samedi 30 décembre 2017

Fredaine rengaine

Fredaine rengaine



Pour une petite fredaine
Qui deviendra une rengaine
Inventez un joli refrain
Et quelques couplets en quatrain

Une histoire bien banale
Quelques mots encore bancals
De simples rimes sans façon
Qui deviendront une chanson

Une mélodie insidieuse
Qui se fait mystérieuse
Un petit air si malin
Qui se siffle sur le chemin

Pour une petite fredaine
Qui deviendra une rengaine
Inventez un joli refrain
Et quelques couplets en quatrain

On se moque de l'histoire
Pauvre support illusoire
Il faut des rimes malicieuses
Une ritournelle mélodieuse

Elle s'imposera par le cœur
Quand vous la chanterez en chœur
Investira votre mémoire
Joyau de votre répertoire

Pour une petite fredaine
Qui deviendra une rengaine
Inventez un joli refrain
Et quelques couplets en quatrain

Elle sera votre compagne
Votre pays de cocagne
Joli refuge du bonheur
Tendre repère du chanteur

Tout au long de l'existence
Elle comblera le silence
Elle donnera des couleurs
Vous accordant ses douceurs


Pour une petite rengaine
Qui se joue de nos fredaines
Oubliez ces pauvres quatrains
Ne retenez que le refrain



vendredi 29 décembre 2017

Au pays de Merlin


Au pays de Merlin



Nous vous conterons des histoires
En vous invitant en chemin
À ouvrir cet ancien grimoire
Que nous a confié l'ami Merlin

Vous entrerez sur la pointe des pieds
Dans le joli pays de Morgane
Le royaume de la gentille fée
Qui se cache sous une peau d'âne
Quant au détour d'une clairière
Vous bicherez avec délicatesse
Sa jolie croupe muletière
Pour vous elle se fera princesse

Nous vous conterons des histoires
En vous invitant en chemin
À ouvrir cet ancien grimoire
Que nous a confié l'ami Merlin

Un peu plus loin dans l'aventure
Vous truciderez le méchant dragon
Vous faisant passer pour le roi Arthur
Ou bien l'un de ses braves compagnons
Votre gloire n'aura qu'un temps
Car c'est au milieu des ténèbres
Que surgira le terrible Satan
Pour vous transformer en zèbre

Nous vous conterons des histoires
En vous invitant en chemin
À ouvrir cet ancien grimoire
Que nous a confié l'ami Merlin

Comme tout ceci n'est qu'une fable
Qui se joue de votre imagination
Vous passerez bien vite à table
Et nous vous proposerons de jolies chansons
De ce voyage en douce rêverie
Vous reviendrez métamorphosés
Vous en oublierez alors vos ennuis
Pour tout le restant de votre soirée

Nous vous conterons des histoires
Durant ce délicieux festin
À deux pas de notre Loire
En compagnie du bon Merlin



jeudi 28 décembre 2017

En Orléans


En Orléans


Sur les quais d’Orléans
Des mariniers rêvaient
De voyages au levant
Sur les quais d’Orléans
Des gabiers espéraient
La reprise du vent
Sur les quais d’Orléans
Des lavandières lavaient
Le linge sale des gens
Sur les quais d’Orléans
Des gredins détroussaient
Les bourses des marchands

Une histoire du passé
Un souvenir d’antan
La légende dorée
De nos vieux chalands

Dans le port d’Orléans
Un voyageur descend
Du vapeur de Nantes
Dans le port d’Orléans
Un muscadin s’éprend
D’une dame galante
Dans le port d’Orléans
Un matelot gourmand
Prend une mauvaise pente
Dans le port d’Orléans
Un coche d’eau attend
Une belle élégante

Une histoire du passé
Un souvenir d’antan
La légende dorée
De nos vieux chalands


Sur les quais d’Orléans
Des portefaix livraient
Un nouveau chargement
Sur les quais d’Orléans
Des catins espéraient
Alpaguer des clients
Sur les quais d’Orléans
Des haleurs s’échinaient
Pour vaincre le courant
Sur les quais d’Orléans
Des marins embarquaient
Des tonneaux de vin blanc

Une histoire du passé
Un souvenir d’antan
La légende dorée
De nos vieux chalands

Dans le port d’Orléans
Un jeune garçon s’éprend
D’une femme avenante
Dans le port d’Orléans
Un passant se détend
D’une manière étonnante
Dans le port d’Orléans
Une bêcheuse se fend
D’une chanson charmante
Dans le port d’Orléans
C’était à tout instant
Une vie bouillonnante

