vendredi 30 octobre 2020

L’étonnant destin d’une citrouille.

 

De la soupe à la grimace.

 





Une citrouille fit un jour la grimace quand son jardinier de géniteur lui apprit qu’elle terminerait ses jours dans une soupe. La dame, dans sa belle robe orange en fut toute contrariée. Elle qui était la plus belle, la plus grosse, la plus imposante en somme dans le jardin, aurait aimé une place de roi à la table de son maître. Cette perspective lui restait en travers de la gorge. Elle n’entendait pas rester ainsi les tiges ballantes, il lui fallait agir sans tarder pour échapper au brouet.


La citrouille avait pour amie, la petite fille du jardinier. Une adorable petite Margot qui, avouons-le ne goutait guère aux potages. Gourmande, la gamine était plus versée sur les desserts. Elle comprit l’angoisse de ce légume pour lequel, elle avait une affection toute particulière depuis qu’on lui avait raconté les aventures de Cendrillon.


Que faire pour venir en aide à cette belle cucurbitacée ? La petite aimait à nommer ainsi les citrouilles à ses camarades de classe afin de leur montrer toute l’étendue de son savoir végétal. Les enfants sont ainsi, ils aiment à avoir des mots plein la bouche alors que les adultes ne songent qu’à y glisser des friandises sans saveur.


Margot se mit en cheville avec la belle citrouille pour lui épargner une mort infâme dans une marmite de sorcière. Sa grand-mère en effet utilisait encore une énorme cocotte en fonte qui effrayait la petiote. Elle imaginait que sa mamie y confectionnait des potions maléfiques, des brouets diaboliques d’autant que si ce n’était pas des soupes, c’était des plats en sauce, le plus souvent avec du vin, qui lui retournaient l’estomac.


Pire encore, sa vieille Mâ comme elle l’appelle utilise un balai en fibres noires de piassava, un palmier qui pousse au Brésil alors que la citrouille vient elle du Mexique. Margot aime à voyager en cherchant l’origine des choses ce qui ne l’empêche nullement d’avoir des superstitions et des peurs bleues. Elle doit absolument sauver le beau légume et éviter par la même les sempiternelles disputes quand il s’agit de manger sa soupe.


C’est dans un vieux grimoire que la petite a découvert une bien étrange histoire de fêtes païennes où l’on s’amusait à se faire peur. Très en avance pour son âge, Margot pensa qu’avec les païens il n’y aurait nul risque d’être accusé de blasphème. Elle pouvait agir tout à sa guise sans risquer l’anathème. C’est ainsi qu’elle grima sa citrouille en pomme bleu d’Australie, un des fruits qui la font voyager dans ses livres de botanique.


La citrouille fut sans plus tarder peinte toute en bleu, couleur qui avait de quoi rebuter une cuisinière, fut-elle un peu sorcière comme sa grand-mère. Ce fut les cris d’orfraie de son grand-père quand il découvrit la farce qui lui indiquèrent qu’elle n’avait pas manqué son coup. Le pauvre homme crut à l’intrusion d’une nouvelle maladie, un mal mystérieux qui allait transformer son potager en arc en ciel ou en nuancier pour peintres amateurs.


Il en eut, le malheureux des palpitations et un sacré coup au cœur. Margot, loin d’en être effrayée songea que sa citrouille allait connaître une nouvelle destinée. La gamine aimait jouer à faire peur, elle se mit à l’ouvrage pour transformer sa camarade végétale en un monstre grimaçant dans lequel elle glissa une bougie. C’était une belle mort pour la citrouille, un départ pour l’autre monde sans finir dans l’estomac des humains.


Ce que venait d’inventer Margot eut un succès qui dépassa ses espérances. Mais les gens n’y connaissent rien et pour effrayer les petits enfants, ils se contentent de creuser la citrouille sans prendre la peine de la peindre. La peur est bleue, il n’y a pas à revenir dessus et il convient de laisser la couleur orange aux alertes de ce bas-monde. Laissons Margot à sa peinture, elle a décidé cette année de peindre six cucurbitacées en bleu, ce seront les citrouilles bleues de Halloween. Son grand père qui a compris, lui donne un petit coup de main en cachette de la grand-Mâ, ça va de soi.


Curcubitacement vôtre.

 


 

jeudi 29 octobre 2020

Le mot du jour pour les maux de l'année

 

L'étymologie a du bon






Nous n’avons plus qu’un mot en tête, une obsession qui tourne à la folie, à la plus parfaite crise de nerf. Il est utile d’aller puiser dans l’histoire, ses origines, sa construction pour mieux comprendre la dimension prémonitoire de ceux qui l’ont mis en avant. Naturellement, tout ceci s’est passé, vous devez vous en douter, à l'insu de leur conscience pour peu qu’ils disposent encore de cette ressource rare qui ne s’achète pas…


Nous voilà donc placés aux confins ! De quoi au juste, la question mériterait d’être posée s’il y avait encore des gens au cœur de ce que nous devons fuir en prenant la tangente. Mais puisque toute la population est évacuée sur la périphérie de ce vieux monde délirant, le cœur radioactif d’un système en décomposition n’est-il pas justement le système capitaliste ?


Nous retrouver ainsi ensemble - puisque le préfixe CON porte cette merveilleuse valeur - à la FIN de ce qui se trouve désormais derrière nous serait une formidable occasion de repenser cette marche en avant vers l'apocalypse à laquelle nous invitent les principaux dirigeants de la planète. Hélas mille fois hélas, si nous sommes confinés, eux sont bornés, ancienne signification de cet état dans lequel ils nous enferment.


