En chamboulant le temps
En bousculant l'histoire
En martyrisant la chronologie
En travestissant la vérité
En défiant la logique
Et en grimant les personnages
Le bonimenteur vous invite à le suivre
Lorsqu'il vous déclare avec gravité :
« Il advint une bonne fois pour toute !
Qu'il vous faudra bien accroire »
Lire
sur la plage ce n'est pas tout à fait un acte ordinaire. Il faut se
poser bien des questions, s'imposer plus encore des gesticulations
pour trouver position adéquate. Il n'est pas facile de garder le fil
de son histoire tant les sollicitations sont diverses, les
perturbations nombreuses et les obstacles de toutes natures. Tout
demande réflexion y compris le format du livre que l'on risque de
trouver ensablé avant que de l'avoir vraiment parcouru.
La
position du lecteur sur le silice est un supplice à nul autre
pareil. Il doit se prémunir du vent qui est un adversaire redoutable
dès que le livre se donne des allures de grand. Le soleil quant à
lui, est un opposant d'une toute autre dimension. Il demande
équipement ou adaptation. Le lecteur en position dorsale qui
souhaite se parer de l'astre solaire avec son seul livre prend le
risque d'une crampe aux bras et d'un mal au cou qui pourrait lui
faire passer l'envie de la relecture.
Les
mieux équipés fourmillent d'idées pour tenir le choc ; parasol
cela va de soi mais aussi coussins pour surélever la tête, cette
partie du lecteur qu'il convient de préserver pour que la lecture
demeure utile. Chaises pliantes, basses, trous dans le sable,
monticules ou toute autre installation qui donne confort et repos au
dévoreur de lignes sont autant de réponses possibles qu'il vous
appartiendra d'étudier.
Il
faut choisir ensuite un livre pour l'usage que vous avez à en faire
en ce lieu. Il y a le roman de façade, celui qui vous donne
l'apparence de la sagesse à des fins pas toujours avouables.
Derrière un gros bouquin à la couverture cartonnée, il est aisé
de mater les voisines petitement vêtues et les lunettes ici
s'expliquent par votre occupation supposée.
Il
y a aussi des erreurs à ne pas commettre, des dissonances fatales
comme celle de vouloir à tout prix lire un roman fleuve au bord de
l'Océan. Le roman de gare vous laisse sans entrain quand la série
noire suppose que vous ayez un bronzage à la hauteur. Le roman
policé doit rester dans le sable les jours de grand vent et le roman
rose aime par dessus tout les premiers jours de vacances.
Le
livre n'est pas tout, il faut choisir son auteur. Il y a celui qui
évoque immédiatement quelque chose aux curieux qui ne manqueront
pas de savoir ce que vous lisez. Il faut adapter votre choix à la
sociologie de votre environnement estival. Dans tous les cas, le »
best-seller » est recommandé pour une conversation facile avec
un inconnu de passage. Des choix plus osés risquent de vous couper
de vos semblables, Céline, Kennedy Toole ou Salman Rusdie ne sont
pas en haut de la vague médiatique.
Il
faut aussi prendre la précaution de montrer que vous avancez dans
votre ouvrage, que votre marque page progresse de jour en jour. Faire
tout un été avec le même roman ne vous sert guère. Changer tous
les jours n'est pas plus efficace. Vous devez simuler une lecture
moyenne, avancer à petits pas et ne pas oublier de tourner
régulièrement une page.
J'oubliais
le conseil essentiel, celui qui vous évitera toute raillerie
superflue. Prenez votre compagnon de papier dans le bon sens. Le
conseil peut paraître trivial mais il arrive parfois que nos
lecteurs horizontaux se trompent tout occupés qu'ils sont à bien
autre chose que ce à quoi ils feignent de s'adonner.
Enfin,
le journal n'est nullement indiqué dans les régions océaniques.
L'exercice est rigoureusement impossible avec les grands formats.
Même lire l'Équipe relève de l'exploit. Rabattez-vous sur les
magazines et attendez si possible, le passage d'une caravane
publicitaire qui vous fournira en ouvrages inutiles. Prenez garde
néanmoins au nom de la revue, certaines vous classeront dans des
catégories particulières bien avant que vous compreniez pourquoi
l'on rit sous cape derrière vous.
Lire
sur la plage, finalement ne s'improvise pas et si vous vous munissez
d'un imprimé simplement pour avoir un peu de constance, il n'est pas
rare que la stratégie se retourne contre vous. Ne cherchez pas
l'extravagance ou bien l'incongruité, allez piocher du côté des
meilleures ventes, vous ressemblerez ainsi à ceux que vous voulez
imitez !
Quant
au lecteur authentique, jamais il ne lui viendrait à l'esprit de
mettre un grain de sable dans son précieux compagnon Il conservera
son livre sur sa table de chevet ou près d'un bon fauteuil sans
risquer de lui faire souffrir les outrages d'une météo à ne pas
mettre un livre dehors cette année.
Voilà
une posture qui demande bien des qualités et pose plus de problèmes
qu'elle n'en résout. On marche sur des œufs comme d'autres sur des
charbons ardents. C'est sans doute une question de génération ;
le charbon a été renvoyé dans les oubliettes de l'histoire :
il donnait mauvaise mine ! Les œufs ont supplanté le boulet, ils
sont sortis de leur coquille, les poules de nos jours pondent au-delà
du raisonnable …
Il
est certain que le vocabulaire évolue au gré des progrès
sociétaux. On peut envisager une étape nouvelle, le nid-de-poule
ayant, paraît-il, disparu de notre univers routier. Affirmation bien
sujette à caution : on ne circule plus de nos jours sans
casser des œufs et épuiser nos amortisseurs. L'état et ses
substituts locaux apparemment ne sont plus en capacité d'entretenir
le réseau routier, c'est pourquoi sans doute, dans un avenir proche,
nous reviendrons à la marche.
Il
nous faudra alors marcher sur des œufs en ayant bien soin de séparer
la ligne blanche à ne pas franchir, de la ligne jaune qui est passée
de mode. La signalétique routière n'a d'autre objet que de
transformer la chaussée en patinoire y compris avant que monte la
neige au créneau. Le sel qu'on y déverse alors favorisant le
travail du pâtissier qui, de Paris à Brest, cherche à obtenir une
consistance idoine et une adhésion ad hoc.
Marcher
sur des œufs c'est encore faire l'impasse sur la seule question qui
vaille dans l'histoire de l'humanité : « Qui de l'œuf ou de
la poule a commencé ? ». La réponse soulagerait les
défenseurs des animaux qui n'osent imaginer que nous puissions
piétiner des poules pour nous donner des ailes. Le foulage de l'œuf
devenant alors un pis-aller, une manière de ménager la crémière.
Il
est incroyable de penser qu'on peut se prendre de bec quand le simple
examen d'une expression ordinaire donne du grain à moudre aux
polémiques du moment. On marche sur des œufs, on ne respecte pas la
poule et on laisse tranquille le coq qui fait le beau sur le clocher.
Il faut admettre qu'en ce lieu, il est à l'abri de nos piétinements
intempestifs à moins que les batailles de clocher de l'heure, ne
mettent à bas ce perchoir si peu œcuménique !