Une histoire du passé
Un souvenir d’antan
La légende dorée
De nos vieux chalands



Ma vie au fil de l'eau


Ma vie au fil de l'eau



Je suis né sur une péniche
Il y a bien longtemps de cela
Nous n'étions pas bien riches
Sur tous les canaux d'ici-bas
Nous vivions dans une cabine
Qui n'avait rien d'un palace
Ma chambre était la cuisine
Tout à bord avait sa place

C'est ma vie au fil de l'eau
Qui coule dans mes veines
Ma maison est un bateau
Tous les jours de la semaine

Quand j'ai appris à marcher
Ce fut sur un pont étroit
J'ai continué de naviguer
Ma vie suivait la voie
Mon école était le canal
La maitresse ma tendre mère
L'écluse sonnait le bal
De la porte marinière
*
Les années ont vite passées
Le choix je n'avais guère
J'ai continué le métier
Celui de mon pauvre père
Lui qui était mort à la tâche
Trimant du matin au soir
Sans la moindre relâche
Pour un si maigre avoir
*

J'ai trouvé ma belle batelière
Dans le joli port de Strasbourg
Une fille née sur la rivière
Que j'ai épousé par amour
Nous avons connu la misère
La fin de nos belles années
Pour travailler quelle galère
Le transport fluvial qui coulait
*
Je ne trouvais plus de travail
Je dus alors débarquer
Le fret de la route et du rail
Finit par nous condamner
Ma péniche eut ses funérailles
C'était mon passé déchiré
Ma vie n'était que ferraille
Je finis par en pleurer ...

 Illustration Éric Raimbault

mardi 26 décembre 2017

Quelques mots


Quelques mots


Je veux vous offrir quelques mots
Pour qu'ils deviennent de belles chansons
Des mots tendres qu'on dit sans façon
Des mots doux qui donnent des frissons

Les mots salés venus du large
Les mots copiés remplissant la marge
Les mots chantés sur un air joyeux
Les mots priés le regard aux cieux

Les mots pourris, envoyés à la face
Les mots gentils, brisant la glace
Les mots vomis blessant la bouche
Les mots bannis parfois si louches

Les mots composés d'un seul trait
Les mots avalés quand on bégaie
Les mots fléchés, pour aller plus loin
Les mots croisés perdus dans un coin

Les mots gourmands dans un festin
Les mots troublants pour un destin
Les mots savants tombant des nues
Les mots brigands, surgis de la rue
Les mots brisés quand on s'effondre
Les mots soudés qui nous confondent
Les mots crachés qui vous reviennent
Les mots oubliés, quelle déveine !

Les mots douteux qu'on nous impose
Les mots heureux sentant la rose
Les mots frileux dans une flamme
Les mots vicieux pour quelques larmes

Les mots clarté chantés dans la nuit
Les mots bonté pour toi mon ami
Les mots enchaînés par notre peur
Les mots aimés qu'on dit en douceur

Les mots certains de leur puissance
Les mots malins qui ont confiance
Les mots gredins qu'il faut corriger
Les mots lointains aimant voyager

Les gros mots qu'on lâche dans la peur
Les petits mots, offerts pour un cœur
Les vilains mots qu'on lâche à son insu
Les vieux mots qui ne sont pas perdus 



Je vous adresse tous mes mots
Pour briser les laideurs du moment
Des mots durs qui deviennent tourments
Des mots forts qu'on hurle dans le vent


lundi 25 décembre 2017

Les chiens et le berger.


Les chiens et le berger.




Au bord de l'eau vivait un homme
Simple gardien de ses moutons
Un humble berger en somme
Loin de la ville et ses tensions

Sur la rive, du matin au soir
Il sculptait des personnages
Sur des bois flottés de Loire
Pour les enfants du voisinage

Ils aimaient à le regarder
Lui donnaient de tendres sourires
De tous, il était respecté
Gentil berger aimant à rire

Quand soudain l'orage éclata
Pour les adultes de ce bourg
Il ne fallait pas qu'on aimât
Celui qui vit à rebours

*
C'est la femme de l'échevin
Grande dame respectable
Qui distilla tout le venin
Dont on la savait capable

La mégère se fit sorcière
Proclamant à la cantonade
Par des paroles à manières
Un mensonge sans parade

Son mari lui avait mandé
De porter une affreuse rumeur
Pour que l'homme fut pourchassé
Par tous ces chiens sans honneur

À qui voulait bien l'écouter
Elle déclarait sans vergogne
Que non loin était un berger
Plus redoutable que charogne

*

Prétendant le berger porteur
De la si redoutée peste
La femme en son déshonneur
Avait la langue bien leste

Le berger en ce pays délétère
Fut soudainement mis au banc
Les enfants à coups de pierres
Les adultes bien plus méchants

