jeudi 31 mars 2022

Faire des ronds dans l’eau

 

Le grand naufrage.

 

 


 


Viens sur mon bateau faire des ronds dans l’eau

Notre rivière se fera navigable

Pour vous quelques magnifiques photos

L'équipage est parfaitement présentable


C’est un matin comme on les aime bien

Le soleil s’invite à notre sortie

Le p’tit vent de galerne ne gâche rien

Pour naviguer sur la Loire entre amis

Oh qu’il est joli mon petit bateau

Quand il se prend pour un fier coursier

Il défie le courant comme un oiseau

J'aime à passer pour un marinier


Viens sur mon bateau faire des ronds dans l’eau

Notre rivière se fera navigable

Pour vous quelques magnifiques photos

L'équipage est ma foi fort aimable


Affublé d'mon magnifique chapeau

Je me figure grand capitaine

Voguant sous les remparts de ce château

Je rêve de destinations lointaines

Nous avons débouché quelques bouteilles

Le vin d’ici nous donne à croire

Que sur l’eau nous ferons des merveilles

Comme les flibustiers de l’histoire


Viens sur mon bateau faire des ronds dans l’eau

Notre rivière se fera navigable

Pour vous quelques magnifiques photos

L'aventure est des plus agréable

 



C’est alors que l’effroi survient des nues

Le ciel se charge de lourds nuages

L’orage claque, nous ne l’avions pas prévu

Nous n'échapperons pas au naufrage

Soudain c'est la panique à notre bord

Certains se mettent à prier les cieux

Les plus couards se voyant déjà morts

Quand tous les autres ne valent guère mieux


Viens sur mon bateau faire des ronds dans l’eau

Notre rivière se fera navigable

Pour vous quelques magnifiques photos

Avec un appareil imperméable


Dans un grand vacarme effroyable

Le rafiot se retourne d’un seul coup

Mes passagers, posture déplorable

Pleurent avec de la flotte jusqu’aux genoux

Mon galurin perdu dans la bataille

Pour sûr, je ne suis pas mieux lotis qu’eux

Ne riez pas, ce n’est plus un détail

Seigneur sur les flots, dans l'eau pauvre gueux


Viens sur mon bateau faire des ronds dans l’eau

Notre rivière se fera navigable

Pour vous quelques magnifiques photos

Et des souvenirs inoubliables


Pour votre serviteur quelle décadence

Me voilà perché sur une bérouette

Il me faut me rendre à l’évidence

Je ne suis qu’un marinier d’opérette

Au port, par miracle, personne n’a rien vu

Je m'en retourne parader sur mon quai

Ne croyez pas que pour moi c'est fichu

Mon prochain fûtreau est subventionné


Viens sur mon bateau faire des ronds dans l’eau

Notre rivière se fera navigable

Pour vous quelques magnifiques photos

Au frais d'ce pauvre contribuable

 


 


mercredi 30 mars 2022

La Cistude

 

La solitude d'une cistude

 




Ultime représentante de son espèce

Pleure la disparition de ses congénères

Autrefois petite compagne des druidesses

Elle vivait ici dès l'âge de pierre

 



La Loire ne lui réserve plus bon accueil

Bien des pièges se dressent sur ses berges

La rivière est devenue un linceul

Celle qui ne sera plus jamais son auberge

 



La dernière petite tortue se morfond

Depuis que son beau domaine est dévasté

Des engins monstrueux y construisent un pont

Défigurant à jamais sa belle vallée

 



Pour que traversent tous ces maudits camions

La cistude a subi bien des outrages

Comme l'odieuse destruction de sa maison

Dans la multitude des autres ravages

 



Sa carapace ne fit hélas pas le poids

Face à une pelleteuse ou un bulldozer

Elle finira écrabouillée comme il se doit

Au nom de leur dévotion routière

 



Les transporteurs doivent absolument passer

En dépit de l'absurdité d'une époque

Qui sacrifie notre biodiversité

Au nom de quelques maudits semi-remorques

 



Dans les étangs de Brenne, elle pourrait s'exiler

Exfiltrée d'une guerre qui se déroule ici

Mais comment peut-elle faire pour ainsi s'en aller

La route est si longue pour gagner le Berry ?