Des
esprits rationnels trouveront mon propos sans queue ni tête. C'est
méconnaître la morphologie des gallinacés. C'est la crête rouge
de colère que je leur réponds qu'ils feraient mieux de ne pas venir
ici brouiller les œufs et ma nécessaire réflexion. S'ils veulent
mettre les œufs dans le plat, qu'ils aillent se faire fouetter
ailleurs ! Je leur fais d'ailleurs aimablement remarquer que je ne
les ai nullement invités à aller se faire cuire un œuf ; la
marche serait trop simple pour qui a le mollet souple.
Nous pourrions en venir aux mains. Je me vois leur pocher un œil ou
bien le leur mettre au beurre noir. Ils pourraient se retrouver avec
un œuf de pigeon sur la tête, toutes choses que je désapprouve.
Revenons donc à plus de tranquillité et évitons de nous conduire
comme une poule qui a trouvé un couteau. Ne tuons pas ce billet dans
l'œuf, il mérite d'éclore au grand jour. Laissons- le se faire
aussi gros que le bœuf que je n'ai nulle intention de voler ….
J'en
arrive au terme de cette démonstration laborieuse. J'ai pondu un
billet dont je n'ai pas à être fier. Inutile de mirer le résultat.
Il ne laisse pas passer la lumière ; la fable n'est pas fraîche
et l'ampleur de la tâche a étouffé mon ambition dans l'œuf. Je
retourne, l'air penaud, à mon point de départ. Je récupère tous
mes œufs, les range dans mon panier tout neuf et cesse de me
torturer un crâne parfaitement dégarni.
Laissons
en paix la poule aux œufs, elle dort en paix ! Fermons l'enclos, le
renard pourrait venir nous mettre tous d'accord. Quittons le
poulailler sur la pointe des pieds. C'est l'heure de revenir à de
plus sages intentions. Chercher du poil aux œufs ne nous a conduits
nulle part. Laissons la volaille couver, j'espère que vous n'avez
pas gobé cette farce !
Il
était une fois un bateau bien né, tellement d’ailleurs qu’il va
sur la rivière, le nez au vent, protubérance élevée au dessus des
flots, levée si haute que son capitaine va à l’aveugle, ne voyant
goutte devant sa route. Qu’importe, c’est un géant qui pilote
l’intrépide, les yeux fermés, en bon berrichon qu’il est, il a
les oreilles dressées au-dessus de la tête. En guise de fers à ses
sabots, il a choisi une coque métallique, craignant, en bonne
bourrique de rencontrer de ci de là quelques cailloux semés sur sa
route.
Parfois
le fier animal doit se jeter à l’eau, tout Raboliot qu’il est,
son joli bateau se retrouve pris au piège, collé sur un banc de
sable ou bien un haut fond. Le chasseur devient ainsi la proie et le
pêcheur se trouve dans l’instant pris dans les rets de la Dame
Liger. En bon braconnier qui se respecte notre colosse remue alors le
fond du lit, à coup de pelles, il contraint sa belle à lui laisser
à nouveau le passage.
Le
sillon tracé, il regarde émerveillé ce flot si pur, écarter ses
doutes tout autant que libérer sa soute. Il n’est pas question
pour lui de poser un lapin aux prochains pèlerins qui, à bord de
son gros fûtreau, veulent simplement aller sur l’eau.
L’embarcation libérée, il remonte à bord et sans jamais perdre
le nord, s’ouvre une bouteille pour célébrer cette merveille, un
bateau de Loire, je vous prie de me croire, qui avance gaillardement
sur ses pieds, des verres naturellement, vous ne pouvez en douter,
tous remplis d’un succulent Sancerre, le plus merveilleux sang de
la terre.
L’homme
buvait avec délectation ce nectar tout à son admiration de la vue
qui s’offrait à lui, la colline de son beau pays. Son village
était perché tout là-haut, il rêvait de le voir ceint comme jadis
d’une muraille pour lui donner plus magnifique apparence. La cité
cependant avait bien belle allure, même sans les remparts, qui lui
avaient octroyé ses heures de gloire.
Le
marinier sort de ses songes, il doit recevoir, pour animer sa sortie,
un homme capable de tous les mensonges. La prochaine course sera
contée, il peut s’en vanter, il a su attirer un public pour rire
du Bonimenteur aux facéties comiques. C’est ainsi que le voyage se
déroule hors du temps, avec ce curieux mage, les récits confondant
jadis et maintenant, faisant d’autrefois un curieux jeu de l’oie.
À
tous les deux, croix de fer, c’est par la case prison qu’ils
iront en enfer. Avec leurs passagers, croix de bois, le diable
gagnera pour une fois. Car nous sommes ici au pays des birettes, des
sorcières qui n’en font rien qu’à leur tête, organisent grand
Sabbat sous la lune, pour notre bonne fortune. Satan est en
territoire conquis, c’est lui qui gagne lorsqu’il joue à chat
perché, pourvu que celui-ci soit noir.
Pour
les rejoindre dans l’instant, l’un enfourche un balai tandis que
l’autre attire le diable dans l’aqueux. Pour ne pas conjurer le
mauvais sort, Saint Roch fait le mort tandis que sur la rive, des
jouteurs sont à la dérive. La raison part en déraison, le voyage
se fait naufrage. Un meneur de loup vient à leur rescousse, monte à
bord et joue le mousse.
Quand
ils accostent au ponton, il est temps de faire sauter d’autres
bouchons. On célèbre le retour de l’équipée sauvage, un voyage
qui s’achève par un magnifique empennage. Raboliot a plus d’un
tour dans son sac, sa musette en guise de havresac. Les passagers se
frottent les yeux, l’équipage s’est joué d’eux. Puis
découvrant la supercherie, ils apprécient la plaisanterie.
S’il
était une fois, ils ne s’arrêteront pas là. À chaque occasion,
ils se feront larrons, en foire ou bien à boire, sur la Loire, une
complice pleine de malice. Les esprits chagrins resteront sur le
chemin, les doux rêveurs seront des leurs. Puis, revenus au port,
ils iront se restaurer, dans le plus proche estaminet, une charmante
guinguette, qui leur fera la fête. Au Ligérien car tel est son nom,
on aime ce qui est bon qu’on sert sans façon ! S’il vous vient
l’envie d’en profiter, n’hésitez pas à les contacter.
Il
était une fois Gérard un musicien qui allait par les chemins.
L’homme vivait à la limite de deux grandes provinces, deux
traditions si bien qu’on le disait troubadour plus au sud et
trouvère plus au nord, c’était selon où ses pas le menaient.
Lui, qui vivait au cœur de sa chère Saintonge se sentait davantage
barde, allant dans toutes les assemblées avec son psaltérion.
Il
aimait tout particulièrement célébrer les huit grandes fêtes
traditionnelles celtes pour lesquelles il ne manquait jamais
d’honorer les cieux et les forces obscures. Tout d’abord les
quatre grands rendez-vous célestes avec les deux équinoxes : Ostara
et Mabon puis les deux solstices : Yule et Litha. Mais plus que tout
ce sont les quatre fêtes : Samain au 31 octobre, Imbolc au 2
février, Beltaine le 30 avril et Lugnasadh au 1er août qui
mobilisaient toute son énergie et son désir de faire le monde
danser.