Il se cacha plus loin encore
Seul maintenant avec ses moutons
Tandis que ses maudits pécores
Lui jetaient sans cesse des horions

Le temps passa ainsi longtemps
Le berger le cœur chagrin
Se souvenait des jours d'avant
Quand il n'était pas le vilain

*
Un jour un chaland s'arrêta
Un vieux marin s'en vint vers lui
Ce grand sage lui conseilla :
« N'accepte plus cette infamie ! »

« On te rejette par ignorance
C'est de cette arme qu'il faut user
Avec ton flutiau pour la danse
Tu les auras tous à tes pieds »

Ce que fit le brave berger
Par ses rondes mélodieuses
Envoûtant ceux qui l'avaient chassé
Y compris la dame odieuse

C'est la langue des oiseaux
Qui attrape par la douceur
Les menteurs, et tous les sots
Qui ignorent avoir un cœur

*


dimanche 24 décembre 2017

Pourquoi les poissons font-ils des ronds dans l'eau ?



Joyeux Noël

La géométrie piscicole



Victor n’a jamais été très fort en géométrie. Fort heureusement, Pitchoune, il ne sera pas nécessaire de lui faire un dessin pour lui faire comprendre cette histoire qu’il convient de lire d’un trait. Par contre, il sera sans doute nécessaire de lui présenter nos poissons d’eau douce. Depuis quelque temps, les enfants d’ici, ignorent tout de ceux qui vivent dans l’eau.

Il était un temps où, sur les bords de l'eau, quand sautait un poisson ou bien qu'il frayait en belle compagnie, la surface liquide ne laissait rien voir de ces activités qui se voulaient secrètes. L'onde restait uniforme, seules les vagues et les rides du vent marquaient de quelques signes les flots de nos rivières et de nos étangs.

Pourtant, les poissons, désireux de ne pas passer inaperçus, voulurent changer le cours des choses. Ils se plaignaient que ceux qui vont sur Terre puissent les ignorer de la sorte. Ils tinrent un jour grand conciliabule, une grande réunion regroupant la fine fleur piscicole, en un lieu tenu secret de notre Loire.

Le brochet, qui en cette époque lointaine, était le roi des profondeurs, prit la parole en premier. Il voulait qu'on puisse reconnaître, sans risque de confusion, sa marque au-dessus de l'eau. Il réclama que tous les hôtes de l'onde tracent un triangle pour indiquer leur présence hors de l’eau. Beaucoup alors de protester avec colère. Le triangle est une forme compliquée qui exige des connaissances en trigonométrie. Vu sous cet angle, notre réunion au sommet risquait de connaître une crise aiguë. Le brochet ne se montra pas obtus, il sut écouter sa base.

La carpe réclama le silence. Elle prit de la hauteur, prétendant qu'un carré ferait tout aussi bien l'affaire, qu'il serait plus simple et bien moins compliqué. Des angles droits et quatre côtés égaux, la mesure lui semblait raisonnable. Hélas, chez les poissons comme pour les hommes, il est bien compliqué d'obtenir l'adhésion générale. Une tanche fit remarquer que les angles risquaient de blesser ceux qui s'y cogneraient. Le carré fut à son tour rejeté de la surface de l'eau !

Une modeste perche voulu tendre la sienne à cette noble assemblée. Elle se félicita d'abord qu'on éliminât les polygones à commencer par le mystérieux pentagone. Elle recommanda qu'on abandonne l’idée saugrenue d’ajouter d'autres côtés. Sur le fond, on lui donna raison. Puis elle se réclama d'une figure simple par excellence qui honorait son nom : la ligne. Ses amis protestèrent avec colère : «  Où as-tu pêché une telle idée ? ». La suggestion se brisa nette sur cette réplique.

Sa consœur Arc-en -ciel eut ensuite droit à la parole. Elle réclama, vous devez vous en douter, un arc qui se propagerait sur l'eau en se tournant vers le soleil. Les autres poissons firent feu de tout bois contre cette idée saugrenue. « Comment savoir, où se trouve le soleil, les jours de pluie ? » demanda un goujon, poisson qui adore le beau temps ? «  Qui déterminera le rayon de courbure ? » s'enquit un vairon plus savant que les autres. « Un arc sans flèche, voilà une idée qui n’a pas sens ! », conclut l’alose qui mit un point final à cette suggestion.

C'est alors qu'un banc de mulets remontant le fleuve, poursuivi,comme il se doit sur la Loire, par quelques phoques en grande gourmandise, passa à portée de la réunion. «  Que faites-vous là, collègues d'eau douce , » s'enquit le chef de la bande de ces poissons venus de l’océan «  Nous tenons grand conciliabule pour déterminer quelle devrait être la marque des poissons au-dessus de l'eau » lui répondit une brème qui faisait la planche.


