Brouettes
Une brouette urbaine rua dans les brancards
Après qu'elle eut roulé sur un nid de poule
Est-ce là le détestable fruit du hasard
S'enquit celle qui venait de perdre la boule ?
Son pousseur voulut prestement la rassurer
Quoique assez semblable à une remorque
La demoiselle n'est pas en mesure de tracter
Bien qu'elle fut inventée par un chinetoque
L'ingénieux outil s'indigna dans l'instant
Qu'on puisse insulter le vénérable Ko Yu
Qui lui donna naissance il y a fort longtemps
Pour rouler des chemins semés de cailloux
C'est en s'inspirant du mouton qu'il inventa
Cette merveille de technologie rudimentaire
L'humanité réalisait un précieux pas
Quoiqu'une seule roue la reliait à la terre
Depuis, celle qu'on prit alors pour une biroute
Se moqua superbement de la confusion
En écrabouillant des œufs, elle eut un doute
Sur l'état de son essieux par contagion
Une bérouette champêtre s'indigna
Que, pitoyablement laissé sur un rond point
Pour servir de potiche à des pétunias
Elle achève son existence dans ce tintouin
Elle qui vécut de l'air du temps à la ferme
Dans le doux parfum du lisier et du fumier
Subit honteusement sur son épiderme
Toutes les agressions du transport routier
Elle aimerait à nouveau rouler sa bosse
Gambadant dans les ornières et chemins creux
Sans jamais se confondre avec un carrosse
Elle qui se plaisait au service des cul-terreux
Un paysagiste sans la moindre jugeote
La condamna à servir de toile de fond
Pour des automobilistes qui ont la bougeotte
Immobile et inutile elle se morfond !
L'une comme l'autre se sentent déplacées
La première pour une bricole se tracasse
Quand la seconde véritablement courroucée
Adorerait qu'on la remette à sa place
Brouette des villes ou bérouette des champs
Bien que chacune voit midi à sa porte
L'une est chafouine quand l'autre en contrechamp
N'est-ce donc que de l'humeur qu'elles transportent ?
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