vendredi 31 décembre 2021

Et surtout la santé !


 

Les Vœux en question …






Pourquoi ne fait-on pas vœu de décence le soir de la Saint Sylvestre ?

Parfois ne vaut-il pas mieux un aveu sincère que des vœux hypocrites ?

Faut-il être au lit pour formuler un vœu pieux ?

Pourquoi pense-t-on magiquement qu'un jour de plus peut changer notre destin ?

Quand on nous promet la Santé, est-ce de la prison dont on parle ?



Les cotillons sont-ils indispensables au réveillon sylvestre ?

Combien de microbes sont-ils ainsi échangés à minuit ce jour-là ?

Minuit : Est-ce l'heure de l'intime ?

Pourquoi notre président se pense-t-il obligé de jouer les hypocrites à la télévision ?

La liesse universelle doit-elle nécessairement enrichir les opérateurs téléphoniques ?




Les agences de notation oseront-elles nous promettre la prospérité ?

Au douze coups de minuit, n'est-ce pas possible qu'on m'oublie un peu ?

Deux réveillons en une semaine, veut-on nous préparer aux vaches maigres à venir ?

Est-ce prémonitoire que cette année débute par une bien vilaine migraine ?

À la rigueur, peut-on faire vœu d'austérité ?



Pourquoi tous ces vœux de bonnes damnées m'atterrent ?

Le serpentin est-il venimeux ?

Pourquoi les dames mettent-elles une robe de soirée pour commencer l'année ?

Qui y-a-t-il écrit dans les bulles de Champagne ?

Faut-il trinquer un soir quand on va trinquer toute l'année ?



De quel calendrier dispose notre président pour faire ses vœux un mois durant ?

Mais qui paie toutes ces cérémonies officielles de vœux qui ne servent à rien ?

Nos élus ne pourraient-ils pas faire enfin vœu de sobriété au lieu de se rincer à nos frais ?

Pourquoi nous promettre la Lune quand notre chandelle est morte ?

Quel est votre vœu le plus cher ? Hélas, je n'en est pas les moyens …



Quand un politique prétend vouloir exaucer nos vœux, pourquoi sourit-il ?

Le pire en janvier n'est-il pas la première journée de travail ?

Ne dit-on pas : qui trop embrasse mal étreint ? Alors, pourquoi ai-je le feu aux joues ?

Est-ce parce que les élections approchent que le président fait vœux de toutes nos voix ?

Pourrais-je vous avouer un vœu de faiblesse ?

 




Pourquoi est-ce seulement la nuit de Saint Sylvestre que les langues de belle-mère ne médisent pas de nous ?

Santé, Prospérité, bénédicité … N'y a-t-il pas de rimes en « ard » ?

Faut-il marcher sur la tête pour entrer dans la nouvelle année avec un chapeau pointu ?

Ne peut-on pas se planter en proposant un vœu pieux ?

Ne faudrait-il pas mieux dire « Je veux » ?



Que peut-on souhaiter à un mourant ?

Une nonne peut-elle prononcer d'autres vœux ?

Est-il souhaitable de suggérer l'improbable ?

Qui a osé : « Le président dit je vœux et le peuple lui répond, nous votons ! » ?

Peut-on s'exonérer de vœux couteux ?



Pourquoi n'a-t-on jamais songé à une mère Sylvestre ?

Pour remplacer ces belles paroles, des étrennes ne seraient pas pas plus judicieuses ?

Peut-on étrenner une année sans vœux ?

Est-il facile de marcher sur des vœux ?

Puis-je garder le vœu de la faim pour la bouche bouche ?

 


 

jeudi 30 décembre 2021

Prenez et buvez !

