plein milieu de la Loire ? Je ne pense pas qu'il faille se poser des questions avec un tel naufrageur. Plus loin, il nous rejoua la même scène. Cette fois, il y avait plus de fond. Il n'hésita pas à plonger totalement pour remonter cette fois, plein de rage car la bouteille était vide …

Puis, il alla chercher un objet métallique énigmatique. Il ne put le sortir de l'eau, sans doute un reste des anciennes dragues, un danger qui traîne au fond de l'eau, abandonné par des hommes qui ont cessé de gagner de l'argent avec la rivière … Puis Georges plongea une autre fois pour nous sortir d'un banc de sable.

Il n'eut alors de cesse de s'activer pour nous faire arriver à bon port : il tirait le bateau, il scrutait le bon passage, il indiquait les pierres, il retournait à l'eau pour un mauvais prétexte ! Il était dans son élément. La Loire n'a pas de secret pour lui, il y passe le plus clair de son temps. La pêche est un prétexte, la rivière sa passion.

Nous arrivâmes à la Binette avec une tête de proue pas banale. Georges était fier comme Artaban, trempé et heureux. Il passa la journée en compagnie des autres mariniers. Il avait trouvé une confrérie qui lui convenait parfaitement. Il s'y coula même si sa faconde dénotait parfois. Pas de souci, nous avions apporté notre bonne fortune de mer !

Picaresquement vôtre.

lundi 25 novembre 2019

À deux, est-ce mieux ?


Le couple en question



Vivre à deux ! Est-ce un partage ou bien une négociation permanente ?
Est-ce que l'union fait le divorce ?
Le contrat de mariage est-il plus écorné que l'amour ?
Le régime matrimonial est-il indigeste ?
L'alliance est-elle de même nature que le boulet ?


Aurait-il fallu garder la chambre nuptiale ?
L'enfant est-il une preuve ou bien une épreuve d'amour ?
Dans un couple les compromis sont-ils une promesse de câlins ?
Un couple qui se déchire finit-il nécessairement par se séparer ?
L'oreiller est-il le meilleur conciliateur ? 



La carpe peut-elle aimer le lapin ?
Peut-on recoller les morceaux d'un couple brisé ?
Pourquoi lui demander sa main alors que vous désirez autre chose ?
La consommation d'un mariage nécessite-t-elle d'avoir de l'appétit ?
Le mariage blanc suppose-t-il toujours la virginité ?



Le mariage pour tous a-t-il brisé la parité dans le couple ?
Dans un mariage d'argent, quel est le taux du livret de famille ?
Si le mariage vaut bien une messe, le risque n'est-il pas grand de craindre la contrepèterie ?
Peut-on rester bons amis après une séparation à l'amiable ?
Le mariage de raison est-il déconseillé à ceux qui sont fous d'amour ?



Les demandes de mariage et de divorce sont-elles de même nature ?
N'est-ce pas plutôt le mariage qui relève du consentement mutuel ?
N'avez-vous pas compris plus tôt que votre époux était aussi un conjoint ?
Le devoir conjugal justifie-t-il quelques corrections ?
Quand on se marie de la main gauche, que fait la droite ?



Faites l'amour pas la guerre ! Pourquoi alors est-ce souvent la même chose ?
Le mariage : Une cérémonie et combien de scènes ?
Quand on se met en ménage, pourquoi est-ce toujours la même qui s'en charge ?
Les tâches ménagères relèvent-elles du contrat de mariage ?
La traîne de la robe de mariée n'est-elle pas prémonitoire ?



La soupe à l'oignon sonne-t-elle le glas du rêve ?
L'accouplement est-il consubstantiel au couple ?
Une paire fait-elle toujours un couple ?
Le couple exerce-t-il des forces de directions opposées autour d'un axe que constitue la famille ?
Pourquoi la force d'attraction initiale se transforme-t-elle souvent en répulsion sur la fin ?



Si la femme est la moitié de son époux, pourquoi prend-elle en charge toutes les responsabilités ?
Une jeune épouse est-elle encore l'avenir de son vieux mari ?
Si l'amour donne des ailes, quand nous sont-elles coupées ?
Pourquoi faut-il des témoins lors d'un mariage si les époux n'ont rien à se reprocher ?
Comment taire l'adulte volage qui sommeille en chacun de nous ?