Le glissement sémantique a donc pleinement joué son rôle. De la claustration à l’enfermement, du mouvement entravé à la privation de libertés, ils n’ont pas osé affirmer clairement leurs intentions, jouant d’un terme qu’ils pensaient plus neutre, moins choquant sans doute, plus aseptisé en tout cas, pour répondre à une attente sanitaire. Mais ils ont le doigt dans l’engrenage, ils nous ont placés au bout du bout, démontrant que notre maison commune se portait bien mieux quand cessaient nos turpitudes de l’intérieur.


En prenant cette distance imposée par l’urgence, nous entendons le chant des oiseaux, retrouvons le sens de la vie, découvrons éberlués que le temps n’est pas que frénésie. Bien sûr, il y a de lourdes contreparties car en nous privant du lien social, ils tentent de nous pousser à bout, de réduire notre capacité de compréhension et de sédition alors même qu’ils nous ouvrent les yeux sur notre aliénation passée.



Les confins de l’âme humaine sont mis à mal, c’est sans doute là que le terme est le plus adapté. Nous perdons pied avec ce réel factice dans lequel ces représentants de la machine infernale, monstre enfanté par une succession de révolutions industrielles, technologiques, numériques, nous ont attachés par une multitude de liens invisibles : emprunts, habitudes de consommation, forfaits en tous genres, désirs d’évasion onéreux, bougeotte, déplacements, goûts de luxe…


Nous étions devenus par leur bienveillante entremise des individus contaminés par la fièvre acheteuse, n’ayant pour seul modèle d'identification que le monde des paillettes. La rudesse de l’introspection présente atteste à quel point tout ceci est factice, dérisoire, misérable. Ce confin nous ouvre les yeux, nous permet de considérer que nous nous sommes enfin évadés d’une prison dorée qui nous grignotait de l’intérieur.


En attendant, il nous appartient de retrouver le vocabulaire le plus adapté à la situation. Nous sommes sans nul doute et pour nos décideurs en situation de claustration. C’est d’ailleurs pourquoi, ils ont besoin de chiens de berger pour veiller à ce que les moutons restent dans leurs enclos. Point de morsure du reste pour les contrevenants mais la seule punition qui vaille dans le système de pensée absurde : l’amende.


Tondre plus encore les moutons surtout quand ils sont pauvres, à la rue ou bien incapables de comprendre. Les ratiboiser avec une somme délirante de nature même à compromettre leur survie, conçue par des gens qui n’ont aucun souci financier. L’injustice permanente de ce mode de répression qui ne tient jamais compte des revenus du contrevenant. L’égalité devant la sanction mise en avant pour justement créer une faille, un gouffre d’iniquité devant ce système honteux. Ça confine à la plus absurde ignominie d’une caste dépourvue d’empathie.


Nous revenons au point de départ, le centre du pouvoir ignore tout de la vie de ceux qui progressivement par une effroyable force centrifuge sont rejetés sur les bordures. En imposant à tous de partager le sort des exclus en nous plaçant aux confins de leur monde, le risque est grand de nous retrouver tous en fraternité et qu’au bout de la crise, ce soit le pouvoir central qui découvre les joies de l’éjection d’un cœur qui n’a plus lieu d’être dans un monde totalement décentralisé qui retrouve les vertus de la proximité.


Périphériquement leur.


 

mardi 27 octobre 2020

Le cochon est dans le pastis

 


Une décision imbuvable.





La lutte contre le dopage devient véritablement impitoyable et chaque fédération se lance dans une chasse sans pitié contre les tricheurs, les fraudeurs, les truqueurs. La pétanque étant devenue un sport largement télévisé, candidat malheureux à l’intégration au programme des Jeux Olympiques de Paris en 2024, elle ne peut néanmoins rester éternellement affublée du fameux bob Ricard. Il fallait agir pour redorer l’image de cette merveilleuse activité qui enchante nos vacances mais pas que …


La décision a été lourde sans doute. Certains même ont trouvé que les dirigeants sportifs poussaient le bouchon trop loin. Qu’importe les polémiques, le fait est acquis, il y aura des contrôles lors des compétions de pétanque. Rassurez-vous, nos platanes des places publiques ne seront pas privés de ces offrandes, généreusement accordées par nos champions de la boule. Point n’est encore question d’analyses d’urine dans ce microcosme !


L’investigation ne portera pas non plus sur ce mauvais sang que se font nos champions tant la pression psychologique est grande durant une partie. S’ils se piquent de bons mots et de galéjades, de coups de sang et de tirades pagnolesques, nos sportifs de la terre battue n’ont pas besoin de produits complexes pour améliorer leurs performances. L’industrie chimique n’a pour l’heure pas trouvé une nouvelle niche.

Alors quel sera la teneur de ce contrôle qui pointe le bout de son nez. À bien regarder l’appendice nasal de nos lanceurs de boules, le doute n’est pas permis. La pétanque va changer radicalement d’orientation, cherchant par là même une nouvelle légitimité et une reconnaissance internationale. Ce sport tout autant que sympathique loisir va devenir un sport de ballon.

 


Je devine votre étonnement. Non, les projectiles demeureront ces petites sphères métalliques, striées ou bien lisses, devenues depuis quelque temps des armes par destination dans l’imaginaire policier. C’est d’ailleurs en songeant à tous les tracas subis par ceux qui avaient une triplette dans leur coffre que l’idée est venue à un dirigeant capable d’établir des analogies.


Le contrôle d'alcoolémie fera son entrée dans les concours de pétanque. La nouvelle est tombée, brutale, abrupte. Au camping des flots bleus, on s’interroge désormais sur l’opportunité d’organiser des concours à proximité de la buvette. Que deviendront les concurrents qui en cours de partie seront soudainement déclarés inaptes au jeu ? Quelle conduite adopter si le pointeur fait soudain défaut ou si le tireur se trouve pris par la patrouille ?