Pour être mulet, le poisson migrateur n'était pourtant pas un âne. L’un d’eux eut réflexion prompte et remarque judicieuse. « Vous avez vous-mêmes le fin mot de l'histoire. Cherchez, dans ce que vous êtes en train de faire, la réponse s'offre à vous ! ». Puis le malin s'ensauva bien vite accompagné de tout son banc et de l’arrière-banc aussi ; les phoques se faisaient de plus en plus pressants : il ne fallait pas traîner sur cette ligne d'eau.

La troupe resta coite quelques instants. Quel était le sens sibyllin de cette énigme muletière ? Chacun se perdait en conjectures. Il y eut grand remue-méninge au fond de l'eau. Beaucoup d'espèces restèrent bouche-bée ne trouvant plus rien à dire. C'est d'ailleurs de cette journée mémorable de l'histoire des poissons qu'ils ont gardé cette déplorable habitude. Mais ceci n'est qu'une conséquence annexe de notre histoire de Loire.

La journée allait tourner en queue de poisson quand une ablette à qui l'on ne demandait jamais rien, osa pourtant une petite remarque. « Conciliabule, conciliabule, aurions-nous tous une tête de conciliabule ? » Cette réplique fit florès bien plus tard, en toute autre circonstance.

Mais pour anodine et inutile que fût cette remarque, elle fit écho dans la tête d'un barbeau qui faisait le malin. « Mon bon Dieu, mais c'est bien sûr », se dit celui-ci en se frappant la nageoire caudale... Nous avions la réponse sous les yeux et nous étions incapables de la voir. Quelle bande de harengs nous sommes !

Les autres de s'impatienter tout en trouvant fort déplacée cette remarque désagréable sur un poisson qui ne mettait jamais une nageoire dans la Loire. « Parle, puisque tu es si malin ! » lui enjoignit le brochet qui avait une envie folle de l'avaler tout cru. Le barbeau voyant sa dernière heure arrivée, ne demanda pas son reste et hurla à la noble assemblée « Bulles, mes amis, ce sont des bulles que nous suggèrent les mulets. Ce sont donc des ronds dans l'eau que nous devons faire pour nous sortir de ce cercle visqueux! »

Depuis ce jour, sur la Loire d'abord puis, la mode ayant séduit les poissons de toutes les autres rivières, nos amis dans l'eau signalent leur présence par de magnifiques cercles qui se propagent comme une onde sur l'onde pure à la vitesse théorique de 13,41 cm la seconde.

Je vois bien que cette histoire ne semble pas vous convaincre. Méfiez-vous cependant de ne pas rester comme deux ronds de flan. Vous pourriez à votre tour, faire comme notre ami le pape et ses compagnons piscicoles, des bulles à longueur de journée.

Pitchoune, lui qui aime coincer la bulle, a dû se mettre à la géométrie pour comprendre cette histoire. Quant à Victor, notre ami, le petit garçon qui n’avait jamais eu le compas dans l’œil, il dut se rendre à évidence : il ne serait jamais poisson en dépit de son signe astral.

Rondement leur.


samedi 23 décembre 2017

L’enfant et les animaux

Conte de l'Avent
Le petit malade et le druide.



Mon cher Pitchoune, notre petit ami Victor pourrait parfaitement écouter cette histoire. Il fut lui aussi un enfant à qui l’on passait tous ses caprices. La vie n’est pas faite que de satisfaction, de cadeaux et de plaisirs. Il faut parfois accepter de donner avant de recevoir.

Il était une fois un enfant aimé des siens, choyé plus que de raison. Il était enfant-roi : celui qui obtient tout ce qu’il désire d’un claquement de doigt ou bien d’une colère tonitruante. Sa famille était tout à son service. La vie avait eu le don de le faire naître dans un environnement où les soucis d’argent ne se posaient jamais. C’est sans doute ce qui le rendit particulièrement capricieux.

L’existence équilibre parfois ce que la bonne fortune n’a pas justement réparti. Le gamin tomba malade : un mal mystérieux qui le cloua dans son lit sans que les médecins ni les plus grands spécialistes appelés à son chevet ne puissent découvrir son mal. Ses parents désespéraient de le voir se rétablir et satisfaisaient plus encore tous ses désirs, croyant naïvement que la santé lui reviendrait par tous ces cadeaux.

L’enfant abusa de la situation. Il réclama et obtint bien plus qu’il ne pouvait profiter. Livres, jeux, jouets, confiseries s’accumulaient dans sa chambre sans lui redonner cette santé qui le fuyait. Bien au contraire, plus il recevait, plus il souffrait. Son visage se creusait, il pâlissait et s'affaiblissait de plus en plus .