 

Quand Loire entre en cène






Soucieux de rétablir la vérité, désireux de remonter aux sources de toutes choses, je me dois de vous révéler la vérité vraie sur un événement qui a changé la face du monde. Tout commença, il y a fort longtemps, sur les bords de la Loire, comment pourrait-il en être autrement ? Nous sommes dans les années cinquante avant celui qui se fit pasticheur, bien malgré lui. Les Romains viennent de mettre le pied et le glaive le long de notre rivière ….


Mais avant d'aller plus loin, il me faut dévoiler ce que furent mes archives. J'ai découvert, dans une « boire » de Loire : un bras mort, depuis bien longtemps vide d'eau, des manuscrits abandonnés dans un vieux coffre marinier. Depuis, ces textes sont connus sous le nom de manuscrit de la « boire » morte. C'est d'eux que je tire cet épisode d'une histoire volontairement laissée dans l'oubli pour des raisons que vous comprendrez facilement. Je vous en laisse juges !


Depuis de longues années, chaque solstice d'été, les représentants des mariniers de Loire se réunissaient en un lieu tenu secret, pour un grand banquet au cours duquel ils édictaient des règles de bonne navigation, des principes de solidarité et d'entraide pour tous les bateliers de la rivière. Ils venaient de l'amont et de l'aval, de Condevincum (Nantes) à Rodumna (Roanne) en passant par Nevirnum (Nevers) et Cenabum naturellement.

Chaque année ils désignaient celui qui parlerait en leur nom devant tous les chefs des peuples vivant en bord de Loire. Leur confrérie réunissait des pêcheurs (déjà) et des mariniers en nombre égal. Ils étaient traditionnellement douze, regroupés en un grand chapitre autour de la table, afin d'édicter les règles de navigation, les obligations d'entraide, le code d'honneur de tous ceux qui circulaient et travaillaient alors sur la Loire. Ils se faisaient fort d'imposer leur volonté tout du long de la rivière et de ses affluents.


Cette année-là, pourtant, rien se se passa comme à l'accoutumée. Les Romains avaient envahi les différentes tribus celtes. Le pouvoir avait imposé, par la ruse et le mensonge, la présence d'un treizième homme : un certain Lucas, homme à la botte du pouvoir, venu de Lugdunum, une ville qui n'a rien à voir avec notre Loire.


Le nonce Nilate, chef romain couard et calculateur, l'avait mandaté secrètement pour briser la force de cette confrérie dangereuse qui divulguait des idées de solidarité et de charité qui débordaient bien vite le cadre de la rivière. Il fallait mettre un terme à cette philosophie du partage et de la compassion qui pouvait s'avérer néfaste au pouvoir en place : brutal et égoïste.


Comment Lucas parvint-il à se faire admettre dans cette assemblée secrète ? Les manuscrits ne le disent pas. Toujours est-il qu'en ce repas sacré, ils étaient treize à table et qu'une étrange ambiance régnait parmi les convives. Quand il fallut désigner le maître de cérémonie, c'est un certain « Marius », fils d'un charpentier de marine qui avait proposé tant d'innovations aux bateaux d'alors, qui fut élu en souvenir de son glorieux père.


Marius était le plus doux des hommes. Il aurait donné sa chemise à plus malheureux que lui et aurait partagé son manteau en deux s'il avait croisé un mendiant grelottant de froid. Il était pêcheur, d'une rare adresse et avec lui, on avait le sentiment qu'il était capable de multiplier les prises. Jamais son filet ne revenait à vide et il y avait toujours une part pour les pauvres et les malades.


Un jour, il avait réalisé un prodige. Un marinier s'était noyé et, par un étrange baiser, il l'avait ramené à la vie. Son nom était désormais connu tout du long de la Loire. Il était vénéré des humbles et craint des puissants. Nilate voyait en lui un dangereux subversif, un homme capable de reprendre le flambeau que venait d'abandonner, bien malgré lui, un certain Vercingétorix. Il était plus redoutable encore, car il prônait la paix et la concorde entre les hommes.


