dimanche 29 juillet 2018

Un rat, une âne, 3 bateaux …



Et quelques humains !


Je laissai Hélène à ses bavardages, sa gentillesse et sa grande ferme pour descendre le canal latéral. Après examen du parcours sinueux de dame Loire, je n'avais guère d'autre possibilité. Je comptais retrouver un peu de monde sur mon chemin en espérant découvrir une chambre d'hôtes au détour d'un petit port.

Une pluie fine, un ciel bas, un air frisquet ; rien de tel pour décourager mes collègues touristes. Aucun cycliste sur le chemin de halage et pendant très longtemps pas la moindre pénichette. J'allais seul et durant la première heure, seul un rat, plus gros qu'un chat, me tint compagnie quelques instant.

C'est alors que les vicissitudes de la marche ou plutôt celles de mes viscères me poussèrent à demander asile à la première écluse venue. C'était celle que venait d'investir Jérémy. Il me permit d'user de ses tinettes, un bonheur rare pour une satisfaction immense. La vie est parfois simple quand on chemine …

Jérémy, le hasard se joue souvent de nous, venait de passer trois années à L'Institut d'Arts Visuels de Cenabum. Le diplôme en poche, il va rentrer à l'École Supérieur des Métiers de l'Animation pour une formation de trois années. Jérémy veut faire de l'animation 3D. Pour ses vacances, il est éclusier. Un travail qui lui laisse du temps pour travailler à des projets sur son Mac qui ne le quitte pas.

Si parfois ses longues journées : de 9 heures à 19 heures, sont agitées avec jusqu'à vingt-cinq passages de bateaux, d'autres sont d'un ennui mortel avec presque personne. Je laisse Jérémy à ce travail trop tranquille où il devra quatorze jours pour un salaire si modeste qui sera bien vite mangé à Toulouse.

Deux heures plus tard, un âne moins chargé que moi me fit un clin d'œil. Il avait l'air amusé de croiser un humain chargé comme un mulet. Entre bêtes, on se comprend avec peu de mots. Il me conseilla de ménager ma monture, je lui sus gré de se préoccuper de ma santé ! Pas très loin de là, trois personnes me regardèrent passer en feignant de ne pas me voir. Elles évitèrent ainsi de devoir saluer ce curieux personnage ! Je les plaignis de tout mon cœur, un bonjour ne coûte pas grand chose et un regard encore moins.

Marius, lui ne se fit pas prier. Il me tendit une main ferme pour saluer celui qui venait à sa rencontre. Soixante-seize ans, cultivateur à la retraite, il avait emmené pour une paire d'heures son petit fils Lucas à la pêche. Marius avait tendu trois lignes en batterie pour prendre quelques chats. L'homme avait ouvert à la va-vite une boîte de maïs Bonduel pour attirer le chaland aquatique. Je lui fis la réflexion de sa désinvolture halieutique …

À côté de nous, Lucas montrait de nombreux signes d'impatience. Il n'arrêtait pas de se « berdiller », il trempait une épuisette dans le canal mouvait l'eau et brassait l'air. Il m'expliqua qu'il allait rentrer en sixième et je lui donnai conseil de s'y tenir plus tranquille. Marius, la casquette vissée sur le crâne, le mégot collé aux lèvres, les bretelles et la veste de chasse voyait tout ça du regard bienveillant de celui qui ne s'en fait plus.

C'est moi qui me fit du mouron un peu plus tard lorsqu'au bout de six heures trente de marche, j'arrivai au terme de mon périple. J'avais pointé le petit port de Garnat comme étape possible. Il n'y avait d'ailleurs guère d'autres possibilités. Je trouvai un lieu parfaitement désert. Une pancarte annonçait fièrement un cimetière pour animaux mais pas de quoi loger le marcheur isolé.

Au pied de l'église, une boulangerie, bar, tabac, journaux loto était ouverte. J'y trouvai réconfort et présence humaine. Le patron, fort aimable me confirma qu'il n'y avait aucun espoir de logement ici. Après ma grosse marche d'hier, je n'étais pas de force à renouveler l'expérience deux jours de suite. J'appelai un taxi pour trouver de quoi me loger. Ce fut le Grand Hôtel de Bourbon Lancy ou Benjamin, Prune et Séverine me firent un accueil réconfortant.

J'étais dans une ville thermale, une voie verte me conduira demain jusqu'à Digoin. La Loire ne doit pas être loin. Il me faut, après vous avoir livré cette journée exaltante, voir si la dame ne s'ennuie pas de moi. Benjamin, à l'accueil m'a certifié qu'il y avait un club ligérien en la place. Il ne faut désespérer de rien dans un ville où un tel club est fondé …

Ligèriennement vôtre

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