Cependant les désirs de l'enfant finirent par changer. Il tourna le dos aux jouets pour leur préférer affection, tendresse et considération. Il réclamait de quoi adoucir ses journées cloué dans sa chambre. Il désira un compagnon, un animal qui allait le distraire et lui redonner le sourire.

Il exigea d’avoir avec lui un gentil furet. Il savait qu’on ne lui refuserait pas cette incroyable demande. Il avait hésité entre un renardeau et une fouine. Rien n’était trop beau pour lui et il en profitait. Il obtint son petit carnassier qui pour lui passer le temps fut enfermé dans une cage au pied de son lit.

L’enfant se lassa vite de cette pauvre petite bête qui dépérissait dans sa prison. L’odeur fut vite insupportable tout autant que les bruits que le furet faisaient toute la nuit. La santé du garçonnet s'aggrava par manque de sommeil. Les parents, incapables de prendre une décision contraire au désir de l’enfant, attendirent que le malade lui-même réclamât que l'on sorte l'animal de sa chambre pour enfin assainir la pièce et libérer la malheureuse bête. Le furet retrouva avec joie sa liberté et se mit à courir tout à son aise !

Le temps passa encore, l’enfant était au plus mal. Il réclama, cette fois, un bel oiseau, pour égayer sa chambre. C’est un rossignol, ce merveilleux chanteur qu’il lui fallait sans la cage sur sa table de chevet. L’oiseau, capturé dans la forêt voisine, fut enfermé à son tour dans la chambre de l’enfant.

Quelques jours plus tard, le beau chanteur avait perdu sa voix et ses plumes se ternissaient. La prison était pour lui un supplice. Il regrettait sa forêt et sa liberté. L’enfant oublia vite ce compagnon silencieux. Les parents une fois encore attendirent qu’il demande à en être débarrassé pour libérer l’oiseau qui retrouva alors sa forêt et sa voix.

Les deux cadeaux avaient été deux échecs. Le gamin était si faible qu’il n’avait plus ni l’envie ni la force d’exprimer un caprice nouveau. Il se laissait dépérir, ne mangeait plus ; il s’en allait doucement. Ses parents, au désespoir, avaient renoncé à tout recours : ils passaient leurs journées au chevet de leur cher enfant.

Un matin, son état empira plus encore. L’enfant était si faible qu’il était presque impossible d’entendre son souffle de voix. Dans un soupir il dit : « J’aimerais revoir mon petit furet et mon beau rossignol ! » Aussitôt, les parents lui promirent de les faire revenir. L’enfant, dans un sursaut d’énergie, se souleva et dit : « Oh, non, je ne veux pas les voir malheureux dans leur prison. C’est dehors, en liberté, à ma fenêtre que j’aimerais les voir et les entendre avant de quitter cette terre ! »

Inutile de vous dire l’effet que provoqua cette requête. Cette fois, les parents étaient incapables de satisfaire cette ultime volonté. Leur enfant réclamait quelque chose qui ne peut se faire. Sa demande ne pouvait ni s’acheter ni s’obtenir par la contrainte. Ils lui avouèrent qu’ils ne pouvaient réaliser son désir. L’enfant esquissa un sourire ; c’était la première fois que ses parents lui disaient NON.

Trop affaibli , il allait sombrer dans l’inconscience quand il se passa quelque chose d’extraordinaire. Un homme qui savait des secrets de la nature, un druide eut vent du désir de ce petit malade. Touché par son ultime demande, il s’empressa d’aller dans la forêt. Il invoqua les esprits, il chanta, il psalmodia des prières des temps anciens puis revint souffler quelque chose à l’oreille de l’enfant.

Quelques minutes plus tard, un petit oiseau vint frapper du bec à la fenêtre de la chambre du malade. Posé sur le rebord, le rossignol entonna le plus mélodieux chant qu’on eût jamais entendu jusqu’alors. Sur la pelouse, un furet courait en tous sens, heureux d’aller comme bon lui semblait. Le rossignol s’envola et se posa sur le dos de le furet.

À ce spectacle extraordinaire, l’enfant, que le vieux druide avait placé devant la fenêtre, rit aux éclats. C’était la première fois depuis si longtemps. Il passa des heures à regarder les facéties du furet et du rossignol. Puis ceux-ci s’en allèrent vers la forêt et l’enfant regagna son lit après les avoir salués de la main.

