mercredi 13 mai 2020

Comment conter à l’école ?



Ce que je crois …



N’étant pas tout à fait conteur, j’ai pourtant quelque avis sur la nécessité, me semble-t-il, de refaire une place au conte à l’école en précisant les garde-fous qui s’imposent pour que cette plongée dans l'imaginaire se fasse de la meilleure manière possible. Le conte, bien sûr, doit parler de notre époque sous couvert d’un univers qui s’éloigne diamétralement de la réalité d’un quotidien qui n’est pas de nature à ouvrir les portes du songe.

Le conte n’a rien à voir avec l’univers aseptisé de Walt Disney et autres faiseurs de légendes insipides. Il doit, en tout premier lieu, se passer d’image, cette imposition de la représentation qui est devenue la norme, alors que la force de tels récits consiste justement à pousser l’enfant à se construire lui même son décor, ses personnages, ses émotions, en jouant autant de ses peurs que de ses rêves.

Dans ce même ordre d’idée, le livre de contes parfaitement et exagérément illustré est un tue-l’imagination de tout premier ordre. Point n’est besoin qu’un tiers pense le décor à votre place, impose sa vision des personnages et des situations. Rien n’est pire que le dessin qui illustre, qui se fait redondance, surlignage du texte . Il n’est rien de tel que ces livres d’images pour briser l’imaginaire de votre rejeton ou de vos élèves.

Le conte ne se lit pas à haute voix ; c’est encore une belle manière de desservir son auteur. L’essentiel est ailleurs, il se situe dans les images mentales qu’il a souhaité suggérer. C’est d’abord une imprégnation qu’il vous faut réaliser, une compréhension intime de son déroulement , tout autant que des intentions que vous lui prêtez. Il ne s’agit pas d'emprunter les mêmes pas que son auteur mais de devenir, à votre tour, créateur d’une nouvelle version qui vous appartiendra en propre.

Le conte se prend par le cœur. Votre travail d’appropriation doit vous conduire à vous faire le porte-parole de votre interprétation de ce récit. Vous vous êtes investi de cette formidable responsabilité de vous faire livreur de récit. C’est par vos mots, vos inflexions de voix, votre sensibilité que vous conterez un texte qui sera désormais le vôtre.

Je sais que ce parcours n’est pas celui de la facilité, qu’il demande engagement, talent et motivation. N’en soyez pas surpris : l’enseignement exige ces qualité en toutes circonstances. Si vous êtes timide, si vous n’êtes pas acteur, si vous n’avez pas le don de tenir un jeune auditoire en haleine par le seul pouvoir de votre voix, il convient bien vite de changer d’activité ; vous avez fait fausse route, en dépit des diplômes illusoires dont vous êtes bardé.

Vous vous sentez capable de suivre ces conseils qui ne sont, au final, que des évidences qu’il convenait de préciser, loin des conseillers pédagogiques à la petite semaine ; alors, vous allez vivre une formidable aventure qui va libérer tous les possibles chez vos élèves. Prenez garde : on vous mettra en accusation car, en agissant ainsi, vous sortirez des sentiers battus du grand formatage général, de l’affreux conditionnement des jeunes cerveaux que mènent conjointement télévision, cinéma, école et familles.

Cette aventure est exaltante. Elle vous placera devant une grande et formidable responsabilité. Vous serez payé en retour par les sourires des élèves, leur écoute, leur capacité à créer et à inventer à leur tour des récits. Vous vous donnerez l’opportunité de vrais débats au sein du groupe pour tirer toutes les ficelles de la pelote que vous aurez tissée devant eux.

Puis, vous découvrirez la nécessité de créer vous-mêmes vos récits, de mettre en scène des situations qui viendront étayer des connaissances que vous abordez dans votre enseignement. Vous bouterez le vieux donneur de conseils et ses histoires ordinaires pour prendre la plume et vous faire à votre tour Bonimenteur. C’est tout le mal que je vous souhaite;

Raconteusement vôtre.

 Le conte est un pont entre le passé et le présent

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