En ce repas annuel, un étrange sentiment animait les convives. Quand Marius partagea la miche de pain noir et offrit à chacun une coupe de ce fameux breuvage qui leur venait de Rome (seul bienfait de l'envahisseur) , il leur tint un discours d'une rare puissance.


« Mes amis, mes frères de la rivière. Nous vivons une époque trouble où des forces étrangères veulent imposer leurs conceptions cupides. Sachez rester soudés et solidaires. Que rien ni personne ne vienne jamais entraver l'amitié qui unit le peuple ligérien. Notre Confrérie des gens de Loire doit perdurer au-delà de ces temps obscurs. Elle fédérera les hommes de bonne volonté. Chaque fois que vous vous retrouverez, vous ferez un grand et beau repas en mémoire de moi et en souvenir de cette promesse éternelle ! »


C'est le moment que choisit le traître Lucas, l'affreux vendu à l'envahisseur, qui, pour quelques pièces en or, dénonça « Marius » et sa troupe marinière. Une cohorte instruite par l'infâme, arriva et s'empara du meneur qui fut conduit à Nilate qui faisait ses ablutions. Il avait horreur d'être dérangé en ce doux moment et excédé, le nonce envoya notre pêcheur de Loire se faire pendre ailleurs.


Lucas fut accroché en haut d'une vergue, les bras en croix. Il y souffrit un long martyre sans un soupir. Voilà la triste fin du premier grand personnage de la Loire qui voulut fédérer les énergies et développer un idéal de fraternité pour tous les gens de Loire, leurs femmes et leurs enfants. La confrérie des marchands serait, bien plus tard ,l'expression de la résurrection des valeurs de ce glorieux aîné.


Pourtant ce message étrange fit son chemin. En empruntant la route de l'étain, il arriva bien vite jusqu'en Palestine. Quelques années plus tard, un autre fils de charpentier reprit une grande partie de ce discours et s'adressa, lui aussi, à des pêcheurs ou des moutons égarés. On sait ce que devinrent ces belles idées qui étaient nées, quelques années plus tôt, sur le bord de la Loire... mais vous n'êtes pas obligés de me croire ….


Évangéliquement vôtre.


 


mercredi 29 décembre 2021

Le troquet du Port

 

Le troquet du Port





Quand tu es triste, copain de bord

Que tu cherches une main tendue

Ne crois pas que tu es perdu

Rejoins-nous au troquet du port


Il y a des gars de passages

Des fidèles accrochés au bar

Des amis, des gens de hasard

Des marins au bord du naufrage


D’autres matafs arriveront

Gars du pays ou étrangers

Compagnons de mer en bordée

Du capitaine au moussaillon


La bière le rhum coule à flot

De tant de chopes on est saoulé

Des cœurs se lient en amitié.

Fraternité du matelot


« Oh tavernier on veut danser

Avec ces filles au blanc jupon

Joue donc un air d’accordéon

Ces dames nous feront rêver



Par tes chansons de tous pays

Nous naviguerons avec elles

Avec ces belles demoiselles

Nous échouerons au paradis


En quittant le troquet du Port

Aux premières lueurs du jour

Les yeux rougis de tant d'amour

On se sent triste et seul à bord


Dans chaque port est un endroit

Un lieu si chaud un peu blafard

Un repaire qui tient lieu de phare

A tous ces hommes qui ont froids


Quand souffle le vent du large

Une lanterne bouge encore

C'est celle du troquet du port

Qui t'accompagne dans ton voyage

 


 

mardi 28 décembre 2021

Fonder une famille en Orléans !

 

Il était une oie …






Mon petit Pitchoune, écoute cette histoire. Elle est vraie et en dit beaucoup sur les hommes. Elle s’est passée près de chez nous et je te prie de te faire ton opinion, loin des préjugés et des idées reçues.


Il était une oie, une belle dame blanche qui se posa sur la Loire. Elle en avait assez de la grande migration et laissa ses congénères poursuivre leur chemin. Elle décida, bravant les lois de la nature, de se faire sédentaire et de fonder une famille avec un beau mâle du pays. C’est ainsi que l’on fait souche songeait celle qui venait de si loin.