Chaque jour, les deux animaux vinrent rendre visite à l’enfant qui recouvra rapidement des forces et put enfin sortir de sa chambre. Il avait retrouvé goût à la vie : il avait compris que les plus belles choses ne sont pas celles qu’on réclame mais celles qu’on va chercher soi-même. Le rossignol et le furet cessèrent de venir quand ils comprirent que l’enfant était désormais capable de leur rendre visite dans les bois.

Ce fut ainsi que, chaque jour, il arpenta la forêt, observant les uns et les autres, découvrant des merveilles. Il oublia bien vite sa maladie et cessa d’être capricieux. Il avait trouvé sa voie. Il fit des études de botanique et passa sa vie à faire découvrir la faune sauvage et la flore aux enfants.

C’est ce vieux monsieur, mon cher Pitchoune qui me raconta son histoire. Un rossignol voletait au-dessus de sa tête tandis qu’un furet pointait le bout de son museau en dehors de son terrier. J’aurais aimé que Victor fut là lui aussi pour retirer le casque toujours vissé à ses oreilles et écouter cette belle aventure. Puisses-tu la lui faire entendre, mon brave Pitchoune, les enfants aujourd’hui, ont bien du mal à écouter les récits des anciens.

Miraculeusement sien.

vendredi 22 décembre 2017

La dinde et la bûche …



Conte de l'Avent à couteau tiré.



Il était une fois une dinde amoureuse d'un chapon. La pauvre demoiselle avait beau jouer de ses attraits, le fier poulet émasculé ne lui accordait aucun regard. La dinde en perdait son latin et se pensait victime d’un étrange maléfice. Elle, à la crête brillante, au regard de braise et aux formes dodues, comment pouvait-elle se trouver ignorée de la sorte ?

Elle confia son dépit amoureux à un bûcheron du voisinage, homme simple et un peu rustre. La solitude et la rudesse de son métier avaient fait de lui un grand naïf. Notre forestier, en homme de la nature ne fut pas surpris qu'une dinde vînt vers lui pour lui l’interroger. La belle se sentit en confiance car dans l’instant, le bûcheron s’en prenait à coups de hache à un vénérable châtaignier. Les gallinacés ne goûtent guère la fréquentation des marrons en cette période de l'année !

La conversation entre l'homme des bois et la belle prit un tour aimable. Nos deux personnages se trouvèrent des points communs, des passions qu'ils partageaient. La dinde adorait la musique et tout particulièrement la scie musicale, à laquelle elle s'adonnait en amatrice. Le bûcheron, touché par ce clin d'œil de l'histoire, avoua alors qu'il aimait quant à lui, jouer de la cabrette.

La volaille vit dans cet aveu, l’assurance d’avoir affaire à une homme simple. Qu’il jouât d’un instrument sans bec n'était pas pour lui déplaire ; quelle délicatesse de sa part ! De plus il lui confia qu’il était végétarien, ce qui l’autorisa à poser la question qui la tourmentait tant : « Comment se fait-il que ce Chapon ne regarde jamais les dames ? »

Le bûcheron fut fort ennuyé. Comment expliquer à une dinde le sort que subissait les chapons au moment des fêtes. Jamais un animal ne pouvait être en mesure d'imaginer que les humains fussent à ce point cruels. Priver un être sans défense, de sa virilité, pour qu’il s'engraisse et vienne garnir la table du réveillon, voilà qui dépasse la compréhension animale ! Il inventa une fable pour justifier l'indifférence du castrat.

Ne sachant par quel bout prendre la chose, il agit par association d'idées. Auprès de lui, fruit de son labeur, quelques belles bûches s’entassaient. Il en offrit une à la dame en lui servant une menterie qui venait de lui passer par l'esprit. «  Ma belle demoiselle, votre chapon est un timide, doublé d'un maladroit qui n'a pas osé céder à vos avances pour un prétexte terre à terre. Quand on est de basse-cour, on aime à se percher pour dominer une dame de sa condition. Cela vaut aussi bien pour les gallinacés que pour les hommes ... »

La dinde le crut quoiqu’il terminât sa longue tirade d’un retentissant rôt. La dame avait mordu à la fable, le bûcheron s’enhardit à lui servir des fariboles. Le chapon est sujet à presbytie, ce qui lui impose de prendre de la hauteur pour s'adresser à ses pairs. Que le chapon fût ainsi qualifié de presbyte, la demoiselle ne pouvait en rien mesurer l'ironie qui perçait dans ce propos.

C'est ainsi qu'elle s'en revint dans sa basse-cour, une bûche sous son aile, persuadée que ce promontoire lui permettrait d’obtenir ce qu'elle désirait le plus au monde. Le chapon ne resterait pas de bois quand elle lui offrirait ce perchoir. C'est le cœur battant qu'elle rentra en son poulailler où l'attendait de pied ferme une paysanne armée d'un couteau effilé. La dinde ne vit pas arriver le coup fatal, elle rendit son dernier soupir !