 

Comme les hérissons, ces malheureux martyres

C'est sous d'autres roues que finirait sa route

Les humains se font pires que des vampires

Pour toutes ces marchandises de la soute

 



La cistude se résigne à son triste sort

Latingy sera sa dernière demeure

Les impératifs économiques se font fort

Que la faune tout comme la flore s'y meurent

 




http://www.centre-val-de-loire.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/PRAcistude_version08112011_cle165b52.pdf

 


 




mardi 29 mars 2022

La corde à dénouer le temps

 

La pêche miraculeuse.







Il était une fois une famille de pêcheurs de Loire qui avait été frappée, comme tant d’autres en cette époque lointaine par le terrible destin qui guettait les gens de la rivière Un jour de vent violent, le père était parti sur l'eau pour n’en revenir jamais. Des mariniers avaient retrouvé son bateau, ses filets mais du bonhomme, jamais on ne revit trace.

Dans la petite maison, face à la rivière, la vie était devenue plus morose. La femme du disparu avait repris le collier comme elle le pouvait, quand elle n’avait pas trop à faire dans sa maison. Le père de son mari, courbé par le poids des ans, la suppléait quand le temps était propice, il avait trop de rhumatismes pour affronter les flots par mauvais temps.


Quand le ciel était lourd de menaces, que le vent n’était pas annonciateur à de bonnes pêches, c’est Berlaudiot, le gamin pas tout à fait comme les autres, qui héritait de ce qui devenait alors une corvée avec peu de chance de réussite. Cet enfant était né après le drame, il avait sans doute perdu une partie de la raison quand sa mère avait appris le malheur qui la frappait. Les coups du sort ne sont jamais uniques dans pareille circonstance !


Berlaudiot était pourtant d’humeur toujours égale. Il avait appris la Loire, le monde des poissons, il eut été un excellent pêcheur si on l'avait laissé faire dans de bonnes conditions. Hélas, parce qu’il ne se rebellait jamais, qu’il souriait toujours, il héritait des corvées les plus ingrates et n’allait sur l’eau que par mauvais temps. Lui, gentil, ne s’en formalisait pas !

 



Ce jour-là, il faisait grand beau. Le Grand-père était parti avec un panier rempli de victuailles. Il passerait la journée au carrelet pour une pêche qui s’annonçait fructueuse. Sa belle-fille lui avait été généreuse, préparant une merveilleuse tarte aux pommes qu’il accompagnerait d’une belle rasade d’arquebuse. Tout pour oublier ses douleurs…


Alors qu’il allait reprendre une portion de tarte, un vagabond passa sur la berge. L’homme était épuisé, famélique, avait une voix caverneuse qui n’augurait rien de bon. Il bouta son grand chapeau de paille qui le faisait ressembler à un épouvantail. Poliment, le trimard réclama de quoi manger un peu. Le vieux lui répondit qu’il avait tout juste assez pour lui, le vagabond se remit en chemin, le ventre vide.


Curieusement, dans l’après-midi, le vieux releva à chaque fois un carrelet désespérément vide. La légère brise venue de l'est et la rivière qui n’avait pas connu de variation de hauteur ne justifiait en rien cette mauvaise pêche. Qu’importe, le vieux étant particulièrement repu, il s’accorda une grosse sieste pour oublier sa déveine.


Le lendemain, le vent avait cette fois apporté une pluie fine et pénétrante. C’est la mère qui partit sur le bateau, elle aussi avec de quoi bien se sustenter à la midi. Les conditions en dehors de ce petit aquadiau, étaient propices à une belle friture. Elle avait d’ailleurs connu une matinée pleinement satisfaisante quand elle se restaura. La scène de la veille se reproduisit en tout point similaire à la précédente.

 


Le vagabond arriva à sa hauteur, se découvrit et fit grande révérence avant que de réclamer pitance pour apaiser une faim de loup. La femme, indifférente à son allure, non seulement lui refusa tout net le moindre morceau de pain tout en le pria de déguerpir sinon elle appellerait au secours. Le pauvre hère s’en alla sans demander son reste.

L’après-midi fut calamiteuse. La femme non seulement ne prit rien de mieux mais qui plus est, elle renversa le baquet qui contenait ses prises du matin. Elle perdit presque tout le fruit de sa journée sur l’eau et rentra de fort mauvaise humeur. La Loire annonçait des signes de montée des eaux, demain elle enverrait Berlaudiot sur les flots.