Nous allons suivre ici les vicissitudes de notre oie volage ! Repoussant à jamais le long voyage vers Alaska, notre belle demoiselle désirait vivre le reste de son âge, sur les eaux douces de la Loire. Elle allait jeter son dévolu sur l’un des autres oiseaux qui vivent en ce pays qu’on appelait autrefois la Vallée des Rois.



La dame, convaincue de son pouvoir de séduction se mit en demeure de séduire le maître de ces lieux. Ce fut au Balbuzard, ce beau et grand rapace pêcheur qu'elle fit les yeux doux. Quand on mesure 65 cm, on rêve d'une descendance de belle taille. Hélas, notre ami ne vit pas d'un bon œil cette éventuelle compagne. « Je crains madame, de ne pas pouvoir unir ma destinée à la vôtre. Si nous avons la même taille, vous pesez bien moins? que moi. » Voilà bien des considérations de mâle prétentieux se dit-elle, en s'en allant plus loin !

Elle retint la leçon du poids et de la taille pour aller faire sa demande à un majestueux cygne. « Veux-tu devenir mon mari ? » lui demanda-t-elle sans préambule, la dame était directe. L'animal interloqué examina sa prétendante avant que de rejeter sa proposition. « Non, ma chère, notre union ne serait pas prudente ! Les hommes d'ici ont oublié que nous les cygnes étions autrefois des plats de fête. Mêler ma destinée à une oie pourrait réveiller ces vilaines manières culinaires. Allez voir de possibles époux qui n'ont pas peur des fourneaux ! » Elle s'en alla déconfite, l'argument lui ayant provoqué des sueurs froides !

Elle fit alors la cour à un étrange oiseau qui faisait le pied de grue, immobile près de la berge. « Noble pêcheur aux aguets, si ton bec est aussi long que ton aiguillette, je devine en toi un reproducteur puissant qui pourrait, si l'envie t'en prenait, me donner bien des poussins à l'allure altière ! » Le héron, puisque c'est de lui qu'il s'agit, rejeta la proposition qu'il trouva fort cavalière. « Madame, ni l'habit ni le bec ne font le moine ! Comment pourriez-vous vous percher à la cime de l’arbre dans ma héronnière ? Mon pauvre nid ne supporterait pas votre poids. » Non vraiment se dit-elle, les oiseaux de ce fleuve-là ne savent pas cacarder aux belles dames !



Elle avait subi trois échecs qui la rendaient fort triste. Mais toujours désireuse de vivre ici, elle décréta de briser les lois des apparences. Elle se précipita vers un oiseau en tous points différent d'elle, le cormoran qu’on nommait jadis, le corbeau marin. « Mon bel ami, voulez-vous être mon concubin ?» La demande était franche, la réponse le fut tout autant. « Ma belle dame au plumage si blanc, je suis fort honoré que ma parure noire ne vous ait pas effrayée. J'accepterais volontiers la demande si un petit détail ne venait à me contrarier. Les hommes ont perdu l'habitude de gober mes œufs, c'est désormais pourquoi, nous, les cormorans, sommes si nombreux sur les bancs de sable. Notre union pourrait réveiller bien des envies. On ne fait pas d'omelettes sans briser nos vœux ! ».


Cette fois, l'oie reconnut que la remarque était judicieuse, elle alla chercher sa bonne fortune ailleurs ! Le bon accueil du Cormoran lui avait redonné du courage. Elle se mit en quête d'un nouveau compagnon. C'est vrai que les oiseaux ne manquent pas en cette Loire. C'est à n’en point douter un paradis pour eux. Dans le lot hélas, nombreux étaient ceux qui bien que d'excellente compagnie, n’était pas taille à se marier à elle.


