mardi 6 octobre 2020

Un café virtuel

 

Le bistrot de la dame Mimosas.

L'estaminet sublime.




Il est un petit coin virtuel où le bonheur séduit le pauvre surfeur échoué là par hasard. Il pose alors sa planche et découvre un monde merveilleux à l'écart des usages de notre monde réel. On s'y salue en entrant, la chose est étonnante, l'habitude perdue depuis des lustres à moins que ce ne soient des lurettes magnifiques.


La tenancière du lieu n'a rien d'une mère Ténardier. Elle se paie le luxe de jouer elle-même les Cosettes pour descendre plus que de raison à la cave, quérir une de ces bouteilles qui vous ravissent les yeux, l'imagination, la parlure avant que de combler un gosier assoiffé d'avoir trop disserté de la chose.


Elle offre la tournée générale sans rechigner à la dépense. La dame sait recevoir et il semblerait qu'il ne lui en coutât rien. Elle n'est pas la seule à montrer cette générosité que notre pouvoir d'achat en berne (sauf pour les résidents Suisses) ne permet plus d'exprimer en d'autres lieux.


Le client de passage s'étonne rapidement de cette soif maladive qui habite les piliers de ce bar étrange. Les tournées vous font tourner la tête et le cœur. Les payeurs viennent de toute la France et même de contrées bien plus lointaines encore. Le cosmopolite s'y déploie tout à son aise à l'unique et louable restriction de manier la langue française dans de ses forts nombreux registres.


Les patoisants y perdent parfois leurs idiomes, les lettrés leur latin, les imaginatifs leurs néologismes, les argoteurs leur jactance. Car au bout du comptoir, la langue ne pend jamais bien longtemps et le coude ne risque guère de s'ankyloser.

Je devine les abstèmes intégristes et les empêcheurs de tourner en barrique se lever et crier à l'ivrognerie indigne, à la décadence ou pire à la déchéance physique. Ils poussent des cris d'orfraie en un lieu où le chambré est toujours préféré au frappé. Ils ne peuvent savoir que nulle atteinte réelle ne brisera les réputations des visiteurs.


Le foie des habitués se porte très bien, merci pour eux. Je n'en dirai pas tant de leur foi tant les conversations roulent parfois dans la sciure les calotins et les culs bénis. Il faut savoir pardonner et quand l'offense est trop grande, tendre un autre verre à celui qu'on a courroucé.


Chez dame Cerise, les copains d'abord, les autres ensuite, ne se privent jamais de l'offrande immatérielle. Elle ne coûte que quelques minutes de clavier pour des éternités de bonheur. Le troquet est installé en pays imaginaire, il a bouté la brève de comptoir pour réclamer la prolixe d'écritoire.


Pas de licence IV ni d'heures d'ouverture, le bistrot du net est à votre porte, bien caché dans les arcanes de cette toile gigantesque qui s'accorde un petit coin de paradis entre la souris et le clavier, à l'heure qui convient quand on a un chagrin à épancher, un bonheur à partager, une indignation à exposer.


Qu'importent les motifs, il y aura bien un gentil fou pour pousser les tables qui n'existent pas. Il vous entraînera alors dans une folle farandole, une valse langoureuse si la patronne accepte de partager. D'autres arrivent avec des morceaux choisis, musique ou cinéma, le don est règle et tant pis pour les droits d'auteur.


Si vous voulez passer un moment, prendre un abonnement, vivre intensément sans débordements ni tourments, allez donc quérir Marie-Cerise du côté du Post. Vous y découvrirez une belle bande d'illuminés qui vous fera le meilleur accueil.


Bistrotement vôtre


 


 

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