samedi 23 mai 2020

Les pontons pénitentiaires anglais.



Ceux de la Tamise et de Plymouth



Nous connaissons tous l’incroyable aventure romanesque de Ambroise Louis Garneray, corsaire, aventurier, romancier, peintre né en 1783 et décédé en 1857. Il navigua sur l’Océan Indien aux côtés de Surcuf et Dutertre, participa à l'abordage victorieux du Kent, l’exploit le plus célèbre du corsaire, en octobre 1800. Il sera ensuite corsaire sur la Belle Poule qui sera prise en mars 1806 par les anglais. Il est conduit au Royaume-Uni et passera huit années suivantes dans l'enfer des pontons en rade à Plymouth. Il a la chance de mettre à profit cet enfermement pour peindre. Il bénéficiera des commandes d’un marchand de tableaux britannique qui lui permirent de survivre dans cet enfer. Nous reviendrons une fois prochaine sur l’incroyable destinée de cet homme d’exception.

Il nous donne le prétexte d’envisager le système pénitentiaire de nos amis anglais. Si la prison était une des réponses pour ceux qui avaient la chance d’échapper à la pendaison, d’autres perspectives s’offraient aux délinquants. Pour répondre à la surpopulation carcérale on envoya d’abord en Amérique du Nord jusqu’à la révolution américaine (1775-1783) petits et grands délinquants. À partir de 1787 l’Australie reçut 160 000 hommes, femmes et enfants qui constituèrent la base de la population blanche.



Mais revenons à notre peintre français. Si Garneray fut emprisonné à Plymouth sur la pointe sud de l’Angleterre, d’autres prisonniers connurent le même sort sur la Tamise. Des épaves de vieux navires de guerre désarmés devinrent les fameux pontons. Simple solution temporaire à l’origine, ces prisons de fortune, véritables enfers, se prolongèrent pendant quatre-vingts longues années. Les premières épaves pénitentiaires furent amarrées sur la Tamise non loin de Woolwich, à l’est de Londres.
Le logement des prisonniers sur ces pontons s’avéra particulièrement onéreux pour les finances anglaises. Afin de participer aux frais, les autorités imposèrent des travaux forcés à leurs prisonniers prisonniers qui œuvrèrent grandement au développement commercial de la Tamise.

Les malheureux prisonniers s’occupèrent du dragage du fleuve afin de faciliter le passage des navires commerciaux. Les détenus furent encore mis à l’ouvrage pour l’expansion de l’arsenal de Woolwich et des quais avoisinants. D’autres étayèrent les berges en enfonçant des piliers dans la vase afin de prévenir l’érosion.

Les conditions de vie à bord de ces épaves pénitentiaires étaient effroyables. L’absence d’hygiène favorisait de nombreuses infections. Les malades n’étaient pas soignés et restaient parmi leurs codétenus. Si bien que le typhus, la dysenterie et autres épidémies encore firent des ravages dans leurs rangs. La mortalité avoisinait les 30%. Inutile de vous dire que l’odeur qui émanait de ces cachots flottants était répugnante. Entre 1776 et 1795, 2 000 détenus perdirent la vie dans les prisons de la Tamise.



À partir de 1779 John Howard s’insurgea contre l’utilisation de ces pontons. Il souhaitait des cellules individuelles afin que les prisonniers puissent être mis au travail dans de bonnes conditions. Une première prison, celle de Millbank, fut construite en 1816 après un long combat pour cet homme valeureux et humaniste. 
 
Ambroise Louis Garneray, notre prisonnier français, quant à lui, fut libéré le 18 mai 1814 quand la guerre entre la France et l’Angleterre prit fin. Les pontons ne furent pas pour autant abandonnés totalement. Il fallut attendre 1857 pour voir le dernier ponton en activité disparaître au terme d’un incendie.


 Tableau de
Ambroise Louis Garneray

2 commentaires:

À quoi rêvent les bateaux qui restent à quai ?

  Partir À quoi rêvent les bateaux qui restent à quai ? Ces éternels prisonniers de leurs entraves Ils ont pour seules v...