La mouette se rit d'elle, la Sterne consternée lui apprit qu’elle ne passait pas l’hiver ici, les autres se montrèrent plus courtois. Le gravelot ne lui tint aucun propos graveleux, la guifette se fit aimable, le grèbe habituellement castagneux se fit charmant avec elle. Le chevalier lui proposa d’être son servant, le vanneau lui parut fatiguant, la bécassine un peu sotte et l'aigrette, bavarde infatigable, se prenait pour gazette du fleuve !



Hélas pas de compagnon en vue ! Le temps passa, la fin de la saison des amours la laissa célibataire. Pourtant la demoiselle ne changea pas sa détermination première. Au printemps suivant, elle en est certaine, elle trouverait oiseau à marier. L’oie n’était pas demoiselle à baisser les ailes, il lui en fallait bien plus ...

En attendant ces jours meilleurs, voilà qu'il fit sur notre région un froid de canard. Les eaux de tous les étangs, les fosses et les petites rivières se figèrent, prises par le gel. Même la Loire charriait en maints endroits de magnifiques fleurs glacées. Heureusement, le courant du fleuve permettait sous notre pont Royal de garder un mince filet d’eau mouvante.

C'est là que tous les oiseaux du pays se serraient les ailes pour se tenir au chaud. Arrivèrent sur la Loire des oiseaux peu habitués à y séjourner. Des barbaries, des colverts et surprise pour notre oie, un magnifique jars domestique sur lequel elle jeta son dévolu. Ils se plurent immédiatement, l'animal de ferme lui trouvant caractère plus trempé que les femelles de sa cour. Ils décidèrent d'unir leurs destins. Quand la débâcle arriva, la fonte de la glace suivit l'embâcle, tous les visiteurs s'en retournèrent chez eux, le jars quant à lui resta près de sa belle dame blanche sur les rives d'une petite île boisée.



Vinrent bien vite les beaux jours et leurs amours réjouirent ceux qui eurent le bonheur d'assister à leur parade nuptiale. Jamais on ne vit spectacle plus charmant ! De beaux enfants finirent par briser leur coquille, ils étaient les fruits qu'on croyait bénis de cette union ligérienne.

Mais les hommes viennent parfois se mêler de ce qui ne les regarde pas. Des savants pensèrent qu'il y avait là union contre nature, risque de modifier les espèces. Il en va pour les animaux comme pour les hommes, le métissage parfois ne plaît pas à tout le monde. La première portée fut tuée sans ménagement par ces méchants gardiens de l'ordre normal. La dame blanche et son jars eurent pu se désespérer d’un tel crime. Au contraire, ils trouvèrent la force de recommencer en mémoire de leurs premiers enfants.

L'amour étant plus fort que le dictat des hommes, le jars et notre oie sauvage allèrent se réfugier loin de la ville. Ils ne renoncèrent pas, de leur union naquirent de nouveaux oisillons que nul ne vint occire. Monsieur et Madame Oie étaient les plus heureux du monde. D’autres oies sauvages, des bernaches vinrent se mêler à leurs enfants pour démontrer aux hommes que les mélanges sont dans la nature.



Maintenant sur la Loire, vous pouvez admirer une nouvelle espèce, fruit de nombreux croisements. Cette histoire n'est pas une menterie, prenez la peine de regarder autour de vous, il y a en Orléans, plusieurs bandes de ces volatiles sur la rivière. On n'entrave pas les amours, personne ne peut s'opposer à la puissance des cœurs qui battent l'un pour l'autre. Retenez la leçon, elle vaut pour les oies comme pour les hommes.


Nuptialement leur.

 


 

lundi 27 décembre 2021

Les trois petits cochons…

 Ce monde est trop injuste.