Naturellement ce fut une journée tempêtueuse. Le vent s’était fait grand clapot, l’eau montait et la pêche risquait d’être fort mauvaise. La journée idoine pour ce pauvre idiot se dirent son grand-père et sa mère. Quant à lui, toujours heureux de son sort, il n’était pas mécontent d’échapper aux corvées domestiques. Il partit donc en sifflotant avec un pauvre quignon de pain dans sa musette.

 

Le matin ne fut pas fructueux. Le gentil imbécile était bredouille. Ce n’est pas une raison pour ne pas chanter à tue-tête ce qui l'empêcha de voir arriver un vieux mendiant à l’allure peu engageante. L’homme l’interpela d’un coup de sifflet strident pour se faire remarquer. En dépit de cette manière peu cavalière, Berlaudiot lui demanda ce qu’il pouvait faire pour lui être agréable.

 



Une fois encore, le chemineux réclama de quoi manger. L’enfant partagea son pauvre quignon de pain et le lui lança sur la rive. L’homme le remercia, le dévora avec avidité puis, reprenant son chemin il lui dit : « Que ta pêche te récompense de ta générosité ! » Il s’en alla sans même se retourner.


Le pêcheur se gratta la tête, signe chez lui, d’une profonde réflexion. Puis, renonçant à comprendre, il se remit à l’ouvrage. En dépit de la promesse du bonhomme, les conditions étaient bien trop mauvaises pour prendre quoi que ce soit. La nuit allait tomber quand il se résolut à revenir chez lui, la casier vide, certain de se faire tancer.


Il remonta la chaîne pour décrocher l’ancre. C’était particulièrement lourd. Il parvint à grand peine à la libérer pour sortir totalement les deux pelles de leur mouillage. C’est alors qu’il remarqua accrochée à l’une de ses deux oreilles, une chaîne brillante, prise par un maillon. Il dégagea cette étrange épave ; une vieille corde de chanvre avec un gros nœud en son milieu.


Ce n’était à la vérité rien qui vaille. N’importe qui aurait jeté cette curieuse trouvaille, pas notre ami Berlaudiot. Quand il rentra à la maison, naturellement il essuya une volée de bois vert. Non seulement il n’avait rien pris, ce qui n’étonnait ni son grand-père ni sa mère mais qui plus est, il rapportait un trophée sans valeur qui dans son esprit dérangé était un trésor.

 



Ils le laissèrent à ses illusions. Le grand-père, malicieusement lui dit : « Mon gamin, tu n’as qu’à dénouer ta corde, ça te passera le temps, ce qui t’évitera de faire des âneries ! » Le gamin n’attendait que cette demande pour s’isoler et tenter de défaire ce que l’eau et le temps avaient si solidement noué.


À force de patience et de persévérance, il arriva à son but. Le nœud sitôt défait, il vit apparaître devant lui le mendiant à qui il avait donné un morceau de son pain. L’homme lui sourit, retrouva en quelques instants apparence plus humaine avant que de prendre la parole : « Je suis ton père mon enfant, j’ai subi un terrible maléfice qui me condamna à errer en bord de Loire jusqu’à ce que se défasse ce nœud, sortilège d’une mauvaise fée de la rivière ! »


L’enfant eut un tel choc qu’il perdit connaissance. Quand il se réveilla il avait retrouvé ses esprits, ceux qui lui faisaient défaut depuis le jour de sa naissance. Il se trouva alors entre son père et sa mère tandis que son grand-père en larmes, priait le ciel pour le remercier de ce miracle. Le ciel du reste n’y était pour rien ! C'est bien à Berlaudiot, et à lui seul qu'on devait se miracle. Il avait su se montrer généreux.


La corde à dénouer le temps existe peut-être, enfouie encore au fond d’une rivière ou bien dans des cœurs arides. C’est à vous de la dénouer pour retrouver un peu de joie et de bonne humeur. C’est ainsi que le simplet qui ne l’était plus, vécut heureux, conservant toujours cette joie de vivre qui avait été toujours la sienne, entouré de parents qui se réjouirent de le marier avec une gentille fille de son pays. Il vécut heureux et devint cordier, quittant sans déplaisir le métier de son père, revenu à la maison. Il fit les plus belles épissures et jamais au grand jamais, il ne fit de nœuds.