Si
Samain est la fête des morts que tous connaissent désormais au
travers d’Halloween, Imbolc célèbre la fécondité, Beltaine les
lumières et Lugnasadh (celle de la fructification). Notre ami était
demandé dans les villages de la région de Cognac pour animer ces
belles soirées où chacun aimait à se retrouver pour raconter des
histoires, chanter, danser et partager un plat de circonstance. Il
aurait vécu ainsi heureux si sa réputation n’était pas arrivée
jusqu’à Mélusine, qui voulut le recevoir dans son château de
Lusignan.
Nous
étions fin avril à quelques jours de la nuit de Walpurgis,
celle où tous les chats se réunissent autour du château de la
terrible fée afin de retrouver toutes les sorcières de la région
et mener grand Sabbat. Gérard ignorait cette légende, il ne voyait
dans cette invite que l’opportunité de rencontrer une dame fort
belle d’après la rumeur et surtout côtoyer le gratin de la
noblesse locale. Il avait accepté la proposition avec enthousiasme
en dépit de quelques mises en garde amicales.
C’est
le cœur en joie que notre musicien poète se présenta devant le
château. Il faisait grand jour ce 30 avril, un soleil printanier ne
présageait en rien la suite de l’aventure. Gérard fut introduit
dans la grande salle de réception, des serviteurs zélés lui
annonçant qu’il n’était pas possible de voir la châtelaine,
dame Mélusine, avant la survenue de la nuit. Ils parlaient d’elle
d’ailleurs avec un ton mystérieux qui pourtant n'incita pas notre
homme à la méfiance.
C’est
entre chien et loup que la grande et belle demeure se remplit
progressivement d’hôtes étranges tout autant que silencieux. Ils
avaient des tenues d’apparat, de belles toilettes pour les dames,
des queues de pie pour les hommes. Ces personnages se taisaient. Pas
un bruit dans la grande salle, le musicien commençait à se poser
des questions. Où avait-il mis les pieds ?
C’était
une nuit sans Lune, le parc du château était plongé dans
l’obscurité quand d’un signal venu d’un domestique en livrée,
tous les invités, sans bruit se dirigèrent vers la terrasses. Ils
descendirent et se regroupèrent sur la pelouse à la lisière d'
arbres vénérables. Il y eut un cri strident, Mélusine apparut sur
le chemin de ronde et d’un bond magistral fondit sur ses hôtes.
À
cet instant, celui qui était sans doute le majordome ordonna à
Gérard de jouer. Le pauvre musicien demeura éberlué. Le spectacle
qui se déroulait sous ses yeux l’avait littéralement pétrifié.
Les convives se métamorphosèrent tous en chats, belettes, fouines,
renards et autres mammifères fort peu appréciés des humains. Les
animaux firent alors grande ronde autour d’une Mélusine, prise de
transe, qui ne cessait d’ordonner au musicien de divertir le
Sabbat.
Le
malheureux Gérard en était incapable. Pire, même il voulut prendre
la poudre d’escampette ce qui ne fut, vous devez vous en douter
fort mal perçu par la maîtresse du bal. Elle pointa vers lui un
doigt vengeur et tandis qu’il pensait avoir échappé à ce
rendez-vous de tous les diables, il se trouva transformé en
Ganipote.
Je
pense que je vous dois une explication. Vous connaissez tous le
loup-garou de sinistre mémoire. Créature malfaisante associée à
l’univers des ténèbres et de la sorcellerie. La Ganipote quant à
elle est une bête monstrueuse qui hante les bois sombres, parcourt
la campagne les nuits sans lune. Volontiers facétieuse, elle aime à
changer d’apparence pour tromper son monde. Parfois loup, mais
aussi chien, mouton, chèvre, chat ou lièvre cornu, elle s'amuse à
terroriser les passants en leur sautant violemment sur le dos, toutes
griffes dehors. Elle s'y agrippe et pèse de tout son poids jusqu'à
ce qu'ils périssent étouffés. Parfois, à l’inverse, elle se
donne un air parfaitement inoffensif, invitant alors les enfants à
la suivre afin de mieux les perdre.
Si
jamais il vous arrivait de croiser la terrible Ganipote, n’oubliez
jamais que c’est notre pauvre Gérard envoûté par la maléfique
Mélusine. Avant que de succomber sous ses coups mortels, ayez la
présence d’esprit de la rappeler à sa passion première. Chantez
lui une aimable complainte ou mieux encore, jouez d’un instrument
de musique.
La
Ganipote retrouvera alors dans l’instant la forme du gentil
troubadour avec lequel vous passerez alors une fort agréable soirée
pour peu que vous l’invitiez autour d’une bonne table. Il a plus
d’un tour dans sa musette et sera capable de vous enchanter en
jouant d’une bonne douzaine d’instruments différents. Mais gare
à ne pas le respecter, il pourrait reprendre du poil de la bête et
vous sauter à nouveau sur le dos.
Ce qu'il advint en cette période si troublée que les esprits
s'échauffaient pour un oui et surtout pour un non, mérite de vous
être rapporté. La bonne ville de Philippe Egalité ne savait plus
où donner de la tête même si les dragons, la veille, sur le pont
Royal avaient joué du plat de sabre sans aucune modération.
L'époque était à la révolte et à la querelle pour n'importe quel
prétexte. La Loire ne devait pas échapper à la folie d'une
révolution qui débutait.
Sur
un coche d'eau, assurant aussi un peu de fret, amarré quai de
Recouvrance, un gros négociant, Monsieur Grillon, venait examiner
l'ordonnancement de sa cargaison destinée à la capitale. L'homme
était réputé pour ses manières rudes et son manque d'aménité
vis-à vis-de ses matelots. Il était l'obligé de quelques nobliaux
du pays qui bravaient l'interdiction de faire des affaires pour les
gens de leur rang.Tout prête-nom qu'il était, l'homme n'en avait
pas moins une haute idée de lui-même !
Ce
jour-là, la tension dans l'air était perceptible. Les incidents de
la veille étaient encore présents ; on devinait que la moindre
étincelle pourrait déclencher une catastrophe. C'est pourtant dans
ce contexte délétère que notre personnage détestable voulut
vérifier le contenu d'un muid de vinaigre de la maison Rimbert,
spécialité, comme chacun sait, de cette ville commerçante.
Pourtant, le contexte n'était pas favorable au vinaigre, la pénurie
d'huile poussant les consommateurs à se passer de vinaigrette et de
salade.
Le
matelot à qui le négociant demandait d'ouvrir le tonneau, avait
bien assez à faire pour répondre à un caprice de bourgeois en mal
de tracasseries. Mais l'homme était dépositaire du pouvoir et le
marinier dut interrompre ses activités pour décalotter la barrique.
L'autre, satisfait de sa victoire, allait exiger autre chose, pour le
seul plaisir de mesurer la force de son pouvoir quand une mouche
tomba dans un piège réputé fatale à ses semblables.
Le
matelot d'un geste prompt, chassa la mouche, déjà saoule, d'un
revers de la main. L'importune du coche finit sa course dans la
rivière et fut, dans l'instant, gobée par un brochet qui passait
par là. Ce fut le déclenchement d'une réaction en chaîne qui
faillit faire d'Orléans le centre névralgique de la Révolution
Française. Le sieur Grillon, il faut le préciser, était accompagné
de son chien : un signe de puissance à l'époque.