 

 



Un verrat un jour convola avec une truie. Une belle histoire d'amour qui trouva son aboutissement dans la naissance de trois petits porcelets, mignons à croquer. Les autres couples se gaussèrent d'une portée si petite, dans l'espèce, il était de coutume de donner naissance à une flopée de bambins. La truie s'en moquait éperdument, elle savait qu'elle allait pouvoir mieux se consacrer à leur éducation. Il était d'ailleurs grand temps que ses congénères pensent elles aussi, à la régulation des naissances. Quant à papa verrat, il se doutait que les moqueries provenaient encore d'une entourloupe provenant des humains, si prompts à se payer la tête des cochons.


Il se mit en quête de comprendre ce qu'il y avait de si drôle dans la naissance de trois petits cochons. Il devait y avoir un loup, mais comment le savoir quand on ne dispose pas de la télévision dans la porcherie. Vraiment, l'éleveur était fort mal nommé, nul souci d'éducation dans son travail, la simple volonté d'un engraissage forcené. Le couple décida de mettre les bouts, fuyant dans le même temps les moqueurs et le gaveur.


La petite famille prit la poudre d'escampette un jour de contrôle vétérinaire. Une opportunité qui ne se présente pas souvent, il fallait la saisir. Les gamins avaient déjà le jarret ferme, ils pourraient tailler la route sans problème. Le verrat qui était un remarquable reproducteur avait eu le privilège de quitter maintes fois l'exploitation pour aller saillir contre son gré, des femelles isolées dans des fermes sans mâle. Et dire que ce sont les humains qui nous traitent de gros cochons, se serait dit en aparté ce pauvre géniteur malgré lui.


Il avait repéré quelques chemins de traverse, des sentiers qui longent la grande route à l'abri des regards. Il prit la tête de l'expédition tandis que sa truie fermait la marche pour voir si les petits ne se prenaient pas les pieds dans des obstacles. C'est à la queue leu-leu qu'ils progressaient ainsi pour gagner le maquis. Mais si pour un animal ordinaire, se suivre ainsi ne pose aucun problème, pour les cochons il en va tout autrement. Ils avaient la fâcheuse tendance à tourner en rond et sur eux-mêmes à cause précisément de la forme de ladite queue.


Comprenant le péril, maman truie conseilla aux petits de marcher côte à côte. Une bonne solution qui s'avéra particulièrement efficace. Ils purent ainsi griller les étapes et se trouver au plus vite en territoire sécurisé. C'est alors que débuta la lente éducation des petits en qui les parents voyaient les futurs nouveaux prophètes d'une révolution porcine. Ils fondaient en effet de très grands espoirs en ces gamins à la tête bien faite et aux oreilles attentives.


La mère se chargea des cours de maintien. Elle enseigna à ses rejetons un port de tête altier, une diététique irréprochable pour ne pas faire trop de lard, une hygiène corporelle exemplaire pour repousser les remarques dégradantes de ceux qui vont debout sur leurs pattes arrière. La cuisse légère et la tête bien faite dans un corps sain, tel était l'esprit de cette éducation.



Monsieur mit en garde les petits sur le vocabulaire qu'il importait de ne pas mettre entre toutes les gueules. Ainsi les adjectifs : « Gros -Vieux - Sale » furent prohibés. Des expressions furent elles aussi mises au ban : « Tour -Tête - Saigner - Manger ». Les petits apprirent désormais qu'ils avaient acquis un peu de culture qu'il fallait qu'ils se revendiquent Porc pour prendre le large et s'octroyer de la distance vis à vis d'une réputation parfaitement injuste.


La Truie se chargea de la dimension spirituelle de la formation de ses petits porcelets. Elle les mit en garde contre les superstitions qui collaient à la peau de leurs congénères. Elle leur inculqua les valeurs de la tolérance et l'ouverture d'esprit. Elle leur enseigna la mythologie de la Grèce Antique, une connaissance que doit maîtriser tout cochon qui se respecte.


