dimanche 23 juillet 2023

Femmes de Loire : les laveuses

 

Les laveuses






Il est des femmes pleines de manières

Qui sont coquettes, riches et adulées,

Tant mieux si elles peuvent vivre sans rien faire,

Car comme dit l’autre, il n’y a pas de sots métiers,

Toutes n’ont pas la même veine,

Car pendant qu’elles se baladent,

Nous, laveuses, chaque jour d’la semaine,

On va rincer la « bujade »


Levées de bon matin,

La brouette en mains,

Nous prenons le même chemin.

C’est à Cournauron,

Que nous descendons,

Laver les ch’mises, les cal’çons,

Notre métier est ingrat,

Nous souffrons quand il fait froid,

Mais si le temps est chaud,

Faut pas oublier l’lolo !

Une bonne bouteille,

Quand il fait soleil,

J’vous assure qu’çà vous réveille !


Perlante, Cournauron et les Rivalles,

De Néris sont les plus grands lavoirs,

C’est d’vant chaque pierre que l’matin s’installent

Nous les chevalières du battoir !

Toutes ont la langue bien pendue,

Et les potins, les cancans,

Pour nous ne sont pas perdus,

Car on en parle constamment.


Un grand coup d’battoir,

Qu’est ce qui a le crachoir ?

Tiens, mais c’est madame Micard.

Une bonne friction !

La Sourde, attention !

Ecoute la conversation.


Si Perlante a Valentine,

Aux Rivalles y a Caroline,

Et tous les jours nous voyons

La Fanny à Cournauron !

A genoux dans l’cabas,

On ne s’ennuie pas,

Au milieu d’toutes ces femmes là !


J’allais omettre, mon Dieu quelle affaire

L’lavoir des Chaudes, dont on change le cadre,

Car tels jadis nos braves mousquetaires,

Les trois lavoirs de Néris sont quatre.

Le croiriez vous, ça renserse,

Mais des hôtels, des villas,

Dans ce dernier se déversent,

Les reliefs de tous les r’pas.


Me direz-vous vraiment,

Que c’est appétissant,

D’voir flotter d’la chose là-dedans,

Et d’penser aussi,

Que les égouts de Néris,

Se donnent rendez-vous ici.

Les bourgeois feraient bien mieux,

De garder leur… miel chez eux.

Et par mesure hygiénique,

D’installer des fosses sceptiques.

Sans faire d’embarras,

Nous, on ne tient pas,

A laver dans l’bouillon gras.


Pour être laveuse faut du matériel,

L’cabas, la benne, la brosse à chiendent,

La bassine, le bleu et l’eau de Javel,

L’savon, le battoir, c’est évident,

L’hiver c’est le brasero,

Et le sac de charbon de bois.

Malgré tout l’métier s’rait beau,

Si on pouvait l’faire chez soi !


Ecoutez M’sieur le Maire,

C’est une prière,

Que vous font les lavandières,

Faites une bonne action,

En r’montant du fond,

Le lavoir de Cournauron.

Ne pourriez-vous par hasard,

Le placer au camp d’César,

Ou bien alors pour y aller,

Faire une ligne de tramway.

Sans être exigeant,

Quelque chose d’épatant,

Ce serait le tapis roulant.




En orléanais, les membres des compagnies d'Ô et du Battement d'Elle se sont lancées dans le collectage des souvenirs de nos lavoirs, quand ceux-ci résonnaient des papotages des dames au battoir et à la langue bien pendue.

Elles ont recueilli de jolis fragments de vie, de belles histoires personnelles, simples et émouvantes. Elles proposent un spectacle magnifique qui nous entraîne au cœur d'une France qui n'est plus et qu'il convient de voir si c'est encore possible.

Elles sont quatre à battre le linge tout en nous prenant par la main et le cœur. Elles cancanent, elles papotent, elles se livrent, elles se confient, elles s'encolérent, elles se gaussent.

Elles sont tout à la fois, tous les visages de ces femmes simples qui étaient les petites mains de nos rivières. Elles nous livrent ainsi une quinzaine de portraits, des instants de vie, des fragments émouvants et d'une grande justesse.


 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Une chanson, bref moment d'éternité

  Une chanson Une chanson, bref moment d'éternité S'insinue toujours sans en avoir l'air Laissant un souveni...