jeudi 4 juillet 2024

Le retour des fantômes hideux.

 

La bête immonde.




Il n’est pas une période trouble qui annonce sans doute une catastrophe imminente qui ne s’accompagne du retour de la Bête. Qu’importe d’ailleurs le monstre. Chaque époque a connu des préférences, des pensées noires, hideuses, indicibles qui trouvaient leur expression dans quelques avatars du diable, l’être malfaisant suprême.


Nous avons eu droit au dragon. Premier candidat crédible à l’effroi collectif. Il a peuplé toutes les rivières quand l’ordre antérieur avait disparu. Il fut combattu sans relâche par ceux qui portaient la nouvelle foi, celle qui allait imposer une civilisation née des cendres de la précédente. La bête tuée, la vie pouvait reprendre son cours, il n’y avait pas grands dommages humains en somme.


Puis le loup a fait son entrée en scène. Le pauvre animal a toujours eu mauvaise presse. Qu’une petite fille, bergère isolée dans une nature forcément hostile et inquiétante, tombe sous les crocs d’un prédateur quelconque, c’est lui qui est pointé du doigt, mis au ban de la société. La bête propage la peur, le pouvoir intervient pour rétablir l’ordre.


Il y eut le fameux monstre du Gévaudan mais plus récurrent encore la Bête d’Orléans, surgissant tous les cinquante ans, quand de nouveaux troubles se propageaient dans les campagnes. L’église réclamait des prières, le roi envoyait les meilleurs louvetiers et tout finissait par rentrer dans l’ordre.


L’homme ne fut pas exempt de ces monstruosités supposées. Les chauffeurs vinrent brûler les arpions des braves paysans tandis que des hordes sauvages surgissaient parfois de lointaines steppes. La peur était cette fois bien réelle, les dommages terribles. À d’autres moments, les victimes de la colère des puissants n’étaient que de commodes boucs émissaires. Les femmes surtout ont payé un lourd tribut aux superstitions instillées dans les consciences.


Les sorcières brûlaient sur le bûcher, rappelant sans doute les flammes du dragon et de l’enfer. Tout avait commencé en occident par l’hérésie d’Orléans en 1022, douze chanoines, des hommes périssant par le feu. Il se trouva sans doute de bons penseurs pour trouver que s’en prendre aux femmes serait plus facile, ce qui fut fait avec une incroyable perversité.


Durant toutes ces périodes troubles, une victime expiatoire traversa toutes les époques. Elle fut chassée, marquée, condamnée, déplacée, expulsée, déportée, éliminée au gré de l’imagination des pouvoirs. Dans toute l’Europe, les fils d’Abraham portaient le mauvais œil. Leur crime initial, la mort du prophète, devait nécessairement se laver dans l'opprobre ou pire encore dans le sang. L’église se faisant alors un malin plaisir à suppléer le pouvoir dans la vindicte générale.


Nous pensions être à l’abri de toutes ces hérésies. Mais souvent le racisme est agité comme un chiffon rouge quand les tensions sont trop fortes, quand la situation n’est plus sous contrôle, quand l’avenir est lourd de menaces. C’est bien le cas aujourd’hui avec des inquiétudes multiples, des dysfonctionnements effrayants et surtout une Planète allant dans le mur.


Pour ne rien faire fondamentalement, la vieille recette surgit à point. Il y eut d’abord l’étranger, celui qui vient nous voler le pain, nos poules et nos emplois. Un parti politique s’est fait le chantre de cette thèse abjecte avec un succès toujours plus grandissant. Quand le ver est dans le fruit, l’autre monstre, le plus atavique, le moins compréhensible, le plus viscéral, le moins explicable sort du bois.


L'antisémitisme retrouve ses droits, sort de l’ombre pour éclater au grand jour. C’est simplement monstrueux, c’est totalement odieux. Mais que faire quand les raisons profondes de cette falsification des peurs ne sont pas remises en cause ? Le Capitalisme et la société libérale sont à bout de souffle. Pour se maintenir encore et malgré l’évidence, la haine du juif va leur fournir quelques répits. Détourner l’attention des masses a toujours été la stratégie des pouvoirs même si souvent ils finissent par être débordés par leur créature.


La bête immonde est de retour. Cette fois, ne nous trompons pas de combat. Le temps est venu de changer radicalement un système véritablement diabolique. L’enfer est pour demain et il sera le lot de chacun.


 


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