Matelotagement sien. 


 


lundi 28 mars 2022

Les chiens d'Orléans

 

Cabots






Se promenant en laisse, il s'interrogeait

Sur l'étrange analogie qui court ici

Son maître et ses comparses orléanais

Se targuaient volontiers d'être de ses amis




Sans qu'il lui fut besoin de muselière

Il mordait dans l'existence à pleine dents

Dans la cité, au bord de sa rivière

Être chien passait pour un grand compliment

 



Soulevant la patte le long d'une porte

D'un caractère aimable, sacré nom d'un chien

Il s'étonnait qu'on l'affubla de la sorte

De tous ces travers n'appartenant qu'aux humains

 



Qu'il pleuve ou qu'il vente, c'est un temps de chien

Vitupèrent des passants sous un parapluie

Quand à cestui-là, toujours un peu chafouin

C'est un caractère de chien pour la compagnie

 



S'il se contente d'un panier et d'une niche

Recroquevillé pour supporter les frimas

Il découvre que ceux qui se montrent chiche

Dorment en chien de fusil sur un matelas




Ce n'est sans doute pas qu'une simple histoire

On prétend même ce qui n'est guère sage

Qu'on le jetterait volontiers dans la Loire

S'il survenait une épidémie de rage

 




S'il se sent contrarié et fait grise mine

La queue basse et les oreilles tombantes

Tout ces curieux qui ramènent leur trombine

Glosent sur ce chien battu qui les tourmentent




Tous ces gens qui, sans cesse, évoquent les chiens

À propos de quilles ou encore de faïence

Changent d'attitude quand ce n'est pas très malin

On affirme qu'ici les chiens font alliance

 



Si autrefois la guêpe était leur emblème

Les chiens font assurément plus bel oripeau

Les ânes de Meung ne voient pas de problème

Eux qui furent fort mal reçus par ces cabots

 


 


dimanche 27 mars 2022

Le gentil barde cognaçais

 

La Ganipote.







Il était une fois Gérard un musicien qui allait par les chemins. L’homme vivait à la limite de deux grandes provinces, deux traditions si bien qu’on le disait troubadour plus au sud et trouvère plus au nord, c’était selon où ses pas le menaient. Lui, qui vivait au cœur de sa chère Saintonge se sentait davantage barde, allant dans toutes les assemblées avec son psaltérion.


Il aimait tout particulièrement célébrer les huit grandes fêtes traditionnelles celtes pour lesquelles il ne manquait jamais d’honorer les cieux et les forces obscures. Tout d’abord les quatre grands rendez-vous célestes avec les deux équinoxes : Ostara et Mabon puis les deux solstices : Yule et Litha. Mais plus que tout ce sont les quatre fêtes : Samain au 31 octobre, Imbolc au 2 février, Beltaine le 30 avril et Lugnasadh au 1er août qui mobilisaient toute son énergie et son désir de faire le monde danser.


Si Samain est la fête des morts que tous connaissent désormais au travers d’Halloween, Imbolc célèbre la fécondité, Beltaine les lumières et Lugnasadh (celle de la fructification). Notre ami était demandé dans les villages de la région de Cognac pour animer ces belles soirées où chacun aimait à se retrouver pour raconter des histoires, chanter, danser et partager un plat de circonstance. Il aurait vécu ainsi heureux si sa réputation n’était pas arrivée jusqu’à Mélusine, qui voulut le recevoir dans son château de Lusignan.


Nous étions fin avril à quelques jours de la nuit de Walpurgis, celle où tous les chats se réunissent autour du château de la terrible fée afin de retrouver toutes les sorcières de la région et mener grand Sabbat. Gérard ignorait cette légende, il ne voyait dans cette invite que l’opportunité de rencontrer une dame fort belle d’après la rumeur et surtout côtoyer le gratin de la noblesse locale. Il avait accepté la proposition avec enthousiasme en dépit de quelques mises en garde amicales.


C’est le cœur en joie que notre musicien poète se présenta devant le château. Il faisait grand jour ce 30 avril, un soleil printanier ne présageait en rien la suite de l’aventure. Gérard fut introduit dans la grande salle de réception, des serviteurs zélés lui annonçant qu’il n’était pas possible de voir la châtelaine, dame Mélusine, avant la survenue de la nuit. Ils parlaient d’elle d’ailleurs avec un ton mystérieux qui pourtant n'incita pas notre homme à la méfiance.


