mardi 2 mai 2023

Brèves de Berlaudiot -1 -

 

Première partie





C’est not’Brave bredin qui s’en va à la foire des cours à Gien. Le malheureux n’a personne qui veut l’y conduire, faut ben reconnaître que le gredin refoule un peu de tous les bouts. Mais pour l’occasion, espérant trouver enfin une drôlesse, lui qu’est encor à cet’heure vieux gars, s’est soigneusement lavé les pieds. On ne sait jamais !

Il se met en chemin, la route est longue. À Lion-en-Sullias, il trouve sur route le gars La Malice qui marche d’habitude d'aussi bon pas que lui. Mais anhuit, c’est Berlaudiot qui traîne la patte. Son compère est obligé de l’attendre un peu et s’en inquiète :

« Qu’as-tu donc aujourd’hui pour lambiner pareillement ! »

Berlaudiot tout penaud de lui répondre : «  A chaque fois que je me lave les arpions, j’ai beau bien les essuyer, je flotte toujours dans mes godillots ! »

 



Le gars La Malice, un brave gars certes mais grandement pingre et peu compatissant pour ses collègues, s’en va au marché de Sully emportant des cochons à la foire. Il a chargé la troupe des gorets sur un tombereau qui lui sert de calèche rudimentaire. Il s’approche de la côte de Logneau quand il double Berlaudiot chargé comme une mule qui s’en va à pied au marché vendre quelques lapins. Le tombereau double le marcheur quand celui-ci gueule de toutes ses forces :

« Hé La Malice ! T’as perdu quelqu’chose en chemin ! »

L’autre d’arrêter son cheval et se retourner vers lui :

« Hé quoi donc j’ai ti perdu mon gars ? »

Berlaudiot tout sourire, prenant l’air le plus niais qui soit de lui répondre :

« Ben tu l’vois pas par toi-même grand nigaud ? T’as perdu l’occasion d’me rendre service en t’arrêtant pour me monter à bord ! »

La Malice furieux donna un grand coup de fouet au cheval, sans ren dire au quémandeur qui il faut ben l’avouer, est trop gaillard pour qu'on lui chercher querelle.

 



Une autre fois, encore un lundi, jour de marché, Berlaudiot devait se rendre à Vérote pour y livrer des dames Jeanne. Il y a grande chasse au domaine, c’est pour alimenter des gosiers en pente de bourgeoisiaux qu’il se rend à l’office. Là il tombe sur le garde chasse, flanqué de quelques rabatteurs, tous en train de licher une bonne bouteille. Berlaudiot livre son vin et essuie son front pour bien marquer l’effort qu’il vient de consentir.

Le garde lui fait alors remarquer qu’il a un peu de retard sur l’horaire prévu. Notre homme de lui répondre du tac au tac :

« Mille excuses monsieur le garde de chasse, mais ma vache vient de vêler et elle a mis au monde cinq viaux. Ça pas été une mince affaire pour les faire têter ! »

Le garde, tout assermenté qu’il est, n’a pas vu venir le traquenard que lui tend le gredin.

« Mais une vache, ça n’a que quatre mamelles. Comment fait le cinquième veau ? »

Berlaudiot tout sourire de répliquer, piquant :

« Ben il est emberlaudé. Il doit faire comme moi. Il regarde les autres boire ! »

 



Le village est en émoi. Le Sénateur rend visite à la cité. Il y a tout un cérémonial organisé pour l’occasion et le grand personnage est perché sur une estrade et trône sur un superbe fauteuil en velours rouge. Un tapis de la même couleur est installé au pied de l’estrade et chacun a reçu la consigne de n’y mettre point les arpions.

Berlaudiot autant par dérision que pour faire briller les autres notables de la cité fait partie de la liste de ceux qui vont être présentés au parlementaire. Naturellement, il passe en dernier, un peu pour la bonne bouche diront les esprits moqueurs.

Un conseiller souffle à l’oreille du Sénateur le compliment qu’il doit adresser à son visiteur. Quand arrive notre lascar, l’important lui glisse à l’oreille que le village a voulu honorer son imbécile. Le grand élu s’en amuse et regarde un bon moment le pauvre garçon qui chiffonne son béret dans ses mains.

Voulant faire le malin comme tout notable qui se respecte, le Sénateur pose une question alambiquée à Berlaudiot : « Dites moi mon brave, vous qu’on présente ici comme un homme sage, j’aimerais savoir ce qui sépare un homme important d’un pauvre imbécile ? »

Berlaudiot sans se démonter et puisqu’on l’avait piqué au vif de répondre :

« C’est tout simple votre Grandeur, simplement un tapis rouge même si les rôles qu’on prétend attribuer à l’un et à l’autre sont dans le cas présent inversés » 


 

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