Le
lévrier afghan dudit négociant plongea -on ne sait quelle mouche
l'avait piqué-dans l'espoir insensé d'attraper cet étrange animal
qui était sorti de l'eau d'un bond magnifique. Courroucé, tout
autant que surpris, le négociant avait souffleté le pauvre marinier
qui n'avait rien demandé à personne. Dans un mouvement de recul
pour amortir la brimade de ce triste personnage, le matelot renversa
le tonneau sur les souliers vernis de l'Important et hautain
personnage.
Le
pauvre chien, à la poursuite du brochet, se débattait dans un
courant bien trop fort pour lui tandis que le maître proclamait haut
et fort à qui voulait bien l'entendre, que l'affront serait puni de
manière exemplaire. Il y avait tant de tumulte sur le pont que les
curieux et les oisifs qui traînaient sur le quai, vinrent profiter
du spectacle. La foule se moquait naturellement du négociant dont
les bas de soie avaient pris une étrange couleur …
Un
pêcheur, sur la rive, en sortant promptement le chien du péril
dans lequel il s'était mis et en le reposant sur la berge, est sans
doute, lui aussi, à l'origine de la reprise des incidents. Le chien,
courut sur le pierré, sauta sur le bateau et voulut montrer à son
maître son affection et son bonheur d'être sauf. Hélas, dans son
enthousiasme canin, il renversa notre homme qui chut les quatre fers
en l'air dans une mare de vinaigre.
Le
sieur Grillon, ami des ci-devants et tortionnaire des braves gens,
avait fière allure en se relevant. Il provoqua l'hilarité générale
d'une foule de plus en plus nombreuse et on frisait même l'émeute.
Le négociant, humilié, était résolu à châtier tous ceux qui
s'étaient gaussés de lui. Il fit appeler la maréchaussée par le
truchement de l'un de ses valets tandis qu'un autre, sur ses ordres,
était partir quérir le prévôt : un certain Lambert.
Quelques
minutes plus tard, les soldats arrivèrent pour jeter de l'huile sur
le feu tandis que des gardes nationaux voulaient s'opposer à
l'usage d'une force disproportionnée eu égard à la faute commise.
Bientôt, il y eut, en bord de Loire, une inextricable mêlée d'où
coups de bâtons et insultes fusaient de toutes parts. Le prévôt se
retrouva dans la rivière pour paiement d'une rancune personnelle qui
trouvait ici l'occasion de se régler à bon compte.
La
querelle prit des allures de révolte. Le peuple, soutenu par la
garde nationale, s'opposait aux tenants de l'ancien régime et à
une maréchaussée qui connaissait ses derniers jours d'existence.
L'échevin d'Orléans, un dénommé Tristan, alerté par quelques
bonnes âmes, vint tenter l'aventure de rétablir l'harmonie en bord
de Loire.
L'homme
était respecté et parvint, non sans mal, à faire cesser
l'algarade. Mais on ne se moque pas impunément d'un notable et le
terrible Grillon exigea que le matelot fût renvoyé sur le champ. Il
aurait voulu le rosser et lui administrer une bastonnade publique
avant que de l'expédier aux galères ; heureusement l'esprit
révolutionnaire était passé par là et le pauvre homme échappa à
cette humiliante réprimande tout autant qu'à l'infamante peine.
Mieux
même, des voix s'élevèrent dans la foule pour qu'il retrouve
immédiatement un embarquement et c'est sous la recommandation de
Monsieur Tristan qu'il embarqua, le soir même, sous les ordres d'un
voiturier de Tours qui était redevable auprès du maire d'Orléans.
Le
lendemain, en découvrant les hématomes qui recouvraient bien des
parties de leurs corps, beaucoup d'habitants de notre bonne ville
eurent bien du mal à croire que tout cela était dû uniquement à
une pauvre mouche tombée dans le vinaigre. De tous les acteurs de
cette folle aventure, seul le brochet sortit, sans la moindre bosse,
de ce coup de tabac.
Il
survécut encore quelque temps à cet épisode peu glorieux de
l'histoire locale jusqu'à ce qu'il morde à l'appât d'un pêcheur.
Il termina dignement son existence, préparé au beurre blanc dans un
taverne : le Cabinet Vert installée au pied de la falaise,
réputée pour ses succulents plats de poissons de Loire. Un
convive, désireux de donner un peu plus de saveur encore à ce mets
délicat, versa sur le filet blanc une larme de vinaigre de vin.
Une
mouche qui volait dans la taverne se posa alors sur la chair et, par
une curieuse réaction en chaîne, bientôt l'estaminet fut le
théâtre désolant d'une des plus belles rixes qu'on connût de
mémoire d'aubergiste. Le client voulant chasser la mouche d'un large
mouvement de la main, vint flatter la croupe de Fanchon, la serveuse
...
Hélas,
celle-ci n'était pas uniquement servante mais également la femme du
marmiton en personne, un personnage assez chaud du bonnet et d'humeur
belliqueuse dès qu'il s'agit de l'honneur de sa compagne qui par
malheur avait aperçu la scène. Les bancs et les écuelles volèrent,
les poings achevèrent leur course sur le nez du voisin et quelques
dents jonchèrent le sol à la fin du repas.
Depuis,
en Orléans, quand on prétend qu'une affaire tourne au vinaigre, il
est préférable de déguerpir et de ne surtout point s'en mêler.
Gardez-vous de jouer la mouche du coche, il pourrait bien vous en
coûter, surtout si vous n'accordez aucun crédit à cette histoire …
Est-ce parce
qu’elle avait toujours un peu la tête dans les nuages que Paulette
Rhode a pu se pencher sur un trésor oublié de notre patrimoine ?
Nul ne saura jamais, la vieille dame dans le vent nous a quittés,
laissant son œuvre inachevée. Si elle a su mener à son terme son
recensement des croix des chemins dans notre département, son
travail sur les girouettes et les girouets n’en finit pas de
tourner dans le vide. Il nous appartient, nous ses amis du Liger Club
de l’orléanais de redonner vie à l'infatigable curieuse en
exposant son travail.
En juin 1993,
Paulette se désolait : « La blanchisseuse a disparu.
Endommagée par les intempéries, la girouette enseigne des dernières
lavandières, ne surveillera plus les allées et venues du jardin des
plantes de sa cité. Qui prend encore le temps de remarquer,
d’observer ces silhouettes de tôles ou de zinc placées au faîte
des toits pour indiquer l’orientation du vent ? Les unes simples ou
naïves, d’autres aux dessins très élaborés ; savamment
découpées, elles offrent en même temps une grande diversité de
sujets »
C’est ainsi
que notre curieuse se pencha sur cette forme d’expression
artistique, ce langage en images qui exprime le quotidien d’un
passé révolu. Elle partit donc l’appareil photographique en
bandoulière pour saisir ces vestiges qui rouillaient dans
l’indifférence générale avant qu’elles ne disparaissent à
tout jamais.
C’est le nez
en l’air qu’elle a sillonné tous les toits de la région,
cherchant cet étrange oiseau aussi rare qu’immobile. À pied, à
bicyclette ou en voiture, villages, villes, châteaux, fermes,
chaumières eurent droit à son passage. En bord de Loire, en Sologne
ou bien en Beauce, dans la plaine comme dans les bois, elle n’eut
de cesse que de traquer les dernières survivantes de cet art de
l’héraldique sans lettre de noblesse à la portée de tous.
