jeudi 28 décembre 2023

La fête foraine à Orléans

Roulez roulez jeunesse




Les raisons de la colère

 

 

Dessine moi un manège …




Il était une fois une famille qui avait décidé de se distraire à la grande fête foraine. Chaque année à la même époque, les deux parents de Victor aimaient à retrouver leur enfance, s’amusant parfois plus que leur fils dans les différentes attractions non pas que l’enfant s’y déplaise mais il goûtait fort peu de devoir toujours être accompagnés de ses géniteurs. Quand il croisait des camarades, il n’échappait pas à leur moqueries.


Ce jour-là, tous les trois se lancèrent dans l’aventure du labyrinthe. Avant que de s’y perdre, comme tout un chacun, les parents avaient donné un lieu de rendez-vous qui avait totalement échappé à l’enfant. Qu’importe, pour l’heure, le plus urgent était de sortir de ce maudit piège de vitres. Vraiment, Victor détestait cette distraction qu’il trouvait parfaitement absurde.


Bien vite, le gamin tourna en rond, se désespérant de trouver une issue à cet enfer. N’apercevant plus les siens, il en conclut qu’ils avaient trouvé la sortie ce qui était loin d’être le cas. Après de longues minutes infructueuses, de dépit et de rage le gamin se mit à pleurer, regrettant autant ses parents que la possibilité d’aller s’amuser ailleurs quand il entendit une petite voix à ses pieds.


Un renard en peluche, un de ces trophées qui se gagnent à la loterie ou bien au tir à la carabine, gisait là sur le sol. Victor se pencha pour le ramasser et aussitôt l’animal se mit à lui parler : «  S’il te plaît, apprivoise-moi et dessine-moi un mouton. Je te montrerai ton chemin. Je suis ta bonne étoile ! » L’enfant souffla sur une glace, sur la buée formée ainsi il traça un mouton qui bien vite s’effaça. La peluche, émue, le remercia en lui offrant 6 tickets pour des attractions de son choix.


Sorti du labyrinthe et enfin seul dans cette grande foire, le gamin put à son gré choisir des attractions, loin des interdictions ou des restrictions de ses parents, toujours inquiets de sa sécurité. Ayant sans doute besoin d’un prétexte, il se dirigea vers la grande roue, histoire de profiter de la vue panoramique pour retrouver les siens.


Puis oubliant cet alibi inutile, il poursuivit son périple festif. Il aimait les sensations fortes, tour à tour les montagnes russes, la chenille, le train fantôme, les auto-tamponneuses et le ranger kamikaze : une attraction qui lui mit l’estomac en capilotade. La nuit était tombée depuis longtemps, Victor se rappela enfin que ses parents lui avaient donné rendez-vous devant le manège de chevaux de bois, une drôle d’idée qu’il n’avait pas retenue.


Il s’y rendit, le manège tout comme la foire était désert pourtant il tournait encore. Son renard lui souffla à l’oreille : «  Il convient parfois de garder son âme d’enfant. Monte donc sur le manège ! » Ce qu’il fit pour retrouver ce bonheur simple de tourner en rond tranquillement. Pendant ce temps, après de longues recherches vaines, au désespoir, pensant au pire, un enlèvement ou un accident, les parents se rendirent dans la caravane de la voyante.


Dame Irma comprit immédiatement l’angoisse de ces derniers clients. Elle frotta sa boule de cristal, se concentra avant que d’entrer en relation télépathique avec Victor. La bohémienne décrivit étape par étape le parcours du petit garçon abandonné à lui-même. À chaque fois, les exclamations des parents précédaient toujours des questions sur son état après de telles émotions.


Enfin la voyante en arriva à la dernière étape. Elle leur dit qu’elle voyait le petit garçon sur un cheval de bois, discutant avec un renard en peluche. Cette fois, les parents jugèrent que la dame les menait en bateau. Ils payèrent la séance, persuadés qu’ils avaient été leurrés. Malgré tout, ils se dirigèrent, faute de mieux, vers le dernier manège allumé : le carrousel.


Irma avait bien vu, ce qui est la moindre des choses pour une voyante. Leur cher petit était juché sur un cheval de bois qui montait et descendait au son d’un orgue de barbarie. Il riait aux éclats, insouciant en dépit de l’heure tardive. Il parlait à un animal lové dans ses bras, une de ces peluches qui se gagnent au stand de tir. Quand il vit ses parents Victor descendit de sa monture pour sauter dans leurs bras. Ces retrouvailles étaient si émouvantes que le renard lui aussi essuya une larme.


La réalité reprenait ses droits. Le père enfin rasséréné se mit soudain à examiner la situation. Il était minuit passé, il n’y avait plus un seul moyen de transport. Comment allaient-ils pouvoir rentrer dans leur quartier, fort éloigné de la foire ? Madame se mit en colère, réalisant soudain qu’ils allaient devoir traverser la ville à pied quand le renard s’adressa à eux : « Ce n’est rien ! Montez donc sur le manège et vous verrez ! »


En dépit de l’absurdité de la situation : une peluche leur demandant de monter sur un manège réservé aux petits enfants, les parents obtempérèrent sans hésitation. Victor quant à lui remonta sur son cheval fétiche. Le manège s’arrêta de tourner, les lumières et l’orgue s’éteignirent. Il y eu un long silence puis un grand vacarme, des hennissements de chevaux.


Les chevaux de bois quittèrent le plateau du manège, se métamorphosèrent en fiers coursiers qui sans plus tarder se mirent en chemin en un trot majestueux pour emmener leurs cavaliers jusqu’au pied de leur immeuble. Ce fut le plus beau des voyages, la plus extraordinaire des attractions. Quand Victor et ses parents descendirent de leurs montures, ils se tournèrent vers la porte d’entrée de la résidence pour y saisir le code sur un clavier lumineux.


Il y a un bruit, la porte libéra sa gâche, le père poussa la lourde porte. Ils allaient entrer quand ils voulurent regarder une dernière fois les chevaux de bois. La rue était déserte. Avaient-ils été l’objet d’une hallucination ? Non pas, dans les bras de Victor, le renard en peluche leur glissa cette dernière phrase avant que de se taire à tout jamais : «  On ne voit bien qu’avec le cœur ! »

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