Nous devinons aisément les scènes ubuesques que va entraîner cette mesure de salubrité sportive. Se pose néanmoins la question du comment ? Faudra-t-il faire souffler les vainqueurs de chaque partie après le dernier point marqué ? Ne serait-il pas plus prudent d’attendre qu’ils aient célébré dignement leur victoire avant que de les contrôler ?


Autre point qui mérite notre réflexion, le coût de tous ces éthylotests. Qui va payer la tournée ? Ne serait-il pas plus raisonnable du reste d’imposer un cerceau automatique avec contrôle systématique à chaque fois qu’un joueur s’installe dans ce petit cercle rouge ? Là encore, cela va entraîner des frais qui ne sortiront pas du réfrigérateur.

 


Toujours soucieux d’aider mes semblables dans l’amélioration des tous petits rien qui peuvent éventuellement changer l’existence, ne serait-il pas plus judicieux de réduire le diamètre de ces cerceaux réglementaires. Aujourd’hui ils ont un diamètre de cinquante centimètres et sont en toute logique, rond comme une queue de pelle, ce qui n’insiste pas à la sobriété. Pourquoi ne pas modifier leur forme tout en réduisant leur taille pour mettre en évidence les éventuelles pertes d’équilibre du joueur buveur ? Voilà une mesure qui tomberait sous le sens !

Le cochon est donc tombé dans le Pastis. La pétanque va perdre son âme dans cette histoire. Il fallait déjà avoir la foi pour rester dans une fédération sportive qui n’a pas le label Olympique, mais à défaut de montrer pattes blanches, ce qui n’est guère possible dans ce jeu, il faudra attester d’un foie en parfait état. La truculence va déserter nos parties de boules, la mignonnette également. C’est la fin d’un monde. Le législateur vient de tuer César !

Pointeusement leur.


 

lundi 26 octobre 2020

Un menuisier de Loire

 

La couronne soulage le mal à la racine !

 





Il était une fois, en des temps très lointains, un brave menuisier de Loire qui faisait sa besogne. Du matin au soir, quand son mal sournois et lancinant le laissait en paix, il fabriquait des scutes, les bateaux d'alors et des muids, foudres ou tonneaux. Les gens disaient de lui en se moquant un peu : « En voilà un qui met de l'eau dans son vin ! ». Remarque perfide, pour cet homme si tempérant.


Nous sommes en 1578, c'est du moins ce que l'on peut penser. Les dates ne sont pas certaines et les faits un peu moins. Jean, notre menuisier, vit en aval de Blois, entre Chailles et Candé sur Beuvron. C'est un homme de la terre, artisan sérieux et apprécié qui aimait le fleuve si proche. Il se plaisait à se réfugier en un endroit qui avait sa préférence, une petite source, résurgence du fleuve et qui y revenait bien vite.


Ce lieu avait toujours été paré de mystère et de dévotion ancienne. Une pierre levée signalait un culte qui n'avait plus sa place dans le très catholique royaume de France. Jean ignorait tout de ces histoires anciennes, il aimait l'endroit, s'y sentait mieux que partout ailleurs dans le pays sans qu'il n'y voit malice ni diablerie !

 



Jean depuis fort longtemps souffrait de maux de dents à en devenir fou. Les dentistes étaient inconnus, seuls les arracheurs de dents proposaient un service radical et expéditif auquel il ne fallait pas recourir trop souvent. En bon menuisier qu'il était, il savait la valeur d'une dent et ne voulait pas s'en défaire à la légère. Alors, il souffrait en silence en serrant la source de son mal !


Insidieusement, Jean découvrit que jamais son mal ne le tiraillait quand il allait dans son petit jardin secret. Mieux, même, il comprit que lorsqu'une rage l'empêchait de travailler, elle s'effaçait comme par magie quand il allait au bord du fleuve. N'ayant pas les deux pieds dans le même sabot, Jean profita de ses escapades thérapeutiques pour sculpter une vierge à l'enfant. C'était là un talent qu'il ne voulait divulguer pour ne pas être sollicité pour une autre tâche. Il avait déjà bien assez à faire …


La Vierge terminée, Jean la laissa sur place, sans rien dire à personne. L'endroit était à l'écart du passage, il n'y venait presque jamais personne. Il continua de rendre hommage à Notre Dame tout en recherchant un peu moins de tourment. C'était un mystère qu'il ne cherchait pas à comprendre ni même à dévoiler. Les esprits d'alors étaient si vite prompts à évoquer la sorcellerie !

 



Cependant, les fuites fréquentes du menuisier intriguèrent quelques paroissiens en mal de médisance. Certains prirent même la peine de le suivre et découvrirent le pot aux roses. Jean fut sommé d'avouer le pourquoi du comment. S'il avait sculpté un bon petit diable ou un animal de nos forêts, il eut fini sur le bûcher à n'en point douter.


Mais le visage sublime de sa Vierge à l'enfant lui sauva la vie et ses espoirs de vie éternelle. On s'enquit alors des raisons de sa dévotion et il dut avouer qu'il venait chercher auprès de la dame du répit dans ses douleurs dentaires. Personne ne s'en étonna. Bien au contraire, la nouvelle se répandit qu'il y avait une statue aux pouvoirs miraculeux pour tous les affligés des quenottes. Ils étaient nombreux en ces temps de carences multiples.


Le temps passa, Jean ne fut plus qu'un souvenir qui s'effaça quand tous ceux qui le connurent prirent la même destination fatale. Pourtant, sa statue ne cessait d'agir pour le bien du confort buccal. De grandes processions se firent pour venir poser une couronne au pied de la Dame. Si elle ne prenait pas le mal à la racine, elle le soulageait si souvent que les fidèles revenaient fréquemment lui faire hommage.