Le Verrat pensa nécessaire de leur donner les rudiments de l'art culinaire, pensant ainsi leur éviter de se retrouver sur le grill. C'est en virtuose de la chose qu'il les initia à la cuisine végétarienne, seule garante de leur tranquillité future. Ils se firent du reste tous trois les plus grands spécialistes des préparations à base de truffes tant ils avaient l'odorat développé.


Un jour vint où les deux parents pensèrent qu'il était temps de laisser partir leurs chers petits qui étaient devenus grands et savants. Ils savaient qu'ils allaient se faire du mauvais sang, que l'aventure pouvait tourner en eau de boudin mais c'était là le risque à courir et l'incontournable loi de la nature. Ils quittèrent le maquis pour tenter de conquérir le monde.


Bien mal leur en prit. Les humains étaient sur les dents, ils connaissaient une de ces terribles disettes qui troublent leur capacité de raisonnement. En dépit des cris de protestations des trois malheureux porcs, ils passèrent à la casserole sans autre forme de procès.


Quand les parents apprirent ce terrible épilogue, ils en perdirent le goût de vivre. Ils allaient dépérir quand la pauvre mère eut une idée pour que jamais ne se reproduise pareille horreur. Elle lança sur le réseau une campagne médiatique, créa un hashtag et fit la Une des médias. Bientôt des millions d'animaux suivirent son initiative et tous se joignirent à elle derrière ce slogan porteur de la rébellion animale : « #Dénonce ton humain ! ».


Il n'est pas dit que le monde fut meilleur pour autant, il en gagna cependant en sérénité.



dimanche 26 décembre 2021

Le cimetière de tous nos vieux bateaux

 

Le cimetière des bateaux






Ils sont couchés sur le flanc

Avec du vague à l'âme

Un adieu à l'Océan

Des regrets et des larmes

Plus personne ne viendra

Y respirer les embruns

Finis les coup de tabac

La pêche au petit matin





C'est le cimetière

De tous nos vieux bateaux

Un petit coin de terre

Mouillé de bien peu d'eau

Une décharge honteuse

Pour ces épaves oubliées

La mort insidieuse

Des navires échoués

 



La rouille pour maîtresse

Dans un désordre englué

L’effrayante détresse

D’une aventure achevée

Plus de marin sur le pont

Ni de vagues sur la coque

La quille touchant le fond

Du capitaine haddock

 



Le vent s'engouffre encore

En de lugubres plaintes

En un sinistre décor

Pour ma pauvre complainte

De leur fierté d'alors

Il ne reste plus rien

Égarés loin de leurs ports

Pour un ultime chagrin




Ces cadavres sans amour

Aux squelettes désossés

Déposés là pour toujours

Dans un lugubre fossé

Eux qui se rêvaient jadis

Comme de magnifiques coursiers

Faisaient alors le délice

De tous leurs bateliers



Bientôt au programme de la Chorale

Les Fous de Bassan du Pouliguen

samedi 25 décembre 2021

Les gros mots.

 

Divagations …






On en a plein la bouche ; ils surgissent au moindre incident, au plus petit désagrément, sans retenue, sans distinction, étalant au grand jour devant vos proches, vos amis, vos collègues, le peu de maîtrise que vous avez sur vos émotions. Ils vous dévoilent bien plus que tous vos comportements ou vos paroles ordinaires : ils sont si spontanés qu'ils n'avancent jamais masqués.


Les gros mots ne donnent jamais dans la dentelle ; ils se moquent des conventions, de l'étiquette et des usages. Ils claironnent, sonnent comme une charge héroïque, claquent tel un coup de fouet que vous vous prenez sur les doigts. Vous pouvez vous en mordre la langue ; ils sont sortis du fond du cœur ou d'autres parties de votre anatomie. Les gros mots sont scatologiques, graveleux, impertinents, vulgaires, au gré de votre rage, de votre éducation ou de votre registre intime.