Dresse-t-on un constat d'adultère quand il n'y a pas eu contacts charnels ?
Le premier enfant transforme-t-il le couple en communauté ?
Une femme célibataire a-t-elle des époux plein la tête ?
Un mariage civil est-il mieux élevé que son homologue religieux ?
Est-ce parce que ce sont des tourtereaux qu'ils finissent par convoler en justes noces ?

Maritalement vôtre.

 Yann Pierre

Comment être entier quand on est sa moitié ?


à vous de jouer ...

dimanche 24 novembre 2019

Le carré de l'hypothénuse en question


Mathématiquement vôtre.


Y-a-t-il un mémorial pour les nombres inconnus ?
Pourquoi l'hypoténuse tourne-t-elle le dos à l'angle droit ?
À partir de combien de degrés une équation nuit-elle gravement à la santé ?
Comment s'équiper pour atteindre le sommet d'un triangle ?
La base est-elle solidaire du sommet de la pyramide ?



Dans quel rayon trouve-t-on des diamètres ?
Le rapporteur a-t-il toujours bonne conscience ?
La racine carrée peut-elle s'extraire avec une bêche ?
Peut-on simplifier des fractions sans laisser de traces ?
Quelle est la tenue adéquate pour effectuer un calcul intégral ?



La preuve est-elle une obligation juridique pour les opérations douteuses ?
Combien faut-il de carrés pour faire un cube ?
Comment se mettre un compas dans l'œil ?
Le centre de gravité peut-il sourire ?
Peut-on aller dans l'espace sans avoir de plan ?



La division est-elle compatible avec la solidarité ?
Faut-il des policiers à toutes les intersections ?
La perpendiculaire a-t-elle autant de travers que l'on veut bien nous le dire ?
Un médiateur peut-il intercéder pour une bissectrice ?
Deux parallèles peuvent-elles avoir une liaison ?


Pentagone, hexagone, octogone et consort sont-ils tous natifs de Lyon ?
Peut-on opérer sans aucune retenue ?
Sur quoi faut-il précisément poser une opération ?
La fonction crée-t-elle toujours l'organe ?
Pourquoi la sphère a-t-elle une drôle d'aire ?



Peut-on circonscrire une circonférence ?
Est-ce que les chiffres arrivent à faire nombre ?
Combien de clefs faut-il dans un tableau à double entrée ?
La géométrie fractale exige-t-elle une tenue correcte ?
L'horizontale peut-elle avoir du plomb dans l'aile ?



Un Barycentre peut-il aussi être ténor ?
Peut-on faire changer d'avis à un angle obtus ?
Existe-t-il des solutions sans problème ?
Est qu'un raisonnement mathématique peut faire écho en montagne ?
Est ce qu'on élève les fonctions affines comme les fromages ?


Un nombre imaginaire est-il sans limite ?
Les opérateurs travaillent-ils à l'étranger ?
Peut-on prendre la tangente avec des sinus bouchés ?
Une petite division est-elle préférable à un grand désaccord ?
Peut-on multiplier autre chose que des pains ?



Est-ce que celui qui a la bosse des maths à des calculs dans la tête ?
Y a-t-il un risque de coupure lorsqu'on manie une symétrie ?
Le théorème est-il une boisson chaude aromatisée ?
Un raisonnement par l'absurde a-t-il sa place dans une représentation graphique ?
Un algorithme endiablé permet-il de réussir des figures curvilignes ?



Faut-il avoir la foi pour réussir des conversions ?
A-t-on fini de tourner en rond à propos de la quadrature du cercle ?
Les Homothéties sont-elles victimes de discrimination ?
Les calculs outre-Rhin sont-ils les mêmes
Pourquoi une retenue sur le salaire le diminue-t-il ?

Absurdement vôtre.

Le mystère de Menetou.

  Le virage, pour l’éternité. Il est des régions où rien ne se passe comme ailleurs. Il semble que le pays soit voué aux...