Le berlingotier de Briare
Camille Delamour est né à Briare le 5 décembre 1896. Il meurt en 1965. Il était connu comme le loup blanc puisque forain de son état, il écrivait des poèmes en patois berrichon tout en vendant ses berlingots et en tenant son stand de tir. Il écume les fêtes du Pays Fort, cette terre berrichonne qu’il aime tant ! Il amuse la galerie de sa gouaille, joue de l’accordéon pour animer ses deux baraques foraines.
Camille
Delamour vivait avec sa femme dans une roulotte. Il se déplaçait de
fête en fête avec sa voiture-boutique de tir et de confiserie dans
la région de Gien et de Châtillon-sur-Loire. Quand ses deux
roulottes, tirées par un tracteur, arrivaient en vue d'un bourg, les
gamins accouraient, avides de quémander un peu du fil de berlingot
fumant qui sortirait bientôt des grands chaudrons de cuivre.
Camille Delamour était aussi poète. À la suite d'un drame personnel, il se met à écrire des poèmes en berrichon, des " rimailles " comme il aime à dire qui paraissent dans le journal de Gien de 1946 à 1965. Ses textes évoquent la nature et racontent aussi la vie des campagnes et le monde qui change. L'humour du bonhomme, la précision de ses descriptions, la vivacité de la langue et le ton rabelaisien de son style font la joie des lecteurs qui aiment à le retrouver dans leur journal favori. Ce personnage singulier mérite qu’on s’y attarde ici. Il n’a eu de cesse de faire hommage à son terroir dans une langue incroyablement fleurie et truculente. Le retrouver ici ou bien aux Éditions Corsaire c’est rendre raison à une époque totalement révolue, celle d'avant la voiture et la télévision, ces deux éléments qui transformeront radicalement la vie de nos campagnes.
La chanson du marinier
Prends
le large mon gars
C'est le vent qui t'appelle
Prends le large
mon gars
Il est temps de partir
Prends le large mon gars
C'est
le vent qui t'appelle
Eho ! Les gars, au vent de la mer
Eho !
Les gars chantant
Prends
le large mon gars
Sur la vague jolie
Ton bateau glissera
Comme
un grand goéland
Prends le large mon gars
Sur la vague
jolie
Eho ! Les gars...
Prends
le large mon gars
N'aie pas peur des tempêtes
Prends le large,
ton bras
Est plus fort que la mer
Prends le large mon
gars
N'aie pas peur des tempêtes
Eho ! Les gars...
Prends
le large mon gars
C'est la vie qui t'appelle
Hisse toutes les
voiles
Bonne route et bon vent
Prends le large mon gars
C'est
la vie qui t'appelle
Eho ! Les gars...
L'Vieux
Sapin
On
me l’avait dit…J’v’lais pas l’croire
Et
j’pensait – C’est un mal content
Qui vient m’raconter
queuqu’histoire
…Je l’ai vu…C’est bien vrai
pourtant
J’orais jamais penser qu’ des hommes
Qu’on
une âme... qui sont pas des fous
Seuraint comett’ c’crime
énorme
Tuer c’vieux sapin…pour s’fee des sous
Ca
fait si longtemps que sa ramure
Couvrant l’sol…où l’harbre
a pouss’ pas
Portant son éternelle vardure
Même sous la
neige et les frimas
Ca fait si longtemps que d’sa bute
I
r’gadait tracer des labours
Tandis qu’un marbot jouait d’la
flûte
Que j’pensais qu’ça durait toujours
Combien d’
foués qu’en bonn’ compagne
J’atais v’nu l’voir dans
l’soir couchant
Sans penser qu’un jour une cognée
Viendrait
l’meurtrir de son tranchant
Mais c’est l’sal couté
d’mont époque
Où tripatouill’nt tant d’ drol’s de
gens
C’qu’est joli…Mon Dieu ! qu’on s’en
moque
C’qui compte à présent…c’est l’argent
V’la
pourquoué…pour queuqu’s billets d’mille
Qui p’tete demain
tomb’ront dans l’siau
Cartains. Ah ! les pour
imbéciles
Tuons c’que l’Bon Dieu a fait d’pus beau
J’ses
sur ben d’fait qu’c’est un blasphème
Et sous la plainte du
vent du Nord
Comm’su l’cercueil d’un etr’ qu’on
aime
J’ai pleuré c’vieux sapin mort
A Briare
12 mars 1948
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