 



Il y avait en ces temps que l'on prétend obscurs de nombreux endroits qui apportaient du soulagement aux pauvres gens. Une fontaine, un puits, des herbes, une relique, une incantation, la posologie était simple et son coût économique. Personne ne réclamait l'exclusivité de la faveur mystérieuse et tout allait pour le mieux dans ce monde de misère !


Mais le curé de Chailles n'était pas homme de robe à se laisser marcher sur les pieds. Il avait dans sa paroisse une statue guérisseuse, quel besoin avait-elle de se trouver dans les bois, sur les bords de la Loire ? Charité bien ordonnée commence par soi-même, le saint homme se disait qu'en faisant venir à lui cette belle aubaine, il ferait le plein bien mieux que le curé d'à côté.


Il narra en sermon ces nouvelles intentions. Il voulait frapper les esprits, préparer ses ouailles à cette belle idée. Il pensait que la nouvelle demandait un peu de temps avant de faire son chemin. Il ne pensait pas se tromper de la sorte. 

 



Si tôt évoqué ce pieux projet, un bûcheron aussi gaillard que peu enclin à la réflexion, se mit, au sortir de la messe à répondre immédiatement à la prière de son confesseur. Il fit bien vite, le chemin jusqu'à la source et rapporta sur son épaule la statue pourtant d'un poids respectable. Le curé se préparait pour les vêpres quand il vit arriver un étrange équipage …


C'est le bûcheron qui se fit sonner les cloches quand jamais on entendit le tocsin dans ce pays tranquille. Qu'on prenne son sermon pour parole d'évangile ne semblait pas réjouir cet homme de Dieu. Il fallait du décorum, de la belle procession pour déplacer une pièce aussi rare. L'homme des bois n'y connaissait rien dans le marketing religieux. Il retourna illico remettre la Dame dans sa clairière.


Ce ne fut que quelques mois plus tard, le temps de soigner l'organisation et de faire venir des huiles épiscopales que la Statue revint officiellement prendre place en l'église du village. Il est vrai que la fête fut fervente, que les prières ne manquèrent pas et que la belle sculpture était parfaitement mise en valeur en ce lieu.

 



Hélas, mille fois hélas, de vertus thérapeutiques, plus jamais elle n'eut. Il était trop tard et notre curé eut beau s'en mordre les doigts, la réputation de la Vierge à l'enfant tomba vite. Les croyants ont aussi besoin de quelques certitudes. La statue désormais les laissait sur leur faim de guérison.


Cette histoire tomba bien vite dans les brumes de la mémoire locale. Personne ne s'interrogea vraiment sur les raisons de ce désamour céleste. Les gens avaient d'autres chats à fouetter ! Il fallut qu'un expert en menterie passe dans la région pour recueillir l'histoire et trouver bien vite l'explication. C'était la source qui était tellurique ! Depuis, elle a disparu et personne ne viendra contredire ce bonimenteur plus menteur qu'un arracheur de dents !


Iconoclastement vôtre.


 

dimanche 25 octobre 2020

Son dernier bal !


La danse du balai


 


 

  Il se murmure d’étranges choses entre Sologne et Loire. Nous ne pouvons leur accorder créance tant elles paraissent incertaines et plus encore. Néanmoins, puisque cette légende est venue jusqu’à mes oreilles, je me fais un devoir de vous la confier, sans attendre de vous que vous la preniez pour véritable.

    Il y a fort longtemps dans un village lové auprès de son château, vivait un humble berger qui gardait des moutons et des chèvres dans les pâtures au bord de la rivière, ces grands espaces destinés au pacage collectif qu’on nomme au pays « Varennes ». Éric était un fort beau jeune homme qui faisait tourner bien des têtes parmi les charlusettes de l’endroit. De toutes ces jeunes filles, la plus énamourée et la plus assidue était sans nul doute Jacquenote. Elle n’avait d’yeux que pour lui, attendait qu’il se déclare pour lui donner sa fleur.

    Hélas, l’amour est aveugle ! Le gentil berger était épris d’une femme plus âgée. Irène était une dame à la réputation incertaine tout autant qu’à la beauté aussi vénéneuse qu’envoûtante. Le berger avait succombé au magnétisme d’un regard étincelant. D’un bleu profond aux délicates nuances orange et jaune, les pupilles de la dame brillaient tout particulièrement la nuit venue. Beaucoup, à cause de ce regard, lui attribuaient des pouvoirs occultes, se méfiaient d’elle tandis que certains se signaient à son approche et lui tournaient le dos. Éric se moquait de ces rumeurs qu’il pensait infondées, il était sous le charme de celle qu’on nommait dans son dos : « La Birette ».

    Quand ses bêtes étaient à l’abri dans leurs bergeries, Éric, la nuit tombée ne manquait jamais d’aller rendre visite de courtoisie à Irène au plus grand dépit de Jacquenote. Là, dans la chaumière de la sorcière, il était sous le charme. Il la regardait, lui décrivait ses émotions que la femme écoutait sans y prêter grande attention. Puis, quand dix heures sonnaient au clocher de l’église, Irène disait toujours la même chose à ce pauvre berger : « Allez, mon bel ami, ouste. Du Balai ! J’ai tant à faire qu’il vous faut me laisser ... »

    Èric s’en allait, penaud et déconfit. Il trouvait souvent sur sa route Jacquenote qui avait repéré le manège et savait l’heure où le trouver, la mine refrognée. La jeune fille lui octroyait de tendres œillades, tentait de le convaincre que c’est avec elle qu’il serait heureux. Éric n’en voulait rien savoir, c’est Irène qui était dans son cœur en dépit de cette rebuffade quotidienne.

    Le temps passa ainsi. Ni le berger ni la pauvrette n’étaient heureux tandis que dame Irène semblait indifférente et allait son train. Jacquenote un soir, n’en pouvant plus osa dire ses craintes et ses doutes à propos de celle qu’elle prenait pour une sorcière. L’amoureuse éconduite conseilla à son berger de cœur de faire le guet devant la chaumière de la femme à la minuit.

