lundi 31 août 2020

La tête me tourne …



Étrange manège entêté.



Mais que m'arrive-t-il ce matin ? Je manque d’air depuis quelques jours sous le masque. J'ai la tête qui tourne ! Sans force, fatigué, je suis tout chose. Moi qui pensais l'avoir bien ancrée sur les épaules, je découvre qu'elle n'en fait qu'à son idée. Une tête de cochon qui n'a pas de tête, ne peut agir sans raison. Quoique ! La mienne est indépendante,  je la crois avec moi quand elle est ailleurs.

Il faut croire que ma tête a mal tourné. À force de se payer ma tronche, elle a acquis une manière bien à elle de se gausser de moi, de m'en faire voir de toutes les couleurs. Plus elle tourne, plus entre elle et moi, le ton monte. Nos échanges prennent alors un tour assez désagréable. Des prises de bec au belles engueulades, l'invective s'immisce dans notre tête à tête. Pour mettre un terme à la querelle, je crie à tue-tête sans jamais atteindre ma cible !

Une tête pareille, je ne le vous souhaite pas. Vous ne pouvez imaginer les tourments qu'elle me fait supporter. La diablesse est dure au mal, elle se moque que je la cogne contre les murs pour la ramener à la maison ou à la raison. Voilà du reste une contrée qui lui est tout à fait inconnue. Tête folle, elle vagabonde, virevolte, s'offre des escapades dans la Lune, marche sur des œufs ou sur elle-même et me joue de vilains tours de cochon. Je crains que la dame soit écervelée, la belle affaire que voilà !

Nous avons parfois des moments d'accalmie. Ma tête se montre alors aimable, me fait des politesses, opine aimablement à mon approche. C'est dans ces circonstances qu'elle est la plus retorse ! C'est qu'elle a une idée derrière elle-même et qu'une fois encore je serai la victime des ses facéties. Je reste sur mes gardes, j'attends avec inquiétude ce qu'elle sortira de son chapeau.

Toujours pourtant, elle me prend au dépourvu. J'ai beau l'avoir pliée, creusée, piochée, bêchée, baissée, levée, tournée dans tous les sens pour anticiper son entourloupe, elle a plus d'un tour dans sa capuche ! Ma caboche se jette à la tête de quelqu'un sans que je puisse esquiver le coup. Prise de tête, querelle qui tourne au vinaigre, déluge de grimaces, avalanche de gros mots, la vilaine me place à chaque fois dans une situation embarrassante.

Je dois vous avouer qu'elle a la déplorable assuétude entêtante de s'en prendre à nos amis les turcs. Que faire dans un cas pareil ? Est-ce parce qu'un jour j'ai voulu lui mettre martel en tête ? Est-ce une fâcheuse interprétation de ses lointains cours d'histoire ? Toujours est-il que je n'en mène pas large. Je me confonds en excuse, je baisse la tête et demande pardon. Trop tard, le mal est fait, ma mauvaise tête a encore sévi.

Parfois, il me vient de idées noires (quoique désormais les têtes bien pensantes voient dans cette expression une réminiscence d’un passé désastreux). J'ai envie de donner ma tête à couper. Comme elle est de bois, il doit bien se trouver un menuisier pour remplir cette œuvre salutaire. L'artisan me regarde, me fixe un prix à la tête du client. J'accepte volontiers ses conditions, il me tarde de me débarrasser d'elle. L'homme se met en besogne et satisfait à ma demande. Je pensais être soulagé, mais les lois du commerce sont incontournables, il me l’apporte ma tête sur un plateau. J'ai payé ce service, ma tête me revient de droit.

Alors, la tête sous le bras, je m'en retourne penaud chez moi. J'ai une impression curieuse, il se passe quelque chose d'anormal. Dans la rue, les gens détournent la tête quand je les croise. Certains tournent de l'œil quand d'autres s'arrachent les cheveux. Je dois avoir pris la tête des mauvais jours. Je donne ce fardeau au premier venu. Celui-ci, surpris, la regarde dans tous les sens et finit par la mettre à l'envers. Il s'en va sans me remercier chargé de ma tête.

Maintenant que j'ai la tête ailleurs, elle finit par me manquer d’autant plus que je ne sais plus où me mettre le masque. Je dois faire amende honorable pour qu'elle me revienne. Cette fois, je lui ferai un bel accueil. Plus question de lui tourner le dos. Où ai-je ma tête ? Retrouverai-je un jour tous mes esprits ? J'en doute et vous laisse méditer sur cette histoire sans queue ni tête !

Cérébralement vôtre


2 commentaires:

  1. Voilà qui me rappelle ce que disaient de moi les adultes, quand je refusais de plier, ce qui n'était pas rare : « Quelle tête de cochon ! »
    bab

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  2. 44ContreLINKY

    On me le dit toujours
    Et je dois le mériter

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