Passons sous
silence les difficultés techniques pour saisir le bel ouvrage d’un
artisan qui fut créé en une époque où ni les antennes, ni les
fils de toutes natures ne venaient perturber l’admirable travail de
celui qui l’avait fixé là pour qu’il tourne au vent, zéphyr
fripon ne manquant jamais de se réveiller pour empêcher la prise de
vue. L’essentiel est ce témoignage indirect que la dame a voulu
nous léguer afin que nous n’oubliions jamais ce qui fut jadis un
privilège de noblesse
Si les
girouettes coiffant de rares maisons passent souvent inaperçues, il
n’est en pas de même de ce fier volatile qui trône sur nos
clochers. Naturellement la question du coq sur les églises mérite
d’être posées avec quelques hypothèses pour tenter d’apporter
la lumière :
Le coq est
intimement lié dans les évangiles à l’heure de la résurrection.
C’est à son chant que le messie revint du royaume des morts.
L’animal a
souligné le reniement de Saint-Pierre, il peut nous rappeler à
notre modeste condition humaine
Les
premières assemblées chrétiennes, dans la clandestinité d’une
religion alors persécutée se tenaient à l’heure du chant du
coq. Quoi de plus naturel que sa présence pour ces assemblées
revenues en plein jour.
Le coq est
un symbole de vigilance. En étant le premier à annoncer le jour,
il sonne le réveil pour mettre en fuite les monstres des ténèbres.
Il est l’espérance qui pourchasse les démons de nos terreurs.
Le coq fut
emblématique chez les celtes. Les moines voulant imposer la
nouvelle foi, se saisirent de lui comme de bien des divinités
gauloises pour imposer l’image de la croix et du christ.
L’animal à
plume enfin avec sa queue en panache, offrait non seulement une
silhouette simple à dessiner et surtout une bonne prise au vent.
Arguments simplistes pour satisfaire les agnostiques de tous poils
Pour rendre plus
stable notre coq perché sur son clocher, il fallut alourdir sa tête
par l’injonction de plomb. L’expression « Avoir du plomb
dans la tête » serait donc née à une hauteur qui décourage
les chasseurs. Quant aux voleurs, pour leur rendre la tâche plus
délicate, des reliques saintes, des pièces de monnaies ou des
parchemins auraient été cachés dans les coqs de nos églises.
Les premiers
coqs de l’histoire des girouettes furent en métal doré. Dès le
Xe
siècle, il se perche fièrement au somment de la cathédrale de
Winchester. Plus tard, sur la tapisserie de Bayeux, il se présente
en majesté, les ailes déployées. Certains coqs eurent droit à un
petit coup de pinceau, lui donnant des couleurs vives. Ceux qui
paraissent verts sont souvent en cuivre
tandis que les plus modestes sont en bronze.
Au XIIIe
siècle, des anges de bronze ou des statues de saints remplacèrent
le coq pour faire des girouettes d’un nouveau genre. Une sainte
vierge de plomb, devenue figurine tournante, put ainsi bénir toute
une ville au fur et à mesure de ses rotations éoliennes. Lors de la
révolution, les églises vécurent une période délicate. Certaines
se firent « Temples de la raison » et le coq perdit ainsi
sa place, remplacé par un bonnet phrygien transpercé d’une lance
qui assurait le rôle du pivot. L’église d’Escrennes a conservé
ce souvenir.
Les belles
demeures se parèrent quant à elles d’élégantes girouettes,
mises en évidence avec des épis de faîtage. Le tout formait
parfois de véritables bouquets de fleurs. Les châteaux de Loire se
hérissèrent de ces enluminures ferronnières, raffinements
indissociables de la grandeur des hôtes de ces lieux.
L’histoire
relève que la plus ancienne girouette connue se trouvait sur la
« Tour des vents « à Athènes. C’est un triton
d’airain. Au Moyen-âge, la girouette est un privilège de la
noblesse pour afficher les armoiries de la maison. Découpée en
bannière pour les chevaliers bannerets, elle se contente d’être
taillée en pennon pour les simples chevaliers. Ce n’est qu’au
XVIIe
siècle que le parlement de Grenoble autorise le vassal gentilhomme à
« porter » girouette comme le seigneur. Les gueux en
étant privés, ils se firent un malin plaisir à descendre et
souvent à détruire les girouettes de leurs nobles toitures lors de
la révolution. Le vent avait tourné, et il était mauvais.
Des girouettes
énormes portant des personnages grandeur nature furent un temps à
l’honneur à la fin du Moyen-Âge. Paulette Rhode, en voyage en
Andalousie eut le plaisir de pouvoir en observer quelques-unes dont
la célèbre « Giralda » de Séville.
C’est
essentiellement au XIXe
siècle que la mode des girouettes ornant les toits se généralisèrent
dans toutes les catégories sociales, une revanche surtout pour les
gens simples alors que la République s’installait enfin
durablement. Conservant leur fonction originelle, elles se firent
enseignes pour définir la profession de leur propriétaire à moins
qu’elles n’indiquent son loisir préféré ou un pan de son
histoire personnelle. Pour d’autres, ce sont des animaux familiers
qui grimpent sur le toit ; le cheval monta ainsi sur ses grands
chenaux, représenté au travail, à la chasse ou au combat.
Les belles
demeures bourgeoises se démarquèrent de ces représentations trop
communes. Elles purent ainsi se couvrir d’oriflammes découpées
des initiales du maître de maison à moins que ce ne fut des figures
allégoriques : tête de loup ou chimères tandis que le dragon les
garantissait sans doute des feux de cheminée. Dans les campagnes,
des girouettes sont encore installées. Elles représentent des
engins modernes : tracteur, moissonneuse, voiture et parfois des
bateaux comme à Vitry aux Brosses, pourtant assez loin du canal.
Paulette,
une femme dans le vent.
Éole
dans tous ses états
Quand
on a que le vent
Pour
aller de l'avant
L'espace
d'un instant
Ou
encore plus longtemps
Quand
on n’a que la voile
Pour
suivre une étoile
Un
rêve qu'on dévoile
Au
milieu de la toile
Éole,
dieu du vent montre l’importance de cette force motrice jadis avant
que les éoliennes d’aujourd’hui ne viennent rappeler son bon
souvenir aux humains en mal d’électricité. Le vent avant que de
faire tourner d’immenses pâles, permettait aux moulins de tourner,
aux bateaux de voguer. Quant aux éoliennes d’antan, elles
permettaient de faire monter l’eau des nappes phréatiques.
Rappelons à ce titre la magnifique création des frères Bolet, les
célèbres fondeurs de cloches abraysiens.
Les
girouettes se contentaient si on ose dire ainsi de montrer la
direction du vent pour la simple et bonne raison qu’elles
informaient du temps à venir. Le bulletin météorologique
n’existait pas tandis que les humains, proches de la nature,
avaient grand besoin d’établir des prévisions fiables sans le
sourire d’une jeune femme qui n’a sans doute jamais enfilé des
bottes en caoutchouc. C’était un temps où le ciel ne faisait pas
des caprices ; en examinant le ciel et en connaissant la
direction du vent, les anciens pouvaient prédire le temps de manière
fiable. Notre territoire était donc couvert de girouettes et
celles-ci se trouvaient placées sur un hangar de manière à être
visible de la ferme.