    Éric fut soudainement frappé d’une sourde inquiétude : « Et si la petite avait raison ! » À dix heures sonnantes, cette fois encore Irène le pria comme à l’accoutumée de déguerpir et de la laisser tranquille. Le berger se cacha derrière un fourré, attendit deux longues heures, miné par l’angoisse, redoutant ce qu’il ne manquerait pas découvrir. Il s’était imaginé qu’un homme marié allait frapper à la porte de la dame qui n’attendait que lui. Il fut bien plus surpris hélas !

    À minuit tapante, Irène ouvrit sa porte. Elle était vêtue entièrement de blanc, d’une vaste robe flottante. Elle semblait en lévitation sortant prestement de sa demeure pour filer en tournant le dos à la Loire. Il se rendit compte qu’elle chevauchait un balai en bouleau. Il dut courir pour la suivre à distance, la femme allait bon train sans avoir besoin de marcher.

    De temps à autre il la perdait de vue mais Éric avait compris où sa dame de cœur se rendait. Il n’y avait aucun doute, c’est vers la clairière des Frappiers, là où se termine le Val et commence la Sologne mystérieuse, que son balai la portait. Il arriva fort essoufflé alors que le Sabbat était depuis quelques temps entamé.

    Irène dansait avec des créatures étranges, des êtres porteurs de cornes. Il était horrifié de la voir ainsi se donner corps et âme à des diablotins qui l’entraînaient dans des rondes effrénées. De temps à autre, l’un de ces personnages hirsutes prenait la Birette par la main pour la mener à l’écart de la prairie. À chaque fois, des murmures, des plaintes, des cris ne laissaient aucun doute sur ce que faisaient ces deux-là. Après s’être donnée à tous les participants de ce bal satanique, Irène rentra chez elle de la même manière. Le jour allait se lever. Le pauvre Éric était au désespoir, il s’était épris d’une immonde sorcière qui s’était moquée de lui, le faisant passer pour son fiancé alors qu’elle était la maîtresse de tous les diables. Il pensa avec honte à cette pauvre Jacquenote qu’il avait laissée se languir. Quel misérable il était.




    Le temps passa. Éric cessa de rendre visite à celle qui n’était qu’une infâme sorcière. Il acceptait désormais la compagnie de Jacquenote sans pour autant répondre à ses avances malgré le plaisir grandissant qu’il y prenait. Il lui fallait d’abord digérer sa blessure sans pour autant se jeter sur la petite. Il voulait que murissent ses sentiments.

    Ce soir-là, il y avait un bal dans le village. La cicatrice était résorbée, le Berger accepta l’invitation de son amie. Jacquenote s’était faite belle, Éric sentit poindre en lui une attirance nouvelle, un désir qui lui redonnait la joie de vivre. Le duo, sous le regard amusé de l’assemblée, ne cessa de danser. Tous remarquèrent l’harmonie du jeune couple. Elle faisait plaisir à voir. Dans l’ombre, à l’écart, une femme rongeait son frein et grinçait des dents. Irène était jalouse ...

    Les deux amoureux se déclarèrent. Leur mariage fut annoncé. C’est le jour même de la cérémonie que la belle romance bascula dans le drame le plus affreux. Alors qu’ils sortaient de l’église, les nouveaux époux passèrent à proximité d’Irène. La femme quoiqu’ayant le regard mauvais, se mit à jouer à la cabrette un air endiablé auquel la belle épousée ne put résister.

    Jacquenote se mit à danser. Elle ne se maîtrisait absolument plus. Elle était comme prise de folie. Elle tournoyait, sautait, chantait de manière inconsidérée. Soudain, sans que personne ne puisse la retenir, tout en dansant encore et encore, elle pénétra, portée par sa farandole diabolique dans le château. Quelques minutes plus tard, la foule médusée la vit à nouveau. Elle était tout là-haut sur le chemin de ronde. Elle dansait toujours, en équilibre sur les créneaux. La foule se taisait, pressentant le drame.

    Elle fit un pas de trop, un pas fatal. Jacquenote perdit l’équilibre et tomba dans la Loire pour y disparaître à jamais. C’était l’effroi. Éric poussa un hurlement terrible, un cri qui ressemblait étrangement à celui d’un loup avant que de s'effondrer en larmes. Le pauvre garçon ne put s’en remettre, il venait de perdre la tête et son amour. Il quitta le pays, se fit vagabond et personne n’entendit plus jamais parler de lui dans le pays.

    Au village, on se saisit immédiatement de la Birette ! Elle fut enfermée dans la prison du village pour l’éloigner de la foule qui voulait l’écharper. Un procès eut lieu, à la demande de l’église. Elle fut tout naturellement accusée de sorcellerie. Les témoignages étaient accablants, le souvenir de Jacquenote présent dans tous les esprits. Le verdict tomba sans surprise : la mort d’une manière terrible ! Il fut décidé de l’attacher à un châtaignier aux Frappiers et de la laisser à l’appétit des loups qui rodaient en nombre en cette époque lointaine.

    Un demi-siècle passa. Un jour, un vieil homme à l’esprit absent, arriva dans le pays. Il avait l’air d’un homme sans joie, d’un pauvre erre en désespérance. Il vivait de peu, acceptant quelques offrandes pour subsister. Il se tenait toute la journée dans les Varennes à regarder la Loire puis s’en allait passer la nuit dans la clairière des Frappiers. C’est sans doute ce qui éveilla quelques réminiscences ; une vieille histoire revint en mémoire des anciens, parmi ceux-là, certains crurent reconnaître en ce pauvre bougre les traits d’Éric, le berger d’antan.

