lundi 2 juillet 2018

Il n'y a pas de fumée sans eux


La machine à Vapeur

 

 


Les vicissitudes de l’inexplosible durant le Festival de Loire nous poussent à faire un bref historique de la machine à vapeur sur la Loire ! Comme toutes les créations humaines, elle suscita de grandes innovations et eut aussi quelques heures sombres. La Loire n'échappa pas à cette belle et folle aventure. Nous allons attacher nos pas à ce panache de fumée noire que nous apercevons au loin.

Tout a commencé sur notre dame Liger en son estuaire. Quatre ans après les premières tentatives sur la Garonne, « la Loire » fut notre premier bateau à vapeur en 1822. Pour une première, les constructeurs n'avaient pas lésiné : 250 passagers pour un trajet Paimbœuf- Nantes. Tout le monde était alors confiant dans les forces du progrès …
Orléans dut patienter un peu pour découvrir les joies d'un bateau qui remonte le courant sans effort quand le vent vient à manquer. Le « Nantais » ouvrit le bal en abaissant sa cheminée sous le pont Royal. Quatre ans plus tard, la ville avait un vapeur portant fièrement son nom pour la satisfaction de tous. Il transportait passagers et marchandises sur un bâtiment où l'uniforme et les bonnes manières étaient de rigueur. Nous étions en 1829, le ciel n'était pas encore assombri par la terrible histoire que nous allons vous narrer !

Le 15 septembre 1837, la famille Bernard vient rendre visite à des cousins d'Orléans. Partie de Nantes, Madame, grande bourgeoise est accompagnée de sa domestique pour surveiller ses cinq enfants. On ne sait jamais ce qui peut arriver sur un bateau. La Loire recèle tant de pièges pour autant de sollicitations merveilleuses qui peuvent attirer ses petits diables …

Le voyage s'annonçait pourtant sous de bons auspices. Il faisait une belle arrière- saison. Le temps était agréable, le capitaine avait fière allure dans son costume d'apparat. Il donnait des ordres, paradait sur le pont en faisant douces œillades aux belles dames sur le pont.

Madame Bernard n'était pas insensible à ce bel homme, bien de sa personne et aux manières si raffinées. Elle le convia dans sa cabine pour prendre le thé tandis que la brave bonne promenait la marmaille sur le pont. Notre capitaine en oublia certainement la manœuvre et ce jour-là le Vapeur s’engrava.

Pendant deux heures, le Vulcain fut prisonnier d’un banc de sable. La chaudière surchauffa, les roues ne parvenaient pas à dégager ce monstre de plus de 25 mètres de long. Il fallut l'aide de mariniers à voile pas très rancuniers pour tirer l'équipage bien habillé et ses passagers de ce mauvais pas. Le capitaine, échaudé par cette aventure était revenu à son poste …

Il était d'une humeur massacrante et voulut qu'on rattrape le retard. Il demanda à ce que l'allure fût augmentée. Dans la soute, la chaudière était chauffée à blanc. L'homme hurlait des ordres qui ne méritaient aucune contradiction. Il venait de la Navale et avait une conception tout aristocratique de l’autorité. Ce qu'il exigeait était exécuté sans discussion. La surchauffe menaçait.

C'est à Ingrandes, à la frontière de la Bretagne et du reste du monde, que se déroula le drame. Le conduit de la chaudière explosa, le feu prit immédiatement dans ce navire où la panique fut à son comble ! La cloison de la cabine de Madame Bernard explosa sous la puissance de la déflagration. Par un malheureux concours de circonstance, la bonne et les enfants étaient rentrés de leur promenade.

Ce fut alors un désordre inextricable ! La domestique eut un comportement exemplaire, elle mit toute son énergie et son courage afin de tenter de sauver les enfants dont elle avait la garde : hélas, quatre pauvres victimes seront à déplorer. La Bonne elle aussi succomba, victime des risques insensés qu'elle prit.
La traction à vapeur avait pris un coup dans l'aile. Ce malheur ne fut pas le seul. Un ingénieur se pencha sur le problème. Il trouva un dispositif à basse pression pour diminuer considérablement les risques d'explosion. Il ajouta un échappement des fumées sous l'eau pour diminuer encore les risques. Un industriel créa la compagnie « Les inexplosibles ! » en 1837.

En 1842, la chaudière du « Riverain », bateau d’une autre compagnie, explosa à Ancenis, provoquant alors grand trouble dans l’opinion car il y eu une trentaine de victimes. Seul les Inexplosibles échappèrent au doute provoqué par le drame.

Plus tard, le train vînt mettre tout ce joli monde de la rivière à la raison. En 1852, la compagnie fermait la porte. D'autres vapeurs continuèrent encore quelque temps jusqu'à ce que le train finisse par passer partout.

Voilà l’histoire des congénères de l’inexplosible numéro 22. Que celui-ci restât à quai ne fit sans doute pas bouillir la marmite et c’est fort dommage pour son gérant. C’est surtout un spectacle merveilleux dont furent privés les curieux. Nous ne prendrons nullement position et voulions simplement prendre prétexte pour cette page d’histoire.





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