« La
girouette de ma maison, c’est surtout mon voisin qui en profite.
Moi, il faut que je sorte pour la voir ! »
Certains moulins disposaient d’un système astucieux : un témoin
fixé sur une tige, rendait compte à l’intérieur de l’habitacle,
des déplacements de la girouette sur le faîtage.
Le
vent était tout particulier l’allier des mariniers de Loire. Le
vent de soularne ; celui qui venait d’Est leur assurait une
avalaison tranquille quand ils se dirigeaient vers l’Océan. À
contrario, pour la remonte, les vents favorables étaient le Galarne
ou le Surois. Les vents venant de l’ouest permettaient enfin de
revenir au foyer tandis que les femmes des mariniers allaient prier
Notre Dame de Recouvrance pour que le vent leur ramène sans encombre
leurs époux. La girouette montrait si leurs prières avaient été
exhaussées.
Le
marin découpait lui-même sa girouette représentant son propre
bateau. Le musée de la Marine de Loire de Châteauneuf sur Loire
possède une magnifique série de ces petits chefs d’œuvre. La
plus remarquable sans doute est ce grand Girouet * sculpté dans le
bois représentant un chaland surmonté de l’aigle impérial. Hissé
en haut du mât les jours de fête, ce girouet était garni de
banderoles de couleur qui flottaient au vent.
* Les
mariniers avaient besoin de girouettes sur leurs embarcations. Pour
détourner l'interdiction de la girouette pour les manants, ils
avaient transformé le mot et le prononçaient « guirouet »
pour montrer leur indépendance d’esprit. Les girouets étaient
également destinés à conjurer le sort avec par exemple ce monstre
marin représenté sur l’une d’elles afin d’intimider les dieux
maléfiques responsables des naufrages.
Quand
les mariniers allaient jusqu’à Nantes, ils voyaient de superbes
goélettes en partance pour des destinations lointaines. Influencés
par ces bateaux, désireux eux aussi de faire de grands voyages,
nombreux sont ceux qui établirent sur leur demeure des girouettes
représentant des navires hauturiers. Une manière d’influencer
leur destin peut-être …
Une
passion dans le vent
Ma petite
girouette Rien qu'un brin de vent Te fait tourner la tête.
Ma petite girouette N'as-tu dans la tête Que du vent ?
Georges
Chelon
Placées
sur leur perchoir, elles ont été témoins de tant de scènes qu’il
est bon de venir interroger nos belles girouettes sur le comportement
de ces êtres si versatiles que sont les humains.
Une
femme, isolée dans son exploitation nous raconte : « J’ai
été si heureuse dans la ferme où travaillaient mes parents quand
j’étais petite que j’ai voulu la même girouette placée sur le
toit de mon enfance dans ma ferme afin qu’elle m’apporte autant
de bonheur ! » C’était une jolie gerbière tirée par deux
chevaux. Les deux fois où Paulette s’est rendue sur place, la
girouette était entourée de colombes …
Certaines
girouettes sont si naïves que l’on les croirait dessinées par des
enfants ! Les détails sont certes scrupuleusement respectés mais
avec un tel manque de proportion qu’on en vient à s’interroger.
Ainsi une très ancienne girouette vendéenne représente un paysan
chouan qui mène une charrue. L’homme est imposant, le bœuf tout
petit et que dire de la fillette apportant son repas ? L’imagination
des artisans traduit en ce domaine désir et poésie tout aussi que
leur rancœur vis-à-vis du pouvoir, de la situation, des contraintes
du métier.
Dans
ce registre, la girouette de ce fils dont les parents ont refusé
l’héritage suite à un remariage qui leur a fortement déplu. Le
bafoué a découpé dans la tôle les effigies de sa famille et
couvrant ces personnages, il a découpé le texte suivant : « Au
déshérité ». Ainsi tout le monde savait le mauvais tour
qu’on lui avait joué, il suffisait de lever la tête. L’expression
: « On l’a crié sur les toits ! » trouve dans pareil
cas sa plus parfaite illustration. Le vent se voit confier
ressentiment et colère par le truchement d’une expression qui
remplace bien des médications. Le Nivôse supplée à la névrose !
Un
maréchal ferrant équipa son toit d’une girouette quelque peu
suggestive représentant des fers et un cheval en pleine forme.
Nommée « Au cheval gaillard » cette enseigne à tous les
vents indiquait à qui voulait bien le comprendre que l’artisan non
seulement ferrait les chevaux mais que de surcroit il pouvait aussi
les castrer. La période contemporaine n’échappe pas à ces
pratiques. Ainsi un employé EDF de Saint Laurent des Eaux a coiffé
sa demeure d’une girouette représentant les tours de
refroidissement de la centrale. Un ferronnier bien connu dans
l’Orléanais a représenté sur son toit toute sa petite famille
par des silhouettes découpées à contre-jour. Un artiste peintre
quant à lui, se représente près de son chevalet, admirant la Loire
sous les différents angles que lui offre le sens du vent. Bel
hommage au grand fleuve.
Au
cours d’une promenade au bord du Lien (un affluent de la Charente)
notre chercheuse à découvert la girouette : « La Belle
carriole ». Elle représente une voiture avec cheval et chien
évoquant directement la toile du Douanier Rousseau. Dessiné et
découpé par son propriétaire, cet équipage a procuré maintes
promenades agréables si bien que la photo de la girouette figure
dans l’album de famille entourée d’un cœur. L’œuvre de
ferronnerie se trouve sur le toit d’une belle maison du XVIIe
siècle.
Le
petit vent qui nous pousse dans le dos Nous caresse tout
doucement Car c’est son affaire, au petit vent
De
temps en temps
De
temps en temps il nous souffle dans le nez Car il veut nous
plaire, le petit vent.
En France on
aime à boire, c’est bien connu ! Les girouettes, du haut des
toits, président souvent aux rites de la vigne. Elles représentent
alors des vendangeurs, des fouleurs de raisin, des transporteurs de
barriques. La mythologie paie sa tournée avec un Bacchus en joyeux
drille, honorant avec coupe et flacon la pampre de la vigne
enfant ant un délicieux nectar.
Des propriétaires
récoltants ont choisi de signaler leur négoce en enlaçant leurs
initiales autour d’une treille et de trompette de la renommée
telles les armoiries de la noblesse d’antan. La coupe est pleine et
la girouette fait tourner les têtes y compris en l’absence de vent
?
Les femmes sont
rarement représentées sur les girouettes. Si le dicton prétend
qu’il n’est que femme qui varie, le vent ne souffle guère en
faveur de sa représentation. Elle se trouve dans des tâches simples
: fileuses – bergères – blanchisseuses. Le dur labeur de la
lavandière, bien loin du folklore la montre brossant ou battant le
linge sur sa selle avant que d’aller rincer le linge au fil de la
Loire. La girouette tournait à qui mieux mieux pour essorer le
linge.
Quand la femme
apparaît à côté de son mari pour l’aider dans sa tâche, qu’il
soit maréchal-ferrant ou charron, elle porte gaillardement un
chapeau de feutre qui lui ne s’envole pas au vent et un long
tablier qui atteste de sa féminité.