    Le vieil homme ne répondait pas à ceux qui tentèrent de lui parler. Il faisait peine à voir. C’était une désolation que de percevoir la douleur immense qui était sienne. Que faire ? C’est alors qu’un musicien à qui l’on avait confié le récit eut une idée étrange. L’homme se mit à jouer de la cabrette devant le pauvre bonhomme. Éric, puisque c’était bien lui, tourna la tête, des larmes lui coulaient en abondance, il se passait quelque chose.

    Le musicien joua jusqu’à la minuit sans jamais s’arrêter. Soudain, quand les cloches eurent sonné, une louve surgit, montrant des dents, bavant. Elle menaçait le musicien, allait lui sauter à la gorge quand le vieux berger sortit de sa torpeur. Il se leva, se dressa devant la bête, s’interposa entre le fauve et le musicien. La louve voulut le mordre à la gorge, le vieux lutta de toutes ses forces. Dans la bataille, il plongea dans le regard du monstre, des yeux d’un bleu profond aux délicates nuances orange et jaune brillant intensément.

    Dans un sursaut de rage, il brisa le cou de la louve et la jeta dans la Loire. En cet instant précis, une vieille femme sortit des flots, Elle dansait et s’approcha du vieil homme. Elle l’embrassa longuement. L’homme lui dit alors : « Je t’ai attendue cinquante longues années mais j’ai toujours eu la certitude que je te retrouverais ! » Éric et sa Jacquenote vécurent le reste de leur âge dans la plus miraculeuse plénitude. Leur amour était si fort que personne n’osait venir les importuner. Il était passé le temps pour eux d’avoir des enfants. Tous les contes de fées ne se terminent pas de la même manière.

    Diaboliquement sien.



samedi 24 octobre 2020

Comme un poisson dans l’eau.


Espace Halieutique 

pour Poissons Accablés de Douleurs

 



    Entre conte et réalité se glisse parfois une fable ou bien, une simple fantaisie. Laissez-vous mener parle bout des rêves, l’important est de rester à flot sans jamais perdre pied dans ce monde si curieux.


Le vieux brochet




Un vieux brochet aux aguets
Guettait sa future proie
C'est un goujon en tournée
Qui vint s'offrir à son choix

Il s'avança sous son nez
Innocent et fort placide
Le carnassier alléché
S'il s'était montré avide
N'en aurait fait qu'une bouchée
Sans la moindre distinction
Quand avant de l'avaler
Le gourmand eut un soupçon

Cette onde était si troublée
Il percevait quelques signes
Incitant à se méfier
De la friture sur la ligne
Brochet retenant son geste
Bouche bée lors se figea
Devant goujon qui du reste
Se refusait au trépas

 


« Je ne suis pas aussi frais
Que mon ami le gardon
Son œil rouge vous effraie
C'est tromperie de luron ! »
Brochet se dit dans l'instant
« Je me fais végétarien »
Et goujon reconnaissant
Lui octroya du vieux pain

Le croûton était si dur
Qu'il se brisa toutes les dents
Ainsi finit l'aventure
Du carnassier en pâture
Qui mange dans le courant
Se méfie des poissons blancs
Ils ne sont pas bon conseil
Eux et tous leurs pareils

Le vieux brochet aux aguets
Attendait son futur mets
C'est un mitron en tournée
Qui lui offrit sa fournée


Épilogue

   Le malheureux carnassier édenté, las de manger du pain sec bien qu’il lui fut jeter dans l’eau, se dit que vu son grand-âge, il pouvait bien prétendre se réfugier dans un EHPAD : Espace Halieutique pour Poissons Accablés de Douleurs. D’autant plus que dans l’onde pure un mal sournois se répandait parmi ses congénères.

    La maladie rénale proliférative se répand comme une traînée de poudre dans les rivières depuis que la température des eaux monte de manière excessive. Les symptômes sont terribles, les victimes ne s'intéressent plus à leur environnement et prennent une coloration foncée. Leurs yeux gonflent tandis que le ventre se fait plus volumineux.

    Un parasite présent dans l’eau attaque les malheureux en pénétrant dans leur organisme par les branchies. Les autorités piscicoles ont décrété le port d’un filtre autour des ouïes. La chose n’est pas simple à porter et encore moins à se procurer d’autant que la zone de production provient essentiellement du fleuve Yangzi dit aussi le fleuve bleu.

    C’est d’ailleurs une peur bleue qui a gagné toute la population fluviale, les poissons tombant comme des mouches. Les pertes sont estimées entre 10 et 15 % des individus ayant contracté le parasite. C’est ainsi que devant cette terrible menace, notre pauvre brochet décida d’aller demander une place dans un EHPAD.

    Il remplissait le formulaire d’inscription quand une libellule bien intentionnée suffisamment rapide pour ne pas être gobée par son interlocuteur, l’informe des mesures sanitaires que vient de prendre le grand conciliabule central de la rivière. Les vieux spécimens terminant leurs jours dans un tel espace de relégation ne seront plus admis dans les centres médicaux en cas d’infection. C’était à coup sûr la mort, une simple accélération du processus aurait dit le jeune poisson plein de vigueur qui commande à la troupe.

    Notre vieux brochet jette immédiatement son formulaire. Quoique édenté, il se sent encore plein de vigueur et capable de résister à l’odieux parasite. Il se met en demeure de changer son régime alimentaire. Lui le carnassier qui s’était satisfait de pain, ne peut plus compter sur la charité humaine. Il convient de se tourner vers les ressources locales.

    Après avoir attentivement observé les carpes qui comme chacun le sait sont originaires de Chine, ces dernières sont plus en mesure de répondre aux nouveaux défis de cette époque. Elles se contentent de se mettre sous la dent, formule assez malheureuse pour notre brochet, tout ce qui traîne au fond de l’eau.