C’est entre chien et loup que la grande et belle demeure se remplit progressivement d’hôtes étranges tout autant que silencieux. Ils avaient des tenues d’apparat, de belles toilettes pour les dames, des queues de pie pour les hommes. Ces personnages se taisaient. Pas un bruit dans la grande salle, le musicien commençait à se poser des questions. Où avait-il mis les pieds ?


C’était une nuit sans Lune, le parc du château était plongé dans l’obscurité quand d’un signal venu d’un domestique en livrée, tous les invités, sans bruit se dirigèrent vers la terrasses. Ils descendirent et se regroupèrent sur la pelouse à la lisière d' arbres vénérables. Il y eut un cri strident, Mélusine apparut sur le chemin de ronde et d’un bond magistral fondit sur ses hôtes.


À cet instant, celui qui était sans doute le majordome ordonna à Gérard de jouer. Le pauvre musicien demeura éberlué. Le spectacle qui se déroulait sous ses yeux l’avait littéralement pétrifié. Les convives se métamorphosèrent tous en chats, belettes, fouines, renards et autres mammifères fort peu appréciés des humains. Les animaux firent alors grande ronde autour d’une Mélusine, prise de transe, qui ne cessait d’ordonner au musicien de divertir le Sabbat.


Le malheureux Gérard en était incapable. Pire, même il voulut prendre la poudre d’escampette ce qui ne fut, vous devez vous en douter fort mal perçu par la maîtresse du bal. Elle pointa vers lui un doigt vengeur et tandis qu’il pensait avoir échappé à ce rendez-vous de tous les diables, il se trouva transformé en Ganipote.


Je pense que je vous dois une explication. Vous connaissez tous le loup-garou de sinistre mémoire. Créature malfaisante associée à l’univers des ténèbres et de la sorcellerie. La Ganipote quant à elle est une bête monstrueuse qui hante les bois sombres, parcourt la campagne les nuits sans lune. Volontiers facétieuse, elle aime à changer d’apparence pour tromper son monde. Parfois loup, mais aussi chien, mouton, chèvre, chat ou lièvre cornu, elle s'amuse à terroriser les passants en leur sautant violemment sur le dos, toutes griffes dehors. Elle s'y agrippe et pèse de tout son poids jusqu'à ce qu'ils périssent étouffés. Parfois, à l’inverse, elle se donne un air parfaitement inoffensif, invitant alors les enfants à la suivre afin de mieux les perdre.


Si jamais il vous arrivait de croiser la terrible Ganipote, n’oubliez jamais que c’est notre pauvre Gérard envoûté par la maléfique Mélusine. Avant que de succomber sous ses coups mortels, ayez la présence d’esprit de la rappeler à sa passion première. Chantez lui une aimable complainte ou mieux encore, jouez d’un instrument de musique.


La Ganipote retrouvera alors dans l’instant la forme du gentil troubadour avec lequel vous passerez alors une fort agréable soirée pour peu que vous l’invitiez autour d’une bonne table. Il a plus d’un tour dans sa musette et sera capable de vous enchanter en jouant d’une bonne douzaine d’instruments différents. Mais gare à ne pas le respecter, il pourrait reprendre du poil de la bête et vous sauter à nouveau sur le dos.


Musicalement sien.


 

samedi 26 mars 2022

Homo-Sapiens

 

Sapiens






Qu'on le prétendît sage ne doit pas surprendre

Ce sont ses descendants qui le nommèrent ainsi

Étiquette flatteuse qui à tout prendre

Rejaillissait immanquablement sur ceux-ci


Les autres passagers de la planète Terre

N'ont à ce propos jamais été consultés

Il est vrai qu'ils avaient choisi de se taire

Pour ne pas subir de nouvelles contrariétés


Sa prétendue sagesse le pousse certainement

À détruire sauvagement tout ce qui l'entoure

Faisant table rase de son environnement

Provoquant le désastre partout alentour


Héritier d'un Dieu qu'il fit à son image

Sa parole devint sanctifiée et sacrée

Se permettant alors sans aucune ambages

De s'accorder le droit de tous les massacrer


Il affirma aussi, comble de l'hypocrisie

Que ses crimes étaient offrandes au créateur

Exigeant qu'il fit sacrifice de nos vies

Afin de gagner un paradis prometteur


Il réservera l'Enfer à cette planète

Pour toutes les autres espèces qui la partagent

Quand il leur accorda de pauvres miettes

Simplement pour assurer son nourrissage


Le temps est venu de clamer sa déraison

De libérer la Terre de cette engeance

Homo-sapiens ne sera qu'une illusion

La Nature aura légitime vengeance

 