Les girouettes
sont autant de livres d’images sur lesquels les vieux métiers,
aujourd’hui disparus, continuent de se raconter par l’intermédiaire
de représentations plus ou moins naïves ou richement ouvragées.
Ainsi les trépigneurs, aujourd’hui oubliés : un cheval en
trépignant sur ses antérieurs, faisait tourner des cylindres de
métal. Des courroies transmettaient le mouvement pour actionner des
blutoirs qui coupaient les betteraves. Le grand-père de Paulette,
fier d’avoir conservé cette machine, l’avait reproduite afin
qu’elle orne son toit même si la roue avait tourné, faisant
passer l’énergie animale au rang des souvenirs révolus.
Il y aurait tant
à dire encore sur les girouettes comme celle du capitaine des
pompiers représenté avec son état-major près de la fameuse pompe
à bras de sa commune ou bien celle du cheminot perché sur son petit
train. Le châtelain du coin n’est pas en reste lui dont les points
cardinaux deviennent les initiales de sa devise ou bien encore le
beau drapeau de la « Folie Baton » retraçant la vie es
ancêtres du nouveau propriétaire.
Les girouettes
peuvent encore servir à autre chose qu’à indiquer le sens d’un
vent que le père Jules n’avait pas forcément dans le nez. Quand
il rentrait, lui qui aimait bien boire le coup, ayant chaussé ses
souliers à bascule, il avait grand besoin de sa girouette. Elle lui
montrait le chemin, lui qui n’y voyait plus très clair. L’âne a
aussi joué ce rôle autrefois de guide des buveurs égarés.
Le
vent de l’amitié
Un p’tit vent Bon p’tit
vent Parle de la vie des gens Et fait son chemin de bouche à
oreille
Paulette
Rhode se plaint de la qualité de ses photographies. En dépit des
précautions prises, elles sont trop souvent floues ou trop petites
pour être agrandies. Si la girouette est intéressante, elle n’en
demeure pas moins sur un toit qui n’est parfois pas facile
d’approcher. C’est forte de ce constat qu’elle choisit une
autre technique de reproduction. Un agrandissement par le truchement
d’un dessin sur un bristol épais, découpé ensuite au cutter. La
première de ces maquettes lui donna satisfaction, elle persévéra
obtenant ainsi une jolie collection d’ombres chinoises qu’elle
aimait à exposer
« L’homme
au fléau », « les joyeux buveurs de Saint Août »
retrouvèrent une seconde jeunesse loin de leurs toitures d’origine.
Les buveurs sont en fait un garde champêtre caricatural trinquant
avec le bûcheron tandis que l’officier de carrière est équipé
d’un fourreau de baïonnette qui assure l’axe de rotation. Du
grand art !
La
silhouette racée des deux chevaux tirant une charrue menée par un
paysan en costume traditionnel a pu grâce à cette technique être
exposée et même embellie d’un coucher de soleil réalisé par
Daniel, l’artiste agrandisseur qui sait donner une dimension
poétique à ces anciens témoins de l’art premier pour la
satisfaction des visiteurs des différentes expositions.
Paulette
se réjouit alors que le vent de l’amitié a soufflé sur ses
girouettes. Connaissances et amis se sont mis en quête de ce que les
archives ne pouvaient préciser. Les ferronneries d’art ne figurent
que très exceptionnellement dans les documents écrits comme si la
culture ne se reconnaissait pas dans cette merveilleuse
représentation du quotidien.
Les
randonneurs levèrent le nez en cadence. Des chercheurs indiquèrent
eux aussi à Paulette l’emplacement de ces trésors dont elle était
en quête. Elle n’avait plus qu’à se rendre sur place pour
photographier la chose. Elle bénéficia aussi d’aides matérielles
: matériel d'agrandissement, bois, métal, carton pour permettre la
réalisation de maquettes tandis que d’autres fournirent des
documents sur le sujet.
La
dame se souvient alors d’un souvenir tout particulier qui lui a
laissé une forte impression. C’était au mois d’août, elle
avait obtenu de se retrouver seule sur les toits du château de
Chambord. Dans ce décor extraordinaire, muni d’un sésame
officiel, elle pouvait jouir du spectacle fabuleux de l’extravagante
toiture royale. Des girouettes portaient des grandes lettres de
bronze représentaient les initiales de nobles personnages. Elles
couronnaient les cinq clochetons. Le conservateur satisfit alors à
sa curiosité pour lui apprendre que le F évoquait François 1er
que le H représentait Henry V, le R honorait Robert de Parme tandis
que les C et B entrelacés rendaient hommage à Caroline du Berry
alors que le comte de Chambord était présent lui aussi avec le D de
Dieudonné, son prénom.
L’art
et la manière
La
girafe et la girouette
La
girafe et la girouette, Vent du sud et vent de l’est, Tendent
leur cou vers l’alouette, Vent du nord et vent de l’ouest.
Toutes
deux vivent près du ciel, Vent du sud et vent de l’est, À
la hauteur des hirondelles, Vent du nord et vent de l’ouest.
Et
l’hirondelle pirouette, Vent du sud et vent de l’est, En
été sur les girouettes, Vent du nord et vent de l’ouest.
L’hirondelle,
fait, des paraphes, Vent du sud et vent de l’est, Tout
l’hiver autour des girafes, Vent du nord et vent de l’ouest.
Robert
DESNOS
Recueil : "Chantefables"
Autrefois, la tôle de fer permettait de
réaliser ces ouvrages. La pièce était découpée le plus souvent
d’une seule pièce quand parfois d’autres étaient constituées
de plusieurs parties assemblées ensuite grâce à des rivets à une
époque où la soudure était inconnue.
L’arrivée du zinc, un matériau qui
résiste mieux aux intempéries sonna l’abandon du fer. C’est lui
qui eut la primauté même si des girouettes en bois tournent aussi
sur les toits. Certains petits moulins sont de véritables automates.
Les ailes en tournant, actionnent par un système de tiges et de
cames, des petits personnages qui lèvent un verre au rythme du vent
!
La rotation de la girouette intrigue ceux
qui ne sont pas des adeptes de la mécanique. Un des côtés de la
girouette, enroulé sur lui-même forme
un fourreau fermé à son extrémité
supérieure. Ce fourreau prend position sur un axe fixé au toit, une
bille d’agate venant s’interposer entre les deux pour faciliter
la rotation.
Il est recommandé de prévoir un balancier
formant contre-poids pour offrir un meilleur équilibre à la
girouette tout en limitant son usure à l’instar de leurs frères
humains qui eux aussi ont besoin pour tourner rond de compenser les
rigidités de l’existence par une petite dose de rêve et de
fantaisie.
Malgré ces précautions, on entend parfois
tourner les girouettes.
Elles chantent proclament les poètes.
Elles se plaignent, affirment les sensibles. Elles grincent
prétendent les grincheux.
La girouette
Cri
noir, désenchanté, Elle dit aux nuages les demains
rouillés. Loin d’elle, le sol qu’elle a quitté, Pour des
idées d’azur, de jours ensoleillés.
Elle ne chante
plus…a-t-elle jamais chanté? Elle grince les pleurs de rêves
oubliés. Elle voit les horizons, les campagnes habitées, Les
fumées du village, d’hiver ensommeillé.