    Notre brochet se fait alors omnivore, préférant les aliments issus de la décomposition. Il perd ainsi de sa superbe tout autant que son titre de prédateur. Il conserve une dent contre le pouvoir qui méprise ainsi les anciens. Il songe d’ailleurs à saisir le tribunal international de La Haye pour crime contre l’humanité vieillissante.

    Tout édenté qu’il est il n’en conserve pas moins son mordant et sa pugnacité. C’est ainsi que le ban et l’arrière ban du Grand conciliabule tombent dans les rets d’une justice totalement indépendante des courants nationaux. Le vieux brochet s’illustre comme le poisson pilote de la révolte des gueux, un juste retour des choses pour une histoire qui ne s’achève pas en queue de poisson.

    Il vécut le reste de son âge, heureux dans un univers où chacun est traité dans la même dignité quel que fut son âge et sa condition. Il se dit parfois qu’il ferait bien d’expliquer aux humains que ceci était possible, mais avec ceux-là, il n’est jamais facile de leur faire entendre raison. Il préfère se contenter de ce qu’il a obtenu pour ses semblables. Après tout, ce qui se passe hors de l’eau, n’est pas de son ressort.





vendredi 23 octobre 2020

Une vie en chansons …

 

Les chants de ma Mémoire.




La chanson Française a accompagné mon chemin, elle a jalonné mon existence de milliers de refrains qui sont autant de bornes, d'indicateurs du bonheur ou de marqueurs des heurts de l'existence. Il est des rengaines qui se sont insinuées avec toutes leurs paroles, elles peuplent mon imaginaire, ma nostalgie, ma vison du Monde.



Quand j'ai une histoire de vie à raconter, des chansons s'imposent comme autant d'évidences. Elles font danser les yeux, les conduisent immanquablement vers ces temps de jeunesse où elles furent écoutées pour la première fois. Des phares immenses seront à jamais mes guides sublimes, Brassens, Brel, Vian, Aznavour, Trenet, Ferré, Perret, Lapointe, Dassin… et combien d'autres encore, parfois pour une seule chanson, merveille fugace qui sera toujours mienne. Ce panthéon n’a eu de cesse de se gonfler de nouveaux venus, de chanteurs laissant de merveilleux cailloux sur la route d’une vie.



Ils sont auteurs surtout car ils m'ont élevé dans le culte des mots. Combien de fois, admiratif, jaloux, j'ai prononcé cette phrase stupide mais oh combien sincère «: « On peut mourir quand on a écrit un joyau pareil ! ». Car la chanson est une extraordinaire alchimie magnifique et magique. Elle est la fusion de paroles simples, d'une petite histoire qui est un film, un roman, un conte et d'une mélodie qui la sublime pour lui donner son habit d'éternité.





C'est simple et si complexe, c'est si efficace que rien ne parvient à vous investir aussi durablement la mémoire. Je me souviens d'une femme âgée, touchée par cette abominable maladie qui vous prive de votre propre passé, de la mémoire de votre vie et qui retrouva la joie de vivre l'espace d'une soirée autour des chansons de son autrefois retrouvé à travers une anthologie de la chanson.


La chanson est cette incroyable vertu de réunir longtemps après, ceux qui l'avait partagée en son temps. La fortune, la culture, la santé ne sont plus ces frontières infranchissables : quelques paroles simples sont cures de jouvence et réconciliation enthousiasme. Les paroles surgissent ainsi du fond des mémoires, le texte peu à peu se reconstitue et chacun retrouve alors son enfance ou un moment particulier de son existence.



J'ai toujours constaté qu'elle a aussi ce mérite immense de ne point connaître l'illettrisme. Jamais je n'ai vu un enfant ne pas savoir lire les paroles d'un air qui accompagne la mélodie. J'ai souvent usé de ce support pour travailler en classe, pour ouvrir les esprits, aborder des thèmes délicats, emmener les élèves loin de leurs difficultés supposées. La musique balaie l’impossibilité de vocaliser, elle entraîne le lecteur vers une diction assurée et un déchiffrage parfait.



J'ai alors espéré que les karaokés allaient redonner la joie qui manque à ce pays. Je suis si attristé d'entendre dans nos tribunes cette Marseillaise guerrière qui monte des travées pour exprimer la joie d'un peuple vainqueur. Ailleurs, les nations ont des chants traditionnels que tous connaissent encore et entonnent en chœur. Nous n'avons point de répertoire commun et ça ne semble affliger nul ministre de l'éducation nationale.



Hélas, ces Karaokés furent l'occasion de briller en société, d'établir un jeu de dupe, une micro société de spécialistes qui se gaussaient des petits dérapages des malhabiles. Notre Monde ne supporte pas la maladresse, il faut être parfait pour avoir le droit de chanter en public et si possible, jeune, jolie, mince et bien habillée. L'animateur à ses manettes ridiculisent encore plus le pauvre chanteur d’occasion qui n'a pas la voix ni la tête de l'emploi.



Alors, en France on ne chante plus en public ou seulement cet hymne si réducteur. Même au Rugby, je déplore le recul de cette belle tradition ovale. Pourtant lorsque quelqu'un organise une soirée avec textes pour soutenir les hésitations et guitare pour donner le « La » ou toute autre note utile à la fête, le miracle se reproduit et les yeux brillent d'une flamme jubilatoire.



Tout a commencé, pour moi, avec Henry Salvador et Ce lion qui se mourait sur les ondes 'crachotantes' d'une TSF d'alors. Je me revois, emporté par les paroles, rêvant d'un ailleurs que je ne connaissais pas. Nous n'avions alors ni télévision ni voiture et pourtant qu'est ce que je suis parti loin avec cette chanson simple. J’étais ailleurs, transporté par un imaginaire qui s’offrait le luxe de se satisfaire de ses propres images.