 

vendredi 25 mars 2022

La grenouille en a marre, ce n'est plus sa fête

 

La défaite de la grenouille






La grenouille en a marre, ce n'est plus sa fête

La pluie se fait rare sur notre planète


On lui parle souvent de ce maudit beau temps

Qui depuis trop longtemps lui vide son étang

Sans précipitation ô quelle désillusion

Son éradication se met en action


Parlez-lui des orages, de leurs noirs nuages

D'un monde plus sage, sans tous ces sauvages

Un climat plus serein, loin des maudits humains

La vie reprend en main, son éternel destin

 



La rainette se désole, passe à la casserole

Les gourmets raffolent de ses p'tites guibolles

Sans même remarquer qu'elle finit par manquer

Lui fallut déserter ce pays surchauffé


Du côté du crapaud, c'est le même tableau

Depuis qu'il fait trop chaud, ne coupe plus son eau

S'il veut prendre son bain, ce n'est pas très malin

Plonge dans le dédain, des détritus urbains


Quant au gentil triton, ne trouve plus le ton

Se colore en marron sans avoir de maison

Les fossés sont vidés et le sol craquelé

La nature outragée d'être tant exploitée


Et la salamandre qui joue les Cassandre

Pour mieux se défendre nous fait des esclandres

Dénonce tous nos torts qui propagent la mort

Tel le sémaphore du château de Chambord

 



Pour les amphibiens et tous les batraciens

L'antédiluvien sera sans lendemain

C'est la fin du monde partout à la ronde

La pluie était féconde, devient moribonde


La faribolerie de notre agonie

Même si la prophétie se grime en facétie

Il devient urgent en ces ultimes instants

De prendre l'mors aux dents sans plus d'argent comptant


La grenouille en a marre, elle sera défaite

La pluie est une tare sur notre planète

 


 

jeudi 24 mars 2022

Dragon

 

 

Dragon





Très longtemps ici j'ai coulé des jours heureux

Vivant en paix au bord de vos rivières

Pour me distraire je faisais un petit feu

Méchoui ou barbecue sans manière

 



En dépit d'une mauvaise réputation

Je parvins à faire mon trou dans quelques grottes

De là, je surveillais toute la région

Une passion tout autant qu'une marotte 

 



Lorsque surgissaient de vilains envahisseurs

Défendant ce qui était mon territoire

Je pointais vers eux un museau dévastateur

Les condamnant tous à mon crématoire 

 



J'étais alors le maître absolu des lieux

Les gueux se courbaient devant mon oriflamme

Me considérant à l'égal de leurs dieux

Me couvraient d'offrandes pour sauver leurs âmes 

 



Des évangélisateurs venus du levant

Moines cénobites ou bien pauvres ermites

Portant la parole par le fer et le sang

M'imposèrent leurs tristes figures chattemites 

 



Attaquant celui qui pour eux faisait abcès

De par la seule magie de leur croyance

Me terrassèrent sans autre forme de procès

Malheureux dragon condamné à l'absence

 



Quand bien même je brille encore de mille feux

C'est pour amuser les touristes et les enfants

Une procession, un vitrail deviennent pour eux

La preuve que j'étais l'envoyé de Satan 

 



Des rives de notre Loire en maints endroits

Jusqu'à la Dordogne, l'Èbre ou la Vistule

Le Dragon y régna à l'instar des rois

Avant de partir en fumée : ridicule...

 



Les récits font la gloire des héros sauroctones

Et le dragon est celui qu'il faut descendre

N'oublions jamais qu'il restera l'autochtone

Lorsque nous nous inclinons devant ses cendres




 

Le mystère de Menetou.

  Le virage, pour l’éternité. Il est des régions où rien ne se passe comme ailleurs. Il semble que le pays soit voué aux...