Elle fut promptement plumée et ébouillantée, la dame avait le repas de Noël à préparer. Notre cuisinière aperçut la bûche qui traînait sur le sol. Se souvenant que c’était la dinde qui portait ce rondin, elle ne se formalisa pas de l'incongruité de la chose. Bien au contraire, c'est de cette coïncidence que lui vint l’idée d’un dessert original pour accompagner la dégustation de la dinde.

Ainsi explique-t-on cette lointaine tradition de manger, les jours de fête, une dinde ainsi qu'un gâteau en forme de bûche. Si vous voyez sur cette pâtisserie, une scie et un nain au visage coloré, c'est en souvenir du bûcheron qui n'était pas bien grand ! Je ne vous ai servi que la pure vérité. Il arrive parfois que par des voies détournées, un chapon finisse par engendrer une belle descendance. La sienne fut pâtissière. C'est bien la preuve qu'il ne faut s'étonner de rien. C'est ce qu'on appelle la magie de Noël.

Nativement vôtre.

jeudi 21 décembre 2017

Il était une oie …


Conte de l'Avent
Fonder une famille !



Mon petit Pitchoune, écoute cette histoire. Elle est vraie et en dit beaucoup sur les hommes. Elle s’est passée près de chez nous et je te prie de te faire ton opinion, loin des préjugés et des idées reçues.

Il était une oie, une belle dame blanche qui se posa sur la Loire. Elle en avait assez de la grande migration et laissa ses congénères poursuivre leur chemin. Elle décida, bravant les lois de la nature, de se faire sédentaire et de fonder une famille avec un beau mâle du pays. C’est ainsi que l’on fait souche songeait celle qui venait de si loin.

Nous allons suivre ici les vicissitudes de notre oie volage ! Repoussant à jamais le long voyage vers Alaska, notre belle demoiselle désirait vivre le reste de son âge, sur les eaux douces de la Loire. Elle allait jeter son dévolu sur l’un des autres oiseaux qui vivent en ce pays qu’on appelait autrefois la Vallée des Rois.

La dame, convaincue de son pouvoir de séduction se mit en demeure de séduire le maître de ces lieux. Ce fut au Balbuzard, ce beau et grand rapace pêcheur qu'elle fit les yeux doux. Quand on mesure 65 cm, on rêve d'une descendance de belle taille. Hélas, notre ami ne vit pas d'un bon œil cette éventuelle compagne. « Je crains madame, de ne pas pouvoir unir ma destinée à la vôtre. Si nous avons la même taille, vous pesez bien moins? que moi. » Voilà bien des considérations de mâle prétentieux se dit-elle, en s'en allant plus loin !

Elle retint la leçon du poids et de la taille pour aller faire sa demande à un majestueux cygne. « Veux-tu devenir mon mari ? » lui demanda-t-elle sans préambule, la dame était directe. L'animal interloqué examina sa prétendante avant que de rejeter sa proposition. « Non, ma chère, notre union ne serait pas prudente ! Les hommes d'ici ont oublié que nous les cygnes étions autrefois des plats de fête. Mêler ma destinée à une oie pourrait réveiller ces vilaines manières culinaires. Allez voir de possibles époux qui n'ont pas peur des fourneaux ! » Elle s'en alla déconfite, l'argument lui ayant provoqué des sueurs froides !

Elle fit alors la cour à un étrange oiseau qui faisait le pied de grue, immobile près de la berge. « Noble pêcheur aux aguets, si ton bec est aussi long que ton aiguillette, je devine en toi un reproducteur puissant qui pourrait, si l'envie t'en prenait, me donner bien des poussins à l'allure altière ! » Le héron, puisque c'est de lui qu'il s'agit, rejeta la proposition qu'il trouva fort cavalière. « Madame, ni l'habit ni le bec ne font le moine ! Comment pourriez-vous vous percher à la cime de l’arbre dans ma héronnière ? Mon pauvre nid ne supporterait pas votre poids. » Non vraiment se dit-elle, les oiseaux de ce fleuve-là ne savent pas cacarder aux belles dames !

Elle avait subi trois échecs qui la rendaient fort triste. Mais toujours désireuse de vivre ici, elle décréta de briser les lois des apparences. Elle se précipita vers un oiseau en tous points différent d'elle, le cormoran qu’on nommait jadis, le corbeau marin. « Mon bel ami, voulez-vous être mon concubin ?» La demande était franche, la réponse le fut tout autant. « Ma belle dame au plumage si blanc, je suis fort honoré que ma parure noire ne vous ait pas effrayée. J'accepterais volontiers la demande si un petit détail ne venait à me contrarier. Les hommes ont perdu l'habitude de gober mes œufs, c'est désormais pourquoi, nous, les cormorans, sommes si nombreux sur les bancs de sable. Notre union pourrait réveiller bien des envies. On ne fait pas d'omelettes sans briser nos vœux ! ».