Il y a les excrétions soudaines : les jurons si brefs que rien ne peut retenir. Ils manquent de distinction, c'est bien là la volonté de ce subconscient qui prend les commandes. Ils vous ramènent à la petite enfance, à ce cher Pipi-Caca qui faisait le délice de vos parents. Quand vous grandissez, ils deviennent tout à fait déplacés ; il est des fonctions naturelles qu'il ne faut jamais mettre sur la table.


Dans cette belle catégorie si chère à l'ami Cambronne, le délicat Crotte atteste d'une volonté de mettre la langue sous le boisseau de la respectabilité. Ceux qui parviennent à éviter la grosse commission au profit de ce petit trait de colère, démontrent à tous leur préciosité. Ils nous en bouchent un coin ! Ils dévoilent aussi la capacité à se retenir, à ne pas laisser aller leurs sphincters. Ils méritent un grand coup de chapeau !


Puis il y a ceux qui supposent un adjectif pilote, un marqueur spécifique afin de donner de l'ampleur au juron. Le célèbre « Pauvre con » présidentiel est de ceux là. Le choix de l'adjectif n'est jamais neutre, il en dit bien plus sur nos peurs, nos phantasmes, nos angoisses que ce Con final qui tient davantage du triangle rouge signalant le danger. Gros, petit, vieux, grand et naturellement pauvre tiennent la corde de l'expression la plus usuelle. Faites votre choix et mesurez à quel point ils en disent beaucoup sur ce que vous redoutez le plus.


D'autres vont puiser dans l'héritage classique le juron qui leur donnera cette classe que le vulgaire est incapable d'avoir. Sacrebleu, Morbleu et autre Cornegidouille sont si précieux qu'ils en paraissent fictifs, plaqués là par pédanterie. Je me méfie toujours de ceux qui s'interdisent à ce point la spontanéité pour plier leur langue de l'exaspération. Ils sont aussi peu fiables que leurs exacts opposés, les rois de la ponctuation vulgaire.


Que ce soit culturel-la belle excuse- ou bien par manque total d'éducation langagière, le recours systématique au gros mot pour remplacer un point d'exclamation est parfaitement insupportable. C'est la plus certaine manière d'attester un niveau de réflexion qui se situe bien bas. Le chapelet de gros mots est une croix à porter, un chemin semé de cailloux et de bouses. Il sent si mauvais que vous vous écartez au plus vite de ce triste locuteur.


Le gros mot a besoin de subtilité et de cohérence. La redoutable tendance qui veut désormais que les jeunes filles se plaignent qu'on leur casse, pète ou bien prise un attribut purement masculin atteste que cette société perd non seulement le sens de la nuance mais tout autant celui de la morphologie. Est-ce un des premiers résultats de la théorie du genre ? En tout état de cause, cette éjaculation langagière est d'une totale indignité …


Le gros mot marque notre évolution sociale. Il sort curieusement du registre de nos chers hommes et femmes politiques, à de rares exceptions, ce qui démontre à l'évidence la plus parfaite insincérité de leurs propos et prestations. La langue de bois est une expression moribonde, une langue morte sans gros ni grands mots, sans vie ni soubresauts émotionnels. Il serait urgent de se prémunir contre ces gens qui ont ainsi évacué le sel de notre langue …


Les gros mots méritaient que je leur consacre un billet. Ils ont besoin que nous les réhabilitions, tout en exigeant d'eux une modération de bon aloi. Le gros mot est une pépite : c'est sa rareté et sa brillance qui en font la valeur. Il me semble nécessaire, dans ce monde sans repère, de proposer une éducation à la subtilité du gros mot. Je constate, tout autour de moi, de telles dérives que cette suggestion s'impose à ma réflexion de pédagogue en retraite. Cette fois, à n'en point douter, je suis entré dans la grande cohorte des vieux cons !


À contre-temps



Versons une petit lame

  Pauvres couteaux Versons une petit lame Pour tous que nous avons perdus À chaque fois ce fut un drame Ô pauvres comp...