Beaucoup plus tard, elle fut reprise et je ne puis vous décrire l'émotion et le bonheur de la retrouver aussi vivace, de me retrouver au plus profond de mon enfance avec ce petit air de bien. Puis ce fut le miracle de mes premières chansons. J’avais osé quelques textes maladroits qu’un petit bonhomme avait repris et mis en musique. La première fois que je l’entendis chanter, j’en pleurai.



Rien n’est plus beau que d’entendre un groupe d’enfants reprendre votre texte. Ce n’est d’ailleurs plus tout à fait votre œuvre, le mélodiste a une part considérable dans cette étrange alchimie. C’est de la conjonction des deux que naît ce petit rien qui fait du bien, qui pénètre dans les têtes, qui s’installe pour longtemps. Rares sont les chansons qui parviennent ainsi à faire leur trou, à toucher au plus profond des mémoires. Mais quand c’est le cas, quel bonheur, quel enchantement ! Mon complice Casimir m’a fait cet incroyable cadeau, d’autres également, en me faisant l’honneur de me prendre un texte que je leur donnais avec grand plaisir. Je les en remercie tous.


Enchantement leur.


 

jeudi 22 octobre 2020


Ses habits de lumière
 


Se glisse dans son lit
Majestueuse et docile
Se donne à  vos envies
Quand elle se fait gracile

Vous chasse sans pitié
Coléreuse et farouche
Gronde le long des sentiers
Arrachant toutes les souches

J'aimerais tant vous parler d'elle
De ses habits de lumière
Ses reflets qui la font si belle
Dans le creux des sablières


Se répand sans retenue
Gracieuse et câline
Se montre  toute nue
Pour une nuit coquine

S'refuse soudainement
Frondeuse et violente
Repousse sans ménagement
Qui la croyait dolente


J'aimerais tant vous parler d'elle
De ses habits de lumière
Ses reflets qui la font si belle
Tout le long de ses gravières
 


Se prélasse sans détour
Paresseuse et offerte
Cédant à votre amour
Sans avouer sa défaite

Vous chasse un peu plus tard
Plus rageuse et cinglante
Jurant sans aucun fard
N'être plus votre amante

J'aimerais tant vous parler d'elle
De ses habits de lumière
Ses reflets qui la font si belle
Au détour de la rivière


Vous l'avez bien compris
Ma merveilleuse Loire
Aimée à la folie
Passion à ne pas croire

Vous l'avez bien compris
Il vous faudra  me croire
J'l'aime plus qu'à la folie
Ma douce et tendre Loire


J'aimerais tant vous parler d'elle
De ses habits de lumière
Des reflets qui la font si belle
Dans les yeux des lavandières

J'aimerais tant vous parler d'elle
De ses habits de lumière
Des reflets qui la font si belle
A mes envies marinières


 

 



mercredi 21 octobre 2020

Poussières d'étoiles

 

Poussières d'étoiles




J'allais le long de ce chemin

À la poursuite du destin

C'est alors qu'elle m'est apparue

Moi qui ne l'espérais plus



Une étoile brula dans le ciel

Annonçant que c'était elle

Ma douce dame brume

Surgit d'un rayon de Lune



Elle m'invita à danser

Me voulant pour fiancé

D'où me venait cet honneur

Qui bouleversa mon cœur ?



Sans chercher à comprendre

Il me fallait la prendre

La serrer fort dans mes bras

Pour partager ce moment là



Tout au long de cette nuit

Nos âmes furent unies

Quand arriva ce matin

Qui me plongea en chagrin



La dame s’est évanouie

Alors qu'elle m'avait promis

De ce si tendre partage

Bien plus qu'un mariage



Mes larmes coulaient à flot

Quand au milieu du halo

De ses poussières d'étoiles

Elle me tendit une voile



Je quittais cette terre

Pour aller vers l'éther

Ce merveilleux domaine

De celle qui sera ma reine



Nous dansons main dans la main

Sans nous soucier de demain

Nous nous aimons dans le ciel

Loin de ce monde artificiel


 

mardi 20 octobre 2020

La fée aux yeux de lumière

 

La fée aux yeux de lumière

 




Moi je sais qu’il existe

Quelque part dans ce Val

Une image qui persiste

D’une vision magistrale

Surgit soudain de l’onde

La dame m’ouvrit par magie

Sans que je n’en fus surpris

Les portes d’un nouveau Monde

 



D’un regard étincelant

Au milieu de la rivière

La fée aux yeux de lumière

M’ensorcela dans l’instant

Sa folle chevelure fauve

Illumina le couchant

M’enlevant jusqu’au levant

Non loin du port de Mauves

 



Sortant des flots capricieux

Dans les rayons solaires

Telle une vision éphémère

La belle brillait de mille feux

Elle chevauchait la Loire

Princesse en majesté

Sirène pour l’éternité

D’un récit tout à sa gloire 

 



Elle m’invita à la suivre

Plongeant dans les profondeurs

Elle me prit tout en douceur

De son bonheur, j’étais ivre

Je me trouvai en apnée

Au creux du batillage

Qu’elle m’offrit pour message

Ma si douce et tendre fée

 



Je retrouvai mes esprits

Triste épave sur l’estuaire

Je n’étais qu’un pauvre erre

À la recherche de celle-ci

Ne fut qu’une apparition

Un mirage sans lendemain

Qui restera c’est certain

Ma merveilleuse illusion

 



Mais je sais qu’il existe

Quelque part dans ce Val

Une image qui persiste

D’une passion magistrale

Surgit soudain de l’onde

La dame m’ouvrit par magie

Sans que je n’en fus surpris

Les portes d’un autre Monde

 




Des mots qui chantent

  Un livret qui chante … Si vous tendez l'oreille En parcourant ses pages Il n'aura pas son pareil Pour sortir ...