Clichés
sur les alpages …
Un
train à crémaillère vint nous conduire au pied de l'aventure
randonneuse. Nul besoin, en ce pays si sage d'automobile, la
prévoyance ou le conservatisme ont permis de ne point mettre au
rebut les vieilles solutions du temps jadis quand le rail allait à
une allure tranquille. La Suisse n'a pas condamné son réseau
intérieur sur l'autel des contraintes économiques et du désir de
rentabilité immédiate. Nous avançons dans un décor de rêve sans
apporter notre part de CO2, que du bonheur !
Les
circuits sont balisés, fléchés, entretenus. Les panneaux
s'ajoutent aux signes cabalistiques sans crainte de la redondance.
L'égarement n'est pas de mise en ces lieux. Seule la vache
allaitante peut provoquer quelque émoi chez le citadin explorateur
de contrées par lui inconnue. Il y a foule qui déambule :
chamarrée, hétéroclite, polyglotte, sympathique, … La marche
fait des adeptes dans toutes les couches d'une société debout.
La
vache est la maîtresse des alpages. Elle nous le fait savoir par le
tintement de ses clochettes. C'est elle qui travaille à l'entretien
des prochaines pistes et les touristes lui doivent respect et
considération. Quelques traces fraîches valent bien les immenses
services qu'elle rend. Ceux qui font le nez à ce menu désagrément
trouveront bien un golf aseptisé un peu plus bas pour jouir d'une
nature recomposée aux besoins des hommes.
Première
surprise, de taille celle-ci, point de représentante de la race
bovine à la robe violette. Nous aurait-on menti à longueur de
publicité ? Je m'enquiers de la chose, une charmante fermière
d'altitude renvoie l'image aux voisins autrichiens. Ici la bête à
corne est brune, grise, blanche ou noire. Les laitières se font
rares (nous y reviendront) au profit des races à viande qui
demandent bien moins de présence.
Ce
qui surprend l'estivant français, c'est le respect de la nature et
l'amour de leur pays qui habitent tous les citoyens de cet état fier
et indépendant. Le drapeau flotte au vent de chaque chalet, les
oriflammes des cantons décorent les façades. L'ordre, la propreté,
l'esthétisme sont élevés ici au rang d'institution nationale. Le
papier gras n'a pas sa place dans le décor … Les chalets sont tous
habillés de cuivre : faitage, gouttière, cheminée. Pas de folie
cleptomane pour revendre au prix fort le précieux métal. Le respect
de la propriété se passe également de clôture.
Sur
les chemins, les langues se mêlent, s'entre-mêlent. Cela n'empêche
pourtant pas quelques mots gentils en français pour répondre à
notre « Bonjour ». Chacun dispose de suffisamment de
vocabulaire dans la langue romane pour répondre à une question des
touristes qu'on est d'ailleurs ravi de voir ici (le fait n'est pas si
fréquent ). Le multilinguisme est naturel, il ne porte pas en lui
les raisons de la scission comme chez nos amis Belges. Il est au
contraire le ferment d'une tolérance qu'on perçoit partout et
d'une gentillesse qu'on apprécie à chaque pas.
Les
vignes poussent à flan de montagne. Le vigneron défie l'équilibre
sur des pentes invraisemblables. Des crémaillères, là encore,
viennent aider l'homme dans sa labeur. Le vin se fait bon, il profite
des efforts considérables des professionnels et des amoureux des
cépages locaux. Le Chasselas n'est pas qu'un raisin de table et
donne un blanc amusant, rond, fruité, légèrement piquant qui est
un vrai plaisir. Les autres vins nous surprennent tout autant.
Attention, un pays viticole se réveille !
Seules
les étiquettes affolent le pauvre français. Rien ne lui est
abordable à moins d'appartenir à cette élite économique qui ne se
refuse jamais rien. Nous comprenons ici que notre pays est rentré
dans le rang des pays modestes et que nos petits salaires hexagonaux
ne nous permettent pas de rivaliser. J'apprends qu'un instituteur
débute ici à 4 000 francs suisses. Les classes moyennes sont encore
respectées ce qui n'est plus le cas chez nous depuis bien longtemps.
L'Euro
est une fiction, le touriste se réveille avec la certitude qu'on l'a
berné. Il déplore la modestie de ses moyens. Il se dépêchera de
rentrer dans son pays qu'une la presse Helvète fort cher (10 CHF)
raille à longueur de colonnes. Elle se gausse surtout d'un petit
homme qui chez nous est encensé par une presse servile. Les
gens sont si mesquins !
Touristiquement vôtre.
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