Cette fois, l'oie reconnut que la remarque était judicieuse, elle alla chercher sa bonne fortune ailleurs ! Le bon accueil du Cormoran lui avait redonné du courage. Elle se mit en quête d'un nouveau compagnon. C'est vrai que les oiseaux ne manquent pas en cette Loire. C'est à n’en point douter un paradis pour eux. Dans le lot hélas, nombreux étaient ceux qui bien que d'excellente compagnie, n’était pas taille à se marier à elle.

La mouette se rit d'elle, la Sterne consternée lui apprit qu’elle ne passait pas l’hiver ici, les autres se montrèrent plus courtois. Le gravelot ne lui tint aucun propos graveleux, la guifette se fit aimable, le grèbe habituellement castagneux se fit charmant avec elle. Le chevalier lui proposa d’être son servant, le vanneau lui parut fatiguant, la bécassine un peu sotte et l'aigrette, bavarde infatigable, se prenait pour gazette du fleuve !

Hélas pas de compagnon en vue ! Le temps passa, la fin de la saison des amours la laissa célibataire. Pourtant la demoiselle ne changea pas sa détermination première. Au printemps suivant, elle en est certaine, elle trouverait oiseau à marier. L’oie n’était pas demoiselle à baisser les ailes, il lui en fallait bien plus ...

En attendant ces jours meilleurs, voilà qu'il fit sur notre région un froid de canard. Les eaux de tous les étangs, les fosses et les petites rivières se figèrent, prises par le gel. Même la Loire charriait en maints endroits de magnifiques fleurs glacées. Heureusement, le courant du fleuve permettait sous notre pont Royal de garder un mince filet d’eau mouvante.

C'est là que tous les oiseaux du pays se serraient les ailes pour se tenir au chaud. Arrivèrent sur la Loire des oiseaux peu habitués à y séjourner. Des barbaries, des colverts et surprise pour notre oie, un magnifique jars domestique sur lequel elle jeta son dévolu. Ils se plurent immédiatement, l'animal de ferme lui trouvant caractère plus trempé que les femelles de sa cour. Ils décidèrent d'unir leurs destins. Quand la débâcle arriva, la fonte de la glace suivit l'embâcle, tous les visiteurs s'en retournèrent chez eux, le jars quant à lui resta près de sa belle dame blanche sur les rives d'une petite île boisée.

Vinrent bien vite les beaux jours et leurs amours réjouirent ceux qui eurent le bonheur d'assister à leur parade nuptiale. Jamais on ne vit spectacle plus charmant ! De beaux enfants finirent par briser leur coquille, ils étaient les fruits qu'on croyait bénis de cette union ligérienne.

Mais les hommes viennent parfois se mêler de ce qui ne les regarde pas. Des savants pensèrent qu'il y avait là union contre nature, risque de modifier les espèces. Il en va pour les animaux comme pour les hommes, le métissage parfois ne plaît pas à tout le monde. La première portée fut tuée sans ménagement par ces méchants gardiens de l'ordre normal. La dame blanche et son jars eurent pu se désespérer d’un tel crime. Au contraire, ils trouvèrent la force de recommencer en mémoire de leurs premiers enfants.

L'amour étant plus fort que le dictat des hommes, le jars et notre oie sauvage allèrent se réfugier loin de la ville. Ils ne renoncèrent pas, de leur union naquirent de nouveaux oisillons que nul ne vint occire. Monsieur et Madame Oie étaient les plus heureux du monde. D’autres oies sauvages, des bernaches vinrent se mêler à leurs enfants pour démontrer aux hommes que les mélanges sont dans la nature.

Maintenant sur la Loire, vous pouvez admirer une nouvelle espèce, fruit de nombreux croisements. Cette histoire n'est pas une menterie, prenez la peine de regarder autour de vous, il y a en Orléans, plusieurs bandes de ces volatiles sur la rivière. On n'entrave pas les amours, personne ne peut s'opposer à la puissance des cœurs qui battent l'un pour l'autre. Retenez la leçon, elle vaut pour les oies comme pour les hommes.

Nuptialement leur.

Photographies merveilleuses de 
Merci à lui
 

Les « tailleux de douzils »

  Les « tailleux de douzils » Notre Vardiaux, beau et fier bateau Oh grand jamais ne transportait de l'eau Rien qu...