Mais parfois, le
vent vient la visiter, Après sa dure journée, dans le ciel
brouillé, Au vieux coq, sur une patte montée, Discrètement,
il pose une bise mouillée.
Daniel
Courtois
Plusieurs coqs
ont été confiés à Paulette Rhode dont certains en bronze, très
racés. D’autres ressemblant bien plus à une grosse poule paysanne
se contentaient de zinc. L’un de ces coqs offerts a intrigué la
curieuse. Il portait sur le dos et sous le ventre un œilleton de
verre muni d’une petite glace par laquelle devait se réfléchir un
rayon de soleil. Ce devait être destiné à éclairer un objet
mystère un certain jour de l’année par un certain vent. Une
girouette digne de Hergé …
Un seul coq de
clocher a trouvé grâce aux yeux de la collectionneuse. Elle l’a
choisi parce que ses pattes semblaient nous faire comprendre qu’il
courait et c’est justement sur le clocher de Cour-sur-Loire qu’il
trônait majestueusement. Un artisan malicieux avait sans doute
souhaité jouer avec la toponymie du lieu sans que les autochtones ne
le remarquent.
La mise en place
sur le clocher d’un coq girouette était accompagnée par une
coutume qu’il convient de raconter ici. Avant de monter sur son
très haut perchoir, les couvreurs prenaient l’animal dans les bras
afin de lui faire parcourir toutes les rues de son futur domaine.
Naturellement ce tour de village s’accompagnait d’un petit
versement en liquide dans une sébile tendue par les aventureux
artisans. Le coq était enrubanné tandis que les filles à marier se
devaient de couper un morceau du ruban afin de conjurer le sort et
trouver dans l’année un jeune coq à mettre dans son lit.
De leur côté,
certains joyeux drilles sans doute pour faire les coqs, des soirs
trop arrosés, se lançaient dans l’aventure de décrocher la
girouette sur le clocher de l’église. Ils devaient reproduire
cette prouesse le lendemain pour le remettre en place non sans
l’avoir affublé de quelques oripeaux drolatiques.
Hier
et aujourd’hui
Ô
fins d'automne, hivers, printemps trempés de boue, Endormeuses
saisons ! je vous aime et vous loue D'envelopper ainsi mon coeur
et mon cerveau D'un linceul vaporeux et d'un vague tombeau.
Dans
cette grande plaine où l'autan froid se joue, Où par les
longues nuits la girouette s'enroue, Mon âme mieux qu'au temps
du tiède renouveau Ouvrira largement ses ailes de corbeau.
Charles
Baudelaire
Les recherches
de Paulette Rhode l’ont souvent entraînée sur les chemins du
passé. Elle se demanda alors s’il y avait place de nos jours pour
ce beau témoin du vent qui souffle et si des artisans d’aujourd’hui
reprenaient le flambeau et peut-être le poste à souder.
Le hasard lui
fit un signe par l’intermédiaire d’un reportage dans le journal
local. Elle apprit l’existence d’un groupe de « Compagnons
Couvreurs » à Cepoy. Pour les joindre, il lui fallut contacter
« Gatinais, la gaîté » un formidable sobriquet pour
aiguillonner la curiosité d’une dame insatiable en ce domaine.
Après des
démarches auprès de la mairie, elle eut le plaisir de visiter leurs
ateliers puis de se rendre à Paris au siège des compagnons, afin
d’admirer l’exposition de leurs chefs-d’œuvre. Elle était
comblée car dans ces maquettes de toiture, certaines étaient
coiffées d’une girouette ouvragée.
Paulette se mit
à imaginer un langage des girouettes. Elle pensa qu’elles devaient
communiquer entre elles par l’intermédiaire du vent qui avait
tourné la tête à notre vieille amie. Elle eut des mirages ; elle
vit sur un toit un gentil petit couvreur conter fleurette à une
charmante bergère qui lui souffla un baiser. Elle crut apercevoir le
gentilhomme châtelain régler ses comptes avec l’incorrigible
braconnier …
La réalité
vint apporter elle aussi sa dose d’humour. Toujours le nez en
l’air, Paulette se rendit compte que le Tribunal Administratif
d’Orléans était couvert de parapluies qui devaient lui servir de
talismans pour se parer des pépins que constituent les erreurs
judiciaires.
Pour sa
recherche Paulette a parcouru Val de Loire, Sologne, Berry, Gâtinais
à la recherche de ses chères girouettes. Elle a ressenti un
pincement au cœur dans une Beauce presque déserte où seuls les
engins agricoles se meuvent dans la grande plaine. Elle y a pourtant
été accueillie avec une grande gentillesse tant sa démarche
provoquait sympathie et curiosité.
Au terme de ce
collectage magnifique auquel le Liger Club de l’Orléanais
redonnera vie depuis que Paulette a pris la poudre d’escampette
pour se rendre sur l’autre rive, voir si le vent souffle aussi de
ce côté-là, tout comme elle nous ne comprenons pas pourquoi on
traite de girouette les personnes qui se laissent aller à changer
d’avis.
Paulette
écrivait à ce propos : « Soyons modestes, nous sommes tous un
peu girouette …
Reste à savoir
si c’est à bon escient … et si notre individualisme ne nous
empêche pas de percevoir le petit souffle envoyé par le cœur des
autres ! »
Girouettes de
fêtes, de prestige, de souvenir, de tendresse ou de rancœur, ombres
chinoises sur fond d’azur, « autant en caresse le vent ». Le
vent qui avec le temps fait se déliter les girouettes, se décolorer
les souvenirs.
Paulette s’est
donné la belle tâche de conserver la mémoire de ces majestueuses
silhouettes. Elle a redonné vie aux girouettes, à leur histoire, à
leur univers authentique. Puissions-nous ne plus nous moquer de ceux
qui marchent le nez en l’air !
Girouette,
tu peux crier sur les ardoises, Grincer comme une dent sur
d’acides framboises ! Hiver, tu peux lancer aux vitres tes
grêlons Qui bourdonnent comme une averse de frelons, Qu’importe !
Hiver, brandis tes trompettes de cuivre Et déchaîne tes chiens
sur la route de givre Et les chevaux des ouragans ! Je m’en
bats l’œil ! Je m’en bats l’œil ! Je lis des
vers dans mon fauteuil ! Beauté des jours ! Beauté des
livres et des lèvres ! À mon coupé, j’attellerai cent
douze lièvres. Sous l’azur plus vibrant qu’une aile de
perdrix, Et j’irai vers les bois que mon rêve a fleuris !
Tristan
Derème
Paulette aimait
par dessus tout frapper à la porte d’une maison portant girouette,
s’enquérir de son histoire, discuter avec les habitants. Souvent,
elle remarquait qu’après son passage, la girouette avait été
réparée ou entretenue, preuve que sa curiosité avait de belles
conséquences. Sa fille Claire se rappelle combien sa mère était
heureuse de redonner vie à ce patrimoine si discret qu’il faut
lever la tête pour l’apercevoir. Ses conférences étaient
toujours l’occasion de belles rencontres et d’un formidable
souffle de vent pour les girouettes si chères à son cœur.
Puisse la
reprise de son œuvre vous donner à tous l’envie de couvrir votre
demeure de ce magnifique témoignage du passé.