jeudi 12 mars 2020

Comme un cheveu sur la soupe.



La capillarité en action ...




J'aime les salons de coiffure pour hommes, les conversations y sont à nulle autre pareilles, empreintes de la dignité qui sied à celui qui a les cheveux mouillés. N'ayant ni un cheveu sur la langue ni un poil dans la main celle qui frappe sur le clavier, je vais vous restituer ces propos sans queue de cheval ni tête de linotte !

Des personnages singuliers, hirsutes mais imberbes se crêpaient le chignon à propos de leurs professions, qu'ils prétendaient être en vogue, dans le monde étrange de l'absurde capillaire. Ils tenaient des propos échevelés et embrouillés et je ne parvenais pas à démêler cet écheveau confus. Il était question d'une nouvelle vague qui défrise, d'une frange qui prend racine et d'une « perm' » à Nantes en des temps lointains quand sévissait encore le service militaire aux cheveux courts...

Enfin, je retrouvai le fil et je pus relever la tête sous le sèche-cheveux afin de retrouver mes esprits. Ces hommes, tout en discourant des mérites respectifs de la femme éternelle : blonde gironde, brune commune, rousse frimousse, blanche franche ou grise soumise, décrivaient leurs activités professionnelles qui les rendaient si experts dans la connaissance de ces fortes têtes.

Le premier n'y allait pas par quatre chemins. Il affirmait haut et fort qu'il était Tireur de cheveux. Profession plus aisée dans le civil que dans l'armée où le cheveu se porte ras. Il n'hésite pas à proposer ses sévisses aux écoles publiques où la discipline se relâche singulièrement tandis que le cheveu rallonge au fil d'une mode floue. Quelques tractions capillaires sur les têtes récalcitrantes sont du plus bel effet et l'ordre se fait dans les rangs.

Le second se vantait de but en blanc d'être le meilleur arracheur de cheveux du pays. Toujours sur les dents du peigne, il sillonnait le pays à la recherche d'une mauvaise tête qui devait se débarrasser de sa tignasse. Il arrachait surtout les pilosités des sportifs abusant de produits interdits. Le cheveu est, en la circonstance, un témoin à charge des plus redoutables, un objet flottant, facilement identifiable dans la soupe chimique ou le pot belge.

Le troisième voyait dans son ami une brute épaisse, un méchant, un violent. Lui, une paire de ciseaux en main était coupeur de cheveux , tout simplement. Il s'était fait la spécialité de les couper en quatre, le détail n'est pas sans importance car c'est lui qui tenait salon et qui allait s'occuper de ma toison. Jamais en repos, il se creusait la tête pour chercher le complexe là où le simple avait sa place ! Il se payait sur la tête du client.

Le dernier me paraissait encore plus particulier, un rien bohème sous un air redoutable. Il était équipé d'un fouet et d'une cravache, avait dans ses poches une multitude de flacons. Il se disait dresseur de cheveux. Il écumait les pistes du monde entier avec un numéro terrifiant. Il était capable, disait-il de faire se dresser les cheveux sur la tête d'un chauve et même, j'eus beaucoup de mal à le croire, sur celle d'une blonde péroxydée !

J'abandonnai ces personnages. J'avais mal aux cheveux et les perdis de vue.

Les conversations capillaires sont des sujets bien délicats. D'habitude, l'homme se contente d'explorer les truismes de la misogynie. Il classe, juge, affuble la femme de qualificatifs désagréables sur la seule foi d'une teinte ou d'un reflet. De la tignasse de la pétasse à la crinière de la panthère, il s'en faut souvent d'un cheveu pour défaire une réputation !

Quant au joueur de rugby, il n'aime rien tant que de chercher des poux dans la tête de son voisin, de son adversaire du jour ou de son ennemi intime. C'est,à bien y regarder, au risque de vous défriser, une conclusion qui arrive comme un cheveu sur la soupe …


Capillairement vôtre.


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