Débarquement
immédiat.
C’est
juste après la révolution qui laissa plaies et bosses dans notre
bonne cité et mit à mal durant quelques années le commerce fluvial
qu’un profond changement se fit sur la rivière. À l’initiative
de quelques jeunes gens, soucieux de montrer de quel bois ils se
chauffaient tout en voulant se démarquer de leurs aînés, des
innovations importantes eurent lieu dans bien des domaines. La ville
d’Orléans fut du reste d’un dynamisme échevelé au début du
XIXème avant que de sombrer paradoxalement dans une léthargie
coupable au tournant de la grande guerre.
L’industrie
était alors florissante. Pompes hydrauliques, industrie automobile,
aviation, filatures avaient pris le relais des raffineries sucrières
abattues par le blocus anglais. On ne soulignera jamais assez le rôle
de la perfide Albion qui a souvent mis le feu aux poudres et pas que
là. Mais sachons oublier les vieilles rancunes puisque les gens de
la Tamise seront les invités d’honneur du prochain Festival de
Loire.
C’est
justement vers la Loire qu’il faut se pencher pour découvrir un
petit atelier de construction métallique qui, poussé par
l’inventivité de son responsable, se lança dans la construction
de petites embarcations de déchargement communément appelées
allèges puisque destinées à transporter le fret du chaland à la
berge.
L’artisan
ferronnier avait remarqué que l’opération était fort délicate,
que ladite allège avait à subir de nombreux chocs, d’une part
contre le gros bateau qui parfois ne prenait pas le temps de
s’amarrer sur les quais mais aussi du fait des matériaux, parfois
pesants qui étaient transbordés. Il se dit qu’une coque
métallique serait de nature à absorber les risques de percement, le
bois étant plus fragile que le fer.
Si
le dire ou même le penser est bien, le faire est encore mieux et
sans plus tarder notre inventif concitoyen se lança dans la
fabrication de quelques allèges métalliques destinées au port de
Recouvrance. L’affaire fit grand bruit, la tradition venait de
prendre du plomb dans l’aile tandis que la navigation ligérienne
changeait d’ère. Il y avait là, hélas les prémices d’un
chemin de fer qui mettrait à pied toute la marine de Loire, mais
ceci est une autre histoire.
Il
y eut donc quelques allèges qui se firent grandement remarquer dans
cet univers plus soucieux de tradition que d’innovation. Le marin
aime à manier le lexique naval, c’est un plus érudit que les
autres qui nomma ces fameux petits bateaux de déchargement des
chats, autre terme désignant les allèges. Le succès fut immédiat,
le terme fit flores et bien vite dans toute la cité, on se gaussait
des fameux chats ferrés de notre chaudronnier.
La
rue qui abritait l’atelier de ce brave artisan fut baptisé sous ce
vocable sans doute moqueur de la part d’une population si attachée
à ses racines qu’elle tenait à montrer à ce fantaisiste de quel
bois elle aimait à se chauffer. Seule ici, Jeanne peut s’habiller
de fer pour traverser la Loire, il n’était pas convenable de
bouleverser l’ordre établi depuis des lustres.
On
a tout oublié de cet épisode. Les fameuses allèges en métal sont
tombées dans l’oubli et qui sait peut-être au fond de la rivière.
Un certain Pinon se fit grande renommée en construisant non loin de
là des barques gracieuses et élégantes en bois, on les nomma les
Pinonettes. Le constructeur aimait à jouer du pinceau et produisait
des modèles colorés qui eurent grand succès avant que les gens
d’ici ne tournent un temps le dos à la Loire.
La
rue des chats ferrés demeure sans que personne ne songe à chercher
plus loin que le museau du merveilleux greffier l’origine du nom.
Il y a même des explications plus anciennes encore. Comme ici tout
doit remonter au seul siège d'Orléans qui compte désormais, celui
de 1429, des soldats anglais qui avancent matoisement, comme des
chats si vous préférez, afin évidement d’attaquer tout aussi
sournoisement que nuitamment une poterne, furent trahis par le bruit
des fers de leurs bottes. Ils seraient naturellement nos fameux
"Chats ferrés", de ceux qui ne pouvaient passer dans le
trou d’une aiguille sans être remarqués.
La mairie, soucieuse de ne pas offenser les touristes anglais propose quant à elle une sombre histoire de chats appartenant à des protestants, jetés à l'eau, lestés de fers ! Il y a là un malencontreux détail manquant puisque les propriétaires des chats subirent la même plaisanterie de nos bons catholiques locaux le lendemain de la fameuse Saint Barthélémy parisienne. Nous étions le 25 août 1572 et la Loire était rouge du sang mêlé des chats et des humains.
Puisque
chacun ici propose sa version, je vous livre la mienne sans la
moindre garantie. Mais vous pouvez m’en croire, je ne suis certes
qu’un Bonimenteur mais de Loire. L’eau coulera sous les ponts
avant que les chats aiment à se mouiller. Bonne promenade en
Orléans.
Allègement
vôtre.
Suivez le guide
=> https://www.tourisme-orleansmetropole.com/une-journee-au-bord-de-loire/orleans?fbclid=IwAR0VV0mVkEGM49Iau3M4hf0B56fMqkjRj4JGbvJmdRbBZe